Des cours de natation au plus près des habitants grâce à un camion-piscine itinérant. C’est l’idée de l’association normande Aqwa Itineris. Elle déploie un bassin mobile sur toute la France, à la demande des collectivités locales.
A Nurcourt, petit village du Vexin, un étrange camion s'est installé pour trois semaines dans la cour de l'école communale. A l’intérieur du véhicule, les élèves de CE1 profitent d'une séance de natation. Par petits groupes, ils apprennent à nager, sous les consignes de deux maîtres-nageurs. Le jeu de l’étoile de mer les aide à flotter sans paniquer.
"C'est facile pour les enfants. Ils n'ont pas à se déplacer. On peut régler la température. Là, elle est plus haute que dans une piscine traditionnelle. C'est rassurant pour les jeunes. Quand on débute, on a souvent un peu froid et peur" explique Thierry Di-Castéra, maître-nageur sauveteur de l’association Aqwa Itineris.
Pas de piscine à proximité de la commune
"Il n'y a pas de piscine dans le Vexin" déplore Nadine Ninot, présidente de la communauté de communes Vexin-centre. Le seul établissement a été détruit lors de la tempête de 1999 et n'a jamais été reconstruit. "C'est trop cher" confie l'élue. Alors elle a demandé à faire partie de l'expérimentation du camion-piscine, avec l'objectif de le mettre au plus près des enfants. "Il y a beaucoup de demandes des parents. Il y a une activité bébés nageurs, des créneaux pour les séniors". L'idée est ensuite de se regrouper à plusieurs communes pour acquérir un véhicule, "pour réduire les coûts d'achat et de fonctionnement" précise Nadine Ninot.
Un projet né au Maroc
Ce véhicule pédagogique est géré par une association normande, Aqwa itineris. Mais le concept est né à des milliers de kilomètres de la Normandie, dans le moyen Atlas, au Maroc. Jean-François Buisson, travailleur humanitaire, s’est inspiré du concept de plancher de piscine réglable, inventé par son père à Rabat dans les années 1950. Grâce à un simple bouton, l’enseignant modifie la profondeur de l’eau de 20 centimètres à 1 mètre 20. Jean-François Buisson a adapté l'idée pour un bassin transportable en camion. Le prototype a été réalisé avec l'aide de l'école polytechnique de Lausanne. Destiné à l'origine au Maroc, le projet a séduit en Suisse mais aussi le ministère des sports français. Aujourd’hui, son camion sillonne toutes les régions de France.
Mon objectif est de réduire le nombre de noyades, notamment chez l’enfant. Beaucoup ne savent pas nager car il n'y a pas de piscine à proximité de chez eux. Là, c'est la piscine qui vient à eux. Grâce au plancher réglable, en deux séances l'aisance aquatique est acquise. En six séances, un enfant de 7 à 8 ans sait nager. Grâce au camion-piscine, on raccourcit le temps d'apprentissage. Mon prototype ne s'adresse pas qu'aux zones rurales. De nombreuses grandes villes manquent aussi de ligne d'eau et le projet est là aussi une des solutions pour apprendre à nager.
Jean-François Buisson, créateur du projet Aqwa Itineris
En France, la noyade reste la première cause de mortalité par accident chez les moins de 25 ans. Cet engin est le premier et seul modèle de piscine nomade dans l’hexagone.
Limiter le coût d'accès aux piscines pour les collectivités
Aujourd'hui, la construction d'une piscine coûte au moins dix millions d'euros, auxquels il faut rajouter de lourds frais de fonctionnement. Le camion vaut, lui, 700 000 euros. La somme est plus facile à débourser pour un regroupement de communes ou un département.