Le 21 novembre, la cour d'assises de la Manche avait acquitté le prévenu, un réfugié, jugé pour viol. Depuis, de nombreux sites d'extrême-droite avaient avancé que l'accusé avait été acquitté en raison de sa nationalité. La cour d'assise de la Manche dément.
Deux mots évoqués par la plaidoirie de la défense lors du procès d'un réfugié originaire du Bangladesh accusé de viol et d'agression sexuelle sur deux lycéennes de 15 ans, alors que lui-même était âgé de 18 ans, ont suffi à enflammer le web.
Lors du procès, la défense a utilisé une fois lors de sa plaidoirie la notion de "codes culturels" pour tenter de convaincre le jury que l'accusé ne maîtrisait pas entièrement la notion de consentement d'une relation sexuelle en France. Impossible de savoir si cet argument a pu influencer le jury de la cour d'assise, puisque les jurés se prononcent à bulletin secret. D'ailleurs, si, ces derniers ont prononcé l'acquittement pour viol, ils ont en revanche condamné l'accusé à deux ans de prison avec sursis pour agression sexuelle sur l'une des jeunes filles dans cette affaire.
Le parquet général a lui fait appel lundi 26 novembre, estimant "après réflexion, que des éléments du dossier mérite un réexamen", tout en assurant que le retentissement médiatique n'a pas pesé dans sa décision.
"La justice a renoncé à tout"
Sur le web, des élus, des sites d'extrême-droite, des anonymes, s'étaient très vite emparés du sujet sur les réseaux sociaux en affirmant de manière raccourcie que l'acquittement avait été prononcé en raison de la nationalité de l'accusé. "Un homme acquitté pour un viol de mineures car il n'a pas nos "codes culturels"", avait ainsi tweeté Nicolas Dupont-Aignan, président du parti Debout la France, en reprenant l'expression employé par la plaidoirie de la défense.La présidente du Front national, Marine Le Pen, avait également publié un message sur son compte Twitter en relayant un message posté sur Facebook par Laurent Obertone, un blogueur proche des idées de l'extrême droite, qui commençait son texte par "La "Justice" a officiellement renoncé à tout".Un homme acquitté pour un viol de mineures car il n'a pas nos "codes culturels". Écoeurante décision de "Justice" qui banalise le viol au nom du multiculturalisme !
— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) 22 novembre 2018
En France, la liberté et la sécurité des femmes doivent être défendues sans concession.
https://t.co/cBObFPrFWs
Cette décision retourne le cœur. Que va-t-on dire à ces gamines ? De faire confiance à la justice de leur pays ? MLP https://t.co/73JpE3JiGJ pic.twitter.com/8tYs2Qybb1
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 22 novembre 2018
De nombreux sites identitaires ont également relayé le message d'un acquittement pour viol en raison de "codes culturels" différents, comme la plateforme en ligne Europe Israël news qui a titré : "Un migrant accusé de viol sur une lycéenne est acquitté, la cour estime qu'il n'avait pas les "codes culturels" pour comprendre ce qu'il faisait".
"La cour n'a pas pris en compte cette notion de code culturel"
Interrogé par le quotidien Ouest-France, le président de la cour d'assises de la Manche, Jean-François Villette, a fait part de sa consternation devant ce déferlement médiatique."La cour n'a pas pris en compte un seul instant, dans sa réflexion, cette notion de code culturel, ni lors de l'audience, ni lors de la délibération. J'aurais d'ailleurs été très mal à l'aise si cela avait été le cas", a notamment déclaré le président de la cour d'assise de la Manche.L'avocat qui défendait la jeune fille qui avait porté plainte pour viol a également affirmé que "la défense n'a pas du tout utilisé l'origine de l'accusée comme levier".