Relier l'île de Jersey à la Normandie. Un serpent de mer qui ressurgit suite à une rencontre entre le gouvernement de Saint-Hélier et des parlementaires français. Jusque-là, on parlait plutôt d'un pont. Cette fois, c'est un tunnel qui est envisagé, et même pris très au sérieux dans les îles anglo-normandes.
Si côté français, l’idée peut faire sourire, nos voisins anglo-normands eux envisagent très sérieusement une liaison directe avec le continent. Et ce depuis plusieurs années. La population sur l'île est vieillissante.
Le prix de l'immobilier empêche l'installation de jeunes actifs. Mais jusqu’ici, l’idée était plutôt de construire un pont, l’un des plus grands du monde même, 25 kilomètres, pour relier Jersey à Barneville-Carteret dans la Manche.
Du pont au tunnel
Lors d’un entretien au Jersey Evening Post le 24 octobre dernier, Kirsten Morel, ministre du Développement économique de l’île, a remis le sujet de la liaison avec le continent sur la table, évoquant cette fois l’éventualité d’un pont ou d’un tunnel.
Et c’est bien d’un tunnel dont ont parlé les ministres des îles anglo-normandes et les parlementaires français lors d’une rencontre mi-février.
L'idée que des personnes puissent vivre en France tout en venant travailler à Jersey serait d'une très grande aide pour le développement économique de l'île. Comme les Ferry, les bateaux ne peuvent pas transporter suffisamment de monde chaque jour, le seul moyen d'y parvenir serait d'avoir un tunnel entre ici et la France.
Kirsten Morel , ministre en charge du développement économique de Jersey
Jersey-Granville par la route
Côté français aussi l’hypothèse devient séduisante. Le député LR de la Manche Philippe Gosselin, président du groupe d'études sur les îles anglo-normandes, se dit « ni pour ni contre ». Mais un tunnel routier entre Granville et Jersey serait un plus pour l’économie normande selon lui.
L’avantage c’est de permettre à des continentaux -normands, bretons, manchois- de pouvoir aller facilement dans les anglo-normandes. C’est aussi une destination touristique intéressante. C’est aussi un marché important : près de 200 000 personnes qui ont un niveau de vie assez élevé. Les Jersiais et Guernesiais sont tournés davantage maintenant vers les circuits courts, donc pour l’économie de la Manche et normande cela pourrait être un vrai atout.
Philippe Gosselin, député (LR) de la Manche, Président du groupe d'études sur les îles anglo-normandes
Mais dérouler un tunnel pour les Jersiais drainerait aussi son lot d'inconvénients côté manchois, le député Philippe Gosselin ne l'oublie pas : "Cela ferait augmenter la pression foncière chez nous alors qu’elle doit se réduire, la pression sur l’immobilier aussi alors que des travailleurs de chez nous ont déjà du mal à se loger."
Les Jersiais sont-ils prêts à perdre leur insularité ?
Tout cela reste très hypothétique. Aucune étude n'a encore été lancée. Les discussions n'en sont qu'au stade normands/ anglo-normands et le gouvernement français n'a pas été sollicité. Le projet de tunnel doit passer les barrières de faisabilité géologique, environnementale, économique, ...
Et même s'il passe ces examens, qui dit que les Jersiais sont prêts à renoncer à leur identité d'îliens? Comme le rappelle Philippe Gosselin, "c'est pour eux une question quasi existentielle: en se raccrochant au continent, on perd son insularité : c’est perdre une partie de sa culture et un isolement qui a certains avantages."