Comment faire cinq milliards d'économie ? Les élus locaux refusent les restrictions demandées par le gouvernement

La tension monte entre l'état et les collectivités locales, à qui l'on demande de faire cinq milliards d'euros d'économie sur le budget de l'année prochaine. Si les départements ont été rassurés par le Premier ministre Michel Barnier au cours de leurs assises la semaine dernière, les communes attendent aussi d'être considérées dans leurs difficultés.

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Le 12 novembre 2024, une centaine d'élus s'est retrouvée à Rouen (Seine-Maritime), devant la préfecture de Seine-Maritime, pour protester contre les annonces du gouvernement, qui demande aux collectivités locales un effort de 5 milliards d'euros. Des maires, députés, conseillers départementaux ou régionaux de l'Eure et de la Seine-Maritime, se sont ainsi rassemblés ceints de leur écharpe tricolore, avant de la nouer aux grilles de la préfecture, symbole de l'état en région.

Les régions, départements, et les grandes intercommunalités sont en première ligne. Mais comment procéder à de telles économies, quelles parties du budget faudra-t-il raboter ? Même s'il est trop tôt pour parler d'arbitrage, les élus s'inquiètent.

Les départements face aux restrictions

En cette période de disette budgétaire, tout le monde doit se serrer la ceinture. Sur les 5 milliards d'euros d'économie que l'état prévoit de faire sur ses dotations aux collectivités, les départements devraient assurer 44% de cet effort.

En Seine-Maritime le budget pourrait être amputé de 31,3 millions d'euros. Dans l'Eure, c'est une baisse de 11,4 millions d'euros qui est attendue. Quelles conséquences pourraient avoir ces mesures pour les habitants de ces départements ? Il est encore tôt pour parler d'arbitrage.

D'autant que les départements financent les routes, les collèges, une grande partie des aides sociales, les pompiers... Les collectivités ne souhaitent pas s'exprimer tant que la phase de dialogue avec l'état est encore en cours.

Certains départements ont cependant annoncé qu'ils seraient prêts à suspendre le versement du RSA. Ce ne sera pas le cas en Seine-Maritime, si l'on en croit son président Bertrand Bellanger. Il s'agissait plutôt d'un coup de pression, auquel le premier ministre n'a pas tardé à répondre. 

Michel Barnier s'est exprimé aux assises des départements de France, vendredi 15 novembre 2024 : "je suis là pour vous dire, en tenant compte de votre situation très spécifique, qui n'a peut-être pas été bien vue dans les scénarios budgétaires, que nous allons réduire très significativement l'effort qui vous est demandé par le projet de loi de finances".

Le premier ministre a rassuré les élus, mais il faut dorénavant convaincre les maires qui craignent aussi de voir leurs dotations fondre.

Des maires au "bout du rouleau"

Actuellement réunis en congrès, les maires de France arborent une écharpe noire en signe de contestation au budget 2025.

Une étude est sortie récemment sur le moral des maires. 83% d'entre eux se disent épuisés par leur fonction. Ces nouvelles difficultés qui s'annoncent ne devraient pas améliorer leur charge mentale.
François-Xavier Priollaud, le maire Modem de Louviers dans l'Eure, était l'invité de notre émission Dimanche En Politique, ce dimanche 17 novembre. L'édile propose donc de profiter de cette crise actuelle pour remettre à plat les règles du jeu, pour que chacun se recentre sur ses compétences.

On a un mandat depuis 2020 qui est sacrément compliqué, entre la crise covid, le choc inflationniste et les conséquences de la guerre en Ukraine, ce n’est pas simple. Mais je voudrais tout de même saluer la responsabilité des élus locaux. Je pense que tous les élus locaux sont d'accord pour contribuer à l'effort national. Le sujet, c'est qu'il faut que ce soit fait avec discernement et équité

François-Xavier Priollaud, maire (Modem) de Louviers et vice président de l'agglomération seine-Eure

"À travers les mesures qui sont annoncées, on demande des dépenses supplémentaires, on demande aux collectivités notamment de cotiser davantage sur les cotisations retraites pour les agents de la fonction publique. Pour une ville comme Louviers, tel que c'est aujourd'hui envisagé dans le budget, ça représente pour la seule année 2025, 300 000 euros supplémentaires. Il y a le double effet, des recettes en moins et des dépenses en plus... On a besoin de garder notre capacité à investir pour faire des économies structurelles", poursuit François-Xavier Priollaud.

Les maires s'inquiètent aussi pour les projets déjà engagés. Faudra-t-il les abandonner ou les différer ?
Christophe Bouillon, le maire DVG de Barentin en Seine-Maritime, président de l'association des petites villes de France, était aussi sur notre plateau. Il est prêt, dit-il, à faire des efforts, s'ils sont justifiés. "Des efforts, peut-être, mais à la condition derrière, qu'on dégage justement des ressources nouvelles, grâce à la simplification, grâce aussi à la transparence, et grâce aussi au fait que l'état balaye devant sa porte..."

"À chaque fois qu'on investit un euro dans nos collectivités, quelle que soit la taille, ça profite aux entreprises locales. La situation qu'on est en train de connaître, c'est des entreprises qui ferment la porte simplement parce qu'elles n'ont plus de carnets de commandes. Tout ce qu'on investit ruisselle dans tout le territoire".

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Comment faire cinq milliards d'économie ? Les élus locaux refusent les restrictions demandées par le gouvernement ©France Télévisions

L'état, aussi, doit faire des efforts

Les communes ont l'obligation de voter leur budget à l'équilibre, avec autant de recettes que de dépenses. "Elles répondent présentes quand on leur dit de faire un effort, dans tel ou tel demande, à la demande de l'état souvent, elles gèrent leur budget avec beaucoup de rigueur et de sérieux. Et en même temps, l'état est aujourd'hui dans une situation délicate, au bord du gouffre. Si les mesures sont confirmées, elles vont mettre en difficultés les collectivités locales, qui seront obligées demain de s'endetter encore plus. Il y a un paradoxe terrible", insiste Christophe Bouillon.

L'état est aujourd'hui dans une situation délicate, au bord du gouffre. Si les mesures sont confirmées, elles vont mettre en difficultés les collectivités locales, qui seront obligées demain de s'endetter encore plus.

Christophe Bouillon, maire de Barentin

Les collectivités rappellent qu'elles ne sont pas responsables du déficit de l'état, qui ne doit pas s'exonérer des efforts à entreprendre de son côté.

"On attend de l'état qu'il propose de vraies économies dans son fonctionnement, de vraies améliorations, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, et qu'il n'attende pas tout de nous", explique Olivier Paz, maire (SE) de Merville-Franceville, président de l'Union amicale des maires du Calvados, "effectivement nous pouvons être une part de la solution, avec un choc de décentralisation, et que l'état se reconcentre sur ses fonctions régaliennes".

"On a besoin d'une confiance restaurée avec l'état", conclut François-Xavier Priollaud.

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