Hervé Morin explique pourquoi les lycées de Normandie ne doivent pas tous ouvrir en juin

Rentrée scolaire dans les lycées, transports, aides aux entreprises fragilisées, tourisme, comment le Président de la région, Hervé Morin, prépare-t-il le déconfinement en Normandie ? 

  •  "Nous n'ouvrirons les lycées qu'en fonction des besoins prioritaires" 


Etes-vous favorable à une reprise des cours le 11 mai ?

Hervé Morin : D'abord, le conseil scientifique préconise un retour à l'école en septembre. Nos voisins italiens et espagnols vont d'ailleurs faire de même.

Ensuite, on nous dit qu'il faut ouvrir pour lutter contre le décrochage scolaire, mais la scolarisation est facultative. Donc on ruine l'objectif car ne rentrera à l'école que celui qui le voudra, et pas forcément ceux qui en ont le plus besoin.

Les enquêtes, que font les maires en ce moment pour savoir combien d'enfants reviendront, semblent d'ailleurs indiquer que c'est plutôt là que se situe la plus forte absence."
 


C'est la région qui gère les lycées, comptez-vous les rouvrir ?

Hervé Morin : le lundi 1er juin est férié, le mardi c'est la rentrée des profs. Donc sur la première semaine, il reste le jeudi et vendredi, deux jours effectifs. Si on fait des demi-groupes, ça nous ramène à un jour de classe par élève.

La seconde semaine, ce sont les conseils d'orientation. Je me suis renseigné. J'ai consulté des directeurs d'établissements et des profs et ils le disent tous, cela signe la fin de l'année scolaire.
 

En clair, j'ai fait le calcul, on va dépenser une énergie incroyable pour ouvrir les établissements pour trois jours effectifs par élève, seulement. Est-ce bien raisonnable de prendre le risque de relancer l'épidémie pour si peu ? Est-ce que ça en vaut vraiment la chandelle ? 

 


Que dites-vous aux plus de 100 000 lycéens normands, retourneront-ils à l'école ?


Hervé Morin :  Je souhaite qu'avec l'Education Nationale, nous nous organisions pour que l'ouverture des lycées se fasse sur des besoins prioritaires. Ce sera donc du cas par cas en fonction de certains critères : les examens d'abord.

Bien sûr, on ouvrira les établissements pour faire passer les épreuves dans la filière professionnelle, générale et réunir des jurys.

De même, les lycées avec des prépas, comme Pierre Corneille, à Rouen, pourront accueillir leurs étudiants en première année parce qu'ils auront un mois de cours, puisqu'ils n'arrêtent que début juillet. On doit aussi arriver à organiser la scolarisation pour des groupes de décrocheurs.
 

Tout cela bien sûr, on va le faire. Mais ouvrir massivement tous les établissements avec les contraintes que cela implique, notamment en termes de transport, c'est beaucoup d'énergie et beaucoup d'argent pour trois jours de classe. 
 

  • L'épineuse question des transports : "Cela va devenir ingérable en juin"



Comment le transport scolaire va-t-il s'organiser dans la région ?

Hervé Morin : Nous allons assurer le transport scolaire, pour les élémentaires le 11 mai. Nous mettons en place toute une série de règles sanitaires : port du masque obligatoire pour les collégiens et lycéens, protection des chauffeurs, nettoyage des mains avec un gel hydroalcoolique en rentrant dans le bus.

Le gouvernement nous dit, il faut maximum 50% de passagers, mais en ajoutant, et là c'est contradictoire, un mètre d'espace de distanciation. Cela veut dire qu'il faut des bus qui soient plutôt à 25% de leur capacité de transport. 

Clairement, s'il fallait que tous les enfants de Normandie ou seulement la moitié soient rescolarisés début juin, on serait incapable d'assurer les conditions de sécurité.


L'équation se complique avec la mixité du public. Vous aurez des jeunes sans masques et d'autres avec masques et parfois, dans certains bus commerciaux, des adultes. Et ce n'est pas propre à la Normandie. Cette problématique se pose dans toutes les régions de France. 
 


D'ailleurs, les transporteurs, tous les grands patrons du secteur (Keolis, RATP, SNCF etc ... ) le disent et ont écrit au gouvernement, c'est ingérable. Techniquement mais pas seulement, ça peut générer de très fortes tensions entre les gens. 

J'ai fait une réunion avec les entreprises de transports, qui m'ont bien confirmé qu'elles n'avaient aucun moyen d'augmenter leur capacité. Il faut entre 9 mois et un an pour obtenir un bus que vous avez commandé. Cela ferait exploser le coût des transports.
 
