Trois ans après son sauvetage par ses salariés, l'abattoir de porcs AIM était de nouveau en grande difficulté et avait besoin d'un repreneur pour poursuivre son activité. La seule offre a été retirée ce mercredi alors que le tribunal de commerce de Rouen devait statuer sur le sort de la société.
"AIM est morte, si j'ose dire", a déclaré tristement ce mercredi Elise Brand, l'avocate des salariés de l'abattoir manchois, à l'issue de l'audience au tribunal de commerce de Rouen, "la décision est une liquidation immédiate avec une poursuite d'activité seulement pour permettre de livrer nos clients cette semaine, jusqu'à dimanche".
Trois ans plus tôt, les salariés normands avaient réussi à sauver leur société. Aujourd'hui, ces derniers n'étaient plus maîtres de leur destin, un destin qui ne dépendait que d'un éventuel repreneur. A la veille de l'audience du tribunal de commerce de Rouen ne subsistait qu'une seule offre de reprise, celle d'un groupement d'éleveurs des Côtes d'Armor qui s'engageait à conserver 184 des 237 salariés mais qui apparaissait très fragile.
Ce mercredi matin, les candidats bretons ont annoncé qu'ils retiraient leur offre de reprise. "Ce n'est pas une question de mauvaise volonté, bien au contraire, tous les éléments étaient réunis pour que ce projet puisse fonctionner mais une fois de plus, c'est une absence de financement de la part des banques privées", a déploré Elise Brand, "personne ne veut investir dans un modèle agricole différent, un modèle où les éleveurs peuvent gagner de l'argent, un modèle où on fabrique de la qualité, autre chose que du sous-vide."
Un des éleveurs impliqués dans ce projet nous a expliqué que le groupe de candidats à la reprise aurait pu demander un délai supplémentaire pour tenter de réunir les fonds nécessaires. Mais alors, ils se seraient retrouvés, nous a déclaré notre interlocuteur, responsables des dettes de l'entreprise. Une situation trop risquée financièrement pour ces éleveurs qui n'avaient jusqu'à présent réuni que 3,7 millions d'euros sur les 5 à 6 exigés par les administrateurs judiciaires.
Les salariés, qui n'ont pas pu assister à l'audience, devaient apprendre la triste nouvelle ce mercredi vers 17 heures lors d'une assemblée générale organisée dans le garage de l'abattoir de Sainte-Cécile. "C'est un combat qui s'achève mais d'autres combats vont commencer", explique Elise Brand, "Nous sommes en liquidation judiciaire, ça veut dire que les salariés vont être privés d'un plan de sauvegarde de l'emploi, le plan social, les mesures d'aide au reclassement interne et externe. Mais on peut faire des choses et c'est nécessaire. Ce sont des salariés qui ont beaucoup d'ancienneté, qui sont dans une région très sinistrée. Il a été convenu que tout le recouvrement des créances clients, tout l'actif qui pourra être récupéré, sera investi dans le plan de sauvegarde de l'emploi, c'est l'engagement qui a été pris".