Depuis mardi, 100 000 policiers et gendarmes sont mobilisés pour veiller au respect des règles de confinement imposées par Emmanuel Macron. En première ligne face à la population contrôlée, ils dénoncent le fait de travailler sans protection et craignent les effets de contagion dans leurs rangs.
"On est lancé en première ligne, au front, sans aucun matériel", déplore Mickaël Métairie, délégué syndical Unité SGP de l'Orne, qui note que les forces de l'ordre doivent évoluer dans un contexte quasiment similaire à celui des soignants. "On nous demande d'effectuer des patrouilles pour faire respecter les consignes de confinement, mais dans le même temps, nous continuons nos missions premières qui restent d'actualité".
Les commissariats ont bien reçu du matériel de protection "mais en trop petite quantité", déplore à nouveau Mickaël Métairie. "Tous les agents ne peuvent pas être équipés correctement. On part sur le terrain sans masque, sans gants, alors que l'on doit être au plus près de la population. Quand on va contrôler un laisser-passer, ou pire, quand on devra interpeller un auteur de crime ou délit, on sera obligé d'aller au contact. C'est un gros risque de contamination !"
Le Gouvernement a vite réagi à ces craintes des policiers, sans toutefois leur donner de véritables raisons d'atténuer leur angoisse.
"Les personnels prioritaires que sont les soignants disposent de masques dans la quantité suffisante. Nous verrons dans un second temps pour ce qui est des forces de l'ordre. Je comprends complètement leur inquiétude. Nous ferons le maximum pour que ceux qui doivent l'être soient équipés", Sibeth N'Diaye, porte parole du Gouvernement
@alliancepolice invite @SibethNdiaye à venir patrouiller ou assurer l'accueil du public avec nos collègues sans aucune protection ! pic.twitter.com/i2kj4VNorq
— ALLIANCE PN (@alliancepolice) March 17, 2020
Déjà à bout de souffle et de nerfs après l'épisode des Gilets Jaunes et les multiples manifestations organisées contre la réforme des Retraites, les policiers dénoncent ce manque de considération, couplé à la prise de risques. "Notre chef nous a autorisé à porter des masques lors des patrouilles mais le Prefet nous l'a interdit", se désole Martine Robert, du syndicat Alliance dans le Calvados. "On est aussi inquiet que la population. On voit ce qu'il se passe dans le Grand-Est, où de nombreux collègues ont contracté le virus".
Policier contaminé = commissariat fermé ?
A Caen, les syndicats ont demandé une réduction des effectifs et une plus grande rotation, dans le double objectif d'éviter une éventuelle contamination collective et d'avoir une réserve d'agents. Certaines missions de base ont été mises en stand-by (accueil du public, plaintes peu urgentes, convocations judiciaires...) pour mettre plus de policiers sur la voie publique.Dans l'agglomération caennaise, les forces de l'ordre se réorganisent. Les commissariat Doumer et Mondeville ont été fermés, pas ceux d'Hérouville-Saint-Clair et le la rue des Jacobins. "Mais que se passera-t-il si des collègues sont contaminés ?", interroge Mickaël Métairie.
En attendant, les policiers sont bien sur le terrain, où ils doivent appliquer "des consignes un peu floues, qui devraient s'éclaircir au fur et à mesure". Ils tentent d'effectuer les missions qui leur sont confiées, tout en maintenant des distances de sécurité, et en masquant leur anxiété, à défaut de pouvoir le faire avec leur visage."Il suffit qu'un ou deux d'entre nous contracte le virus pour qu'on soit obligé de fermer le commissariat. C'est déjà arrivé à Sanary dans le Var. Si on ferme à Flers, on nous dit qu'il y aurait des patrouilles venant d'Argentan ou d'Alençon. Mais que se passerait-il en cas d'incident grave sur lequel il faudrait intervenir rapidement ? C'est inconcevable !"