  • "L'urgence, c'est la rentrée de septembre" 


Que préconisez-vous ?

Hervé Morin :  Pour moi, l'urgence, c'est septembre. Si le virus circule toujours, comme semblent dire les médecins, il va falloir penser une nouvelle organisation scolaire. Nous ne serons pas en mesure de transporter tous les enfants selon le schéma actuel.

De même pour l'enseignement. Nous allons devoir échelonner les horaires de cours et mettre en place des dispositifs pour les internats et les cantines. Cela va être compliqué.

Trois mois, c'est court pour repenser tout un modèle, qui devra respecter les normes sanitaires, protéger nos compatriotes, et assurer une scolarité la plus normale possible. C'est ça le vrai sujet.
 

On transporte 130 000 jeunes tous les jours dans les bus. Si on est sur un modèle d'un mètre de distanciation, comment on s'organise ? Comment on dédouble les classes ? Comment ça va se passer dans les internats ? Comment va-t-on servir les repas à la cantine ? Ce sont des organisations gigantesques. Pardon, je me répète, mais plutôt que de dépenser une énergie folle pour trois jours de classe pour les lycéens, nous ferions mieux de penser le nouveau modèle. 

 
 
  • L'enjeu économique : Quelles aides pour les entreprises ?


Comment la région va-t-elle soutenir les entreprises impactées par la crise économique ?

Hervé Morin : D'habitude, le soutien à l'économie, c'est 100 millions d'euros par an. Nous sommes passés à 180 millions d'euros. C'est presque le double.  

Il y a notre participation au fonds national de solidarité, à hauteur de 21M€.  C'est pour les entreprises d'au moins 1 salarié, dont le chiffre d'affaire annuel est inférieur à un million d'euros et qui enregistrent une perte d'au moins 50%.  

Avec les intercommunalités, nous avons crée un fonds de soutien régional pour les très petites entreprises, ayant perdu 30% à 50% de leur chiffre d'affaire ou qui ont été créées l'an passé.

Nous avons abondé toutes nos lignes de crédit de soutien classique aux entreprises, avec des prêts pour les PME, les plus impactées. Le 15 mai, nous allons mettre en place pour les TPE un système d'avances remboursables entre 5000 et 20 000 euros.


Les entreprises peuvent se renseigner auprès de l'agence du développement qui a mis en ligne un guide avec toutes nos mesures.  
 

MESURES POUR LES ENTREPRISES NORMANDES


 


Le secteur touristique va être fortement impacté, que proposez-vous ?

Hervé Morin : 

Je revendique depuis des semaines que dans les régions où le virus circule peu, comme la Manche, on puisse rouvrir les bars et les restaurants dès le mois de mai, avec des prescriptions sanitaires nationales. Pour l'instant, on n'est pas entendu. 


L'Etat a annoncé des mesures pour le tourisme et nous, nous avons un groupe de travail régional pour compléter. Vous savez, dans les dispositifs nationaux, il y a toujours des trous dans la raquette.

Nous lancons une grande campagne de promotion sur la région. Une agence de communication a déjà été mandatée. Et nous réfléchissons à d'autres dispositifs, mais c'est encore un peu tôt pour en parler.

 
Hervé Morin lance une pétition pour la réouverture des plages dès le 11 mai

En déplacement à Jullouville, ce mardi, Hervé Morin a annoncé le lancement  d'une pétition en ligne https://www.normandie.fr/libereznosplages pour la réouverture des plages en Normandie dès le 11 mai. Il a également adressé une lettre au Président de la République pour lui demander cette autorisation.

« La Normandie est l’une des régions où le COVID19 circule le moins (...) C’est la raison pour laquelle nous ne comprenons pas que la fréquentation de leurs plages ne soit pas autorisée le 11 mai alors même qu’elle sera possible pour certains jardins publics et les forêts ouvertes.

Cette réouverture doit bien évidemment être encadrée par des préconisations nationales. Nous pensons, dans cette période transitoire du 11 mai au 2 juin, qu’elle pourrait être limitée aux périodes de marée basse et à des activités ne présentant aucun risque, comme les promenades, la course à pied, des activités nautiques, la pêche à pied ou les entraînements équestres.

La décision d’ouvrir ou non les plages serait confiée aux Maires, de même que la mise en œuvre des règles locales d’accès à la mer qui complèteraient le cadre national »
poursuit Hervé Morin.
 
 

 
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