La production a définitivement cessé le 27 juin. Quelques salariés sont encore occupés à conditionner les derniers fromages tandis que la cellule emploi poursuit son travail de reclassement du personnel : "notre chance, c'est qu'il y a du travail tout autour", indique le directeur de l'usine.
Les machines se sont tues, comme prévu, le jeudi 27 juin. Le silence ne s'est pas pour autant abattu sur la fromagerie. Quelques salariés sont encore au travail afin d'emballer les derniers fromages sortis de la chaîne de production. "Mais à partir du 11 juillet, il n'y aura presque plus personne sur le site", précise Vincent Lebaudy qui dirige les usines de Ducey et de Coutances. "Le déménagement est en cours. On fait les cartons. Après le 14 juillet, on va arrêter les chaudières, retirer les produits dangereux pour mettre le site en sécurité. La fermeture définitive est prévue le 26 juillet".
"C'est dur. Il y a beaucoup de gens qui ne vont pas bien", soupire Dominique Giard. Le délégué CGT de l'usine rumine amèrement "la mort prématurée" de son usine. "Vous vous rendez-compte, tout avait été rénové ces dernières années. On avait un service de Recherche et Développement, des salariés flexibles capables de mettre au point de nouveaux produits. C'est du gâchis".
Un marché de l'emploi dynamique dans le Coutançais : 230 offres en CDI recensées
D'ailleurs, quand la Compagnie des fromages annonce en juin 2018 vouloir cesser ses activités à Coutances, la nouvelle fait l'effet d'un choc. Le maire, Yves Lamy, ne cache pas sa surprise. "Il y a quelques mois, une journée portes-ouvertes était organisée pour nous dire combien l'outil était performant..." Mais "le marché de la pâte molle" est en repli constant depuis dix ans : la Compagnie des fromages a choisi de rapatrier la production dans ses autres usines.
Le Plan de Sauvegarde de l'Emploi a été signé à l'automne pour les quatre-vingt six salariés de l'établissement. À ce jour, selon le décompte effectué par le directeur de l'usine, "huit personnes sont parties à la retraite. Vingt-sept salariés ont accepté des offres de reclassement en interne dans les usines de Ducey et de Vire principalement. Un couple est même parti dans une de nos usines en Auvergne, précise Vincent Lebaudy. Treize reclassements externes ont aussi été effectués dans d'autres entreprises. Et vingt-six licenciements ont été notifiés".
"Ceux qui ont accepté les propositions de reclassement ont une période de deux mois d'adaptation renouvelable. Je ne sais pas combien resteront, précise Dominique Giard. Vire et Ducey sont à une soixantaine de kilomètres. Et beaucoup y vont à reculons".
L'Usine est à vendre, les procédures judiciaires à venir
"Notre chance, c'est qu'il y a du travail tout autour", souligne le directeur de l'usine. Le cabinet chargé du reclassement a dénombré "deux cent trente offres d'emploi en CDI. Et même plus de trois cents avec les CDD et l'intérim". Le Coutançais est en quasi plein-emploi. La situation est semblable dans l'Avranchin. Mais il n'est pourtant pas toujours si simple de trouver un point de chute. "C'est vrai, ils affichent des offres d'emploi en CDI. Quand les collègues se présentent, on leur parle d'intérim. C'est décourageant", tonne le délégué CGT.
"Notre cellule emploi va déménager à Coutances. Elle va continuer à travailler après la fermeture de l'usine pour aider les salariés dans leur reconversion, assure Vincent Lebaudy. Certains font des formations. D'autres passent des permis spécifiques. Notre objectif, c'est que chacun trouve une solution".
L'usine attend aussi son reclassement. Le bâtiment qui appartient à l'entreprise, est en vente. "Il est sain, entretenu. Nous laissons tous les équipements de production d'énergie", souligne le directeur. Mais selon la CGT, une clause de non-concurrence biaise le jeu. "Interdire la fabrication de fromages dans une usine qui est faite pour ça, c'est compromettre les chances de reprise", déplore Dominique Giard qui assure avoir porté l'affaire devant les tribunaux. "Aucune action en justice n'a été portée à notre connaissance, répond le directeur de l'usine qui justifie la position du groupe : nous sommes un groupe fromager. On ne va pas vendre ce site à une entreprise qui fabriquerait comme nous du Camembert et du Coulommier. Mais nous ne sommes pas opposés à une activité laitière qui ne nous concurrencerait pas". Plusieurs acquéreurs potentiels se seraient déjà manifestés, mais "aucun laitier n'a pris contact".