Visibilisation, sensibilisation, accessibilité… On s'est demandé quels objectifs se cachaient derrière une marche féministe

A l'occasion de la journée de lutte contre les violences sexuelles et sexistes, jeudi 25 novembre, de nombreuses marches sont organisées un peu partout en France, dont une à Caen. Nous avons demandé à leurs organisatrices quel but elles y voyaient.

Depuis que les femmes ont manifesté à Versailles lors de la Révolution française, en octobre 1789, les marches ont toujours représenté un moyen pour elles de se réapproprier l'espace public.

A l'époque, en France, c'est la première fois que les femmes s'individualisent en tant que groupe, sur la scène publique, pour revendiquer leurs droits. Aujourd'hui, alors que de nombreuses marches féministes ont fréquemment lieu un peu partout dans les grandes villes de France, dont une à Caen, ce jeudi 25 novembre, nous avons demandé à deux de ses organisatrices à quoi servait, selon elles, une marche féministe. 

Se réapproprier l'espace public

"L'idée c'est d'abord de se réapproprier la rue et l'espace public", affirme Séverine Lelong, porte-parole d'Osez le féminisme 14. Pour elle, cet objectif est d'autant plus fort qu'il permet aussi de redonner confiance aux femmes, qui se sentent souvent en insécurité dans les rues de leur ville. 

Un avis que partage également Marie, membre du Collectif droits des femmes du Calvados. "En marchant la nuit, dans les rues de Caen, on réinvestit les rues dans lesquelles les femmes ont parfois du mal à se déplacer tranquillement.

Selon une étude réalisée en février 2021 par l'Agence européenne des droits fondamentaux (FRA), huit femmes sur dix, âgées de 16 à 29 ans, évitent certains lieux publics, à cause d'un sentiment d'insécurité.  

"Faire du bruit"

Cet objectif paraît évident. Séverine Lelong, porte-parole d'Osez le féminisme 14 le résume bien. "Nous organisons ces marches pour attirer l'attention, faire du bruit, et faire en sorte que nos revendications soient portées le plus largement possible". 

Pour elle, l'espace public a toujours été un lieu d'expression qui permet de relayer des revendications. "Bien sûr, nous avons en tête que notre marche sera relayée par les médias", ajoute-t-elle.

Parler des combats "passés sous silence"

En sortant dans la rue, les collectifs féministes en profitent également pour mettre en lumière des questions qu'ils considèrent parfois trop écartées du débat public. 

En ce qui concerne les violences faites aux femmes, Marie déplore le fait que les données ne permettent pas encore de visibiliser toutes les personnes victimes. "Les chiffres de féminicides, de violences conjugales ne prennent toujours pas en compte les personnes âgées de plus de 75 ans, par exemple."

Et puis, alors que les cas de féminicides sont de plus en plus médiatisés et que #MeToo et #BalanceTonPorc ont visibilisé les questions des violences sexuelles et sexistes, le champ des violences économiques reste encore trop sous-traité, d'après Marie. 

Pour elle, les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes sont encore trop peu mises en avant. Pourtant, "les femmes sont encore sous payées", déplore-t-elle.

Avec les horaires morcelés auxquels elles sont confrontées, les attaques contre leurs salaires, et le temps partiel qu'on leur impose, les femmes sont souvent précarisées. Et cela se voit souvent à la fin sur leurs retraites.

Marie, membre du Collectif droits des femmes Calvados)

à France 3 Normandie

Selon l'INSEE, les femmes gagnent 23% de moins que les hommes. A temps de travail équivalent, elles touchent également 16,8% de moins que les hommes. 

Être visible pour tous et toutes

Marcher dans la rue, c'est enfin rendre accessible le milieu militant à toutes et à tous. Marie l'affirme : "A chaque fois que nous organisons ce type de marches, nous rencontrons des personnes qui sont d'ordinaire très éloignées des lieux et milieux féministes.

Cette visibilité permet aussi de faire connaître les numéros importants et d'inciter des personnes qui n'oseraient pas forcément se rapprocher des associations à le faire. "Pendant la marche, nous sommes amenés à orienter les personnes dans le besoin, et qui n'oseraient pas entreprendre des démarches, vers les bons endroits", explique la membre du collectif. 

Les organisatrices de la marche expliquent également avoir choisi 18h30 comme heure de départ pour permettre au maximum de personnes de venir. 

On s'est dit qu'en organisant une marche plus tard, à 21h, par exemple, nous aurions peut-être perdu une partie des femmes, qui doivent encore malheureusement trop souvent aujourd'hui s'occuper de leur vie familiale, et de leurs enfants.

Séverine Lelong, porte-parole d'Osez le féminisme 14

à France 3 Normandie

A l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, une marche est organisée jeudi 25 novembre dans les rues de Caen, à l'initiative de plusieurs associations féministes (Collectif droits des femmes Calvados, Osez le féminisme 14, Comité Ensemble ! pour le Calvados et l’Orne, Solidaire Calvados). Départ 18h30, Place Bouchard. 

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