C'est une affection mal connue, le syndrome d'alcoolisation fœtale ou SAF. Une journée mondiale était organisée ce lundi 9 septembre pour informer les futurs parents des risques pathologiques liés à la consommation d'alcool pendant la grossesse. Rencontre à Bernay, dans l'Eure, avec une femme qui a perdu son bébé, et qui souhaite alerter les futures mamans.
À l'hôpital de Bernay dans l'Eure, le "Café des usagers" fait le lien entre le centre hospitalier, les professionnels de santé et les patients. Ce mardi 10 septembre, le thème de discussion choisi était le SAF, ou syndrome d'alcoolisation fœtal, au lendemain de la Journée mondiale organisée sur ce thème.
Même si les bouteilles d'alcool affichent un pictogramme informatif, près d'un tiers des femmes enceintes continue de boire de l'alcool pendant leur grossesse, alors que les conséquences peuvent être très graves pour leur bébé. Même en très faibles quantités, l'alcool peut avoir des répercussions délétères sur le développement du fœtus.
"J'étais enceinte et dépendante à l'alcool"
Florence est venue témoigner au "Café des usagers" de l'hôpital de Bernay ce mardi. Cette femme de 50 ans, mère d'une fille de 20 ans, a perdu une petite fille il y a quelques années en raison de son alcoolisation pendant sa grossesse.
"Je suis tombée enceinte en 2017, et malheureusement j'étais dépendante de l'alcool à ce moment-là, et je n'ai pas voulu me soigner. J'ai accouché à huit mois de grossesse d'une petite fille qui faisait 1kilo 300, en grande souffrance, et qui a été hospitalisée au CHU de Rouen. Là ils ont fait tout un tas d'examens pour savoir pourquoi le bébé était en mauvaise santé. J'ai perdu ma petite fille un mois et demi après".
Florence n'avait pas vraiment conscience des effets de l'alcool sur son bébé. "Je pensais que j'aurais un bébé en bonne santé. J'étais déjà dépendante de l’alcool quand je suis tombée enceinte. J'aurais dû prendre la décision d'arrêter l'alcool, et je ne l'ai pas fait. J'ai une fille aînée qui a 20 ans. À l’époque je buvais de temps en temps, donc elle est née en bonne santé. Mais elle a toujours été en échec scolaire, elle a du mal à compter. Je pense que tout cela est dû à l'alcool que j'ai consommé pendant ma grossesse. Je suis venue témoigner car moi je l'ai vécu, il ne faut pas boire pendant sa grossesse".
"L'alcool c'est zéro pendant la grossesse"
Le Docteur Caroline Marc Montenoise, gynécologue au centre hospitalier de Bernay, connaît bien le syndrome d'alcoolisation fœtale. "On a ici des patientes qui consomment de l'alcool pendant leur grossesse. L'alcool est une addiction comme peut l'être le tabac. Même avec la volonté d'arrêter, ça peut être compliqué si on n'est pas accompagné. Après, certaines patientes peuvent sous-estimer l'alcool sur la grossesse et le développement fœtal."
Bernard Duez est le président des usagers de l'hôpital de Bernay. Chaque mois il anime un "Café des usagers" autour du thème de l'alcool. "On dit toujours alcool zéro pendant la grossesse car la barrière placentaire ne joue pas. L'alcool passe directement dans le liquide amniotique et l'enfant se nourrit de ce liquide amniotique, donc d'alcool. Parfois il y a des enfants qui naissent que l'on est obligé de sevrer à la naissance. Donc on préconise alcool zéro. Il faut continuer d'informer, car il y a encore des gens qui pensent qu'un verre pour un évènement ce n'est pas important, et qu'on va passer à côté. Mais c'est alcool zéro tout simplement."
Retard de croissance et malformations
Le syndrome d'alcoolisation fœtal va provoquer des retards de croissance et des malformations du fœtus qui peuvent être visibles avant la naissance. L'alcool va aussi avoir d'autres répercussions après la naissance, au niveau cognitif ainsi que des retards d'acquisition : retard de croissance, coefficient intellectuel moindre, malformations.
"On dit souvent que c'est la première cause de handicap non génétique en France. C'est 100% irréversible et 100% évitable" poursuit Bernard Duez.
Selon l'Agence Régionale de Santé Normandie, 15 000 enfants naissent chaque année en France, atteints de TCAF ou troubles causés par l'alcoolisation fœtale, soit un enfant toutes les 30 minutes.
En Normandie, 28 nouveau-nés présentent chaque année un SAF, syndrome d'alcoolisation fœtale, et 672 sont touchés par des troubles causés par l'alcoolisation fœtale.