Connue pour son climat favorable à la végétation, la Normandie compte 420 000 hectares de forêts. Et plus de 75% d'entre elles appartiennent à des privés. Acquérir une forêt pour avoir son espace vert à soi, c'est donc tout à fait possible. Explications.
Amoureux des promenades en forêt, de la cueillette de champignons ou même, pourquoi pas, de la construction de cabanes entre deux arbres, et si vous vous offriez... votre propre forêt ? En Normandie, les parcelles de forêts privées (320 000 hectares au total) sont aujourd'hui entre les mains d'environ 90 000 propriétaires, selon le Centre Régional de la Propriété Forestière de Normandie. Et certains sont bien entendu... vendeurs.
12 000 euros l'hectare en moyenne
Il existe plusieurs sites internet qui recensent les opportunités à saisir. Un peu comme si vous alliez sur "Le Bon Coin" de la forêt. Sur foret-patrimoine.com ou encore proprietesforestieres.com, des offres sont par exemple régulièrement publiées pour faire l'acquisition d'un petit bois ou d'une plus grande surface. En tout, environ 500 transactions sont réalisées en Normandie chaque année.
Alors combien ça coûte d'acheter sa forêt normande ? Tout dépend de sa taille. Selon la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de Normandie, le prix moyen d'un hectare de forêt en Normandie avoisine aujourd'hui les 12 000 euros.
Un prix qui n'a fait qu'augmenter ces dernières années, et pour cause : sur le marché de la forêt normande, il y a aujourd'hui plus de demandes que d'offres.
Superficie, essences d'arbres... Comment (bien) acheter
Mais attention, tous les bois et forêts ne se valent pas. D'abord, notez qu'il existe d'importantes disparités de prix selon la localisation de la forêt. Si dans la Seine-Maritime et l'Eure, le prix moyen de l'hectare se situe autour de 15 000 euros, dans l'Orne c'est plutôt 10 000 euros et dans la Manche, on tombe même à 6 000 euros.
Mais deux surfaces de taille équivalente peuvent très bien se vendre à des prix très différents. Et pour cause, de nombreux critères peuvent faire varier la valeur d'un terrain forestier, comme nous l'explique Marc Cappelaere, expert en transactions forestières en Normandie :
Nous, ce que l'on détermine lors de l'expertise, c'est ce que l'on appelle la valeur vénale du bien. Cela repose sur 3 données : la valeur du terrain en tant que tel (le sol, la présence de patrimoine bâti, d'un étang, etc.), la valeur cynégétique (pour la chasse) et la valeur du peuplement forestier (les arbres).
Marc Cappelaereà France 3 Normandie
Sur ce dernier point, la Normandie est particulièrement prisée par les acquéreurs de forêts. Car les essences qui s'y trouvent sont considérées comme plus nobles qu'ailleurs en France, en particulier grâce aux feuillus, comme les chênes ou les hêtres.
Les forêts de Douglas sont quant à elle recherchées pour l'exploitation du bois, une filière qui représente environ 22 000 emplois en Normandie, selon l'Office National de Forêts (ONF).
"Tout le monde veut son petit coin de verdure"
Ces dernières années, Marc Cappeleare a vu arriver sur le marché de nouveaux types d'acquéreurs. "Pendant des années, la possibilité de chasser était l'une des principales motivations des acheteurs. Désormais, les gens veulent acquérir simplement pour le plaisir d'un espace vert. Aujourd'hui, tout le monde veut son petit coin de verdure."
Mais l'achat d'une forêt peut aussi servir des intérêts financiers. D'abord d'un point de vue fiscal, puisque les bois et forêts bénéficient d'une exonération de l'Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) à hauteur des 3/4 de la valeur vénale du bien. Des allègements fiscaux sont aussi prévus en cas de succession de patrimoines forestiers. Cela concerne donc essentiellement les particuliers fortunés, qui se portent acquéreurs de petites parcelles.
Le replay à visionner : ENQUETES DE REGION : A quoi servent nos forêts ?
"Pour les plus gros massifs (plus de 25 hectares), explique Marc Cappelaere, ce sont des groupements fonciers d’investissements qui achètent. Ils revendent ensuite des parts à des actionnaires qui recherchent de la rentabilité."
Car oui, on peut acheter un morceau de forêt comme on achèterait une action et en retirer un revenu financier en tant que propriétaire. "Mais cela reste des taux de rendement assez modestes, autour de 1,5%", nuance l'expert.
Favoriser une bonne gestion de la forêt
Pour toutes ces raisons, l'achat de forêts tend à se démocratiser en France et dans notre région. Mais ce constat est-il vraiment une bonne nouvelle ? "En Normandie, on observe une faiblesse structurelle, explique Thierry Leroy, chef de service transmission à la SAFER Normandie. La propriété forestière est morcelée, ce qui est préjudiciable à sa bonne gestion."
Dans notre région, la très grande majorité des parcelles sont en effet de petite taille. Les propriétaires privés normands de bois et de forêts possèdent en moyenne une surface de 3,2 hectares. Des bois qui sont souvent peu gérés, peu entretenus et peu valorisés selon Thierry Leroy. Beaucoup sont tournés exclusivement vers la production de bois de chauffage, alors que leur potentiel économique (pour la filière bois) et environnemental pourrait être mieux exploité.
Lutter contre ce morcellement de la propriété forestière est aujourd'hui l'une des principales missions de la SAFER de Normandie qui bénéficie d'ailleurs d'un droit légal de préemption (priorité sur le rachat) sur les parcelles isolées de moins de 4 hectares. Si vous êtes vendeur ou acquéreur d'une propriété, vous pouvez aussi solliciter la SAFER pour l'estimation du bien et l'organisation d'une transaction sécurisée.
Quelles ressources pour vous lancer ?
Les surfaces forestières vendues par la SAFER sont attribuées "à des candidats, privés ou publics, dont les projets concourent à la mise en œuvre de politiques d’aménagement durable des territoires", peut-on lire sur le site de la structure.
Bref, selon une logique de conservation et de valorisation du patrimoine forestier normand. Essentielle pour l'avenir de nos bois et forêts.
Si vous êtes propriétaire d'une parcelle, ou si ces quelques lignes vous ont convaincu de le devenir, vos principaux interlocuteurs pour avoir des informations sont donc la SAFER de Normandie, le Centre Régional de la Propriété Forestière de Normandie, un organisme public placé sous la tutelle du Ministère de l'Agriculture, ou encore l'Union Régionale Fransylva Normandie, le syndicat des propriétaires forestiers.