Le 6 juin 1944, Michel de Vallavieille était touché de cinq balles dans le dos au manoir de Brécourt, dans la Manche. Des tirs alliés ! Son fils revient sur cet épisode tragique, auquel le jeune homme survivra, dans l'émission "Ici, il y a 80 ans".
En juin 1944, la famille de Vallavieille vit dans la maison de vacances familiale, le Manoir de Brécourt, à côté de Sainte-Marie-du-Mont (Manche). Elle y a trouvé refuge au début de la Seconde Guerre mondiale, pour trouver une vie meilleure qu'à Versailles. Le domaine est occupé par les Allemands, qui ont installé quatre canons à proximité.
"À quelques heures du débarquement, il y avait déjà une atmosphère pesante et difficile à vivre" résume Charles de Vallavieille, se basant sur le récit de son père. Deux frères de Michel ont perdu la vie au début de la seconde guerre mondiale. Jean de Vallavieille a été tué le 19 mai 1940. Noël de Vallavieille a perdu la vie près d'Amiens le 6 juin 1940.
Une famille consciente de l'imminence du débarquement
"Mon grand-père étant officier de l'armée française, avait quelques prémices. Les Allemands qui occupaient la maison étaient relativement nerveux. Et ils apprennent le débarquement dans la nuit par un soldat allemand qui amène à mon père un livre de messe, récupéré sur un parachutiste qu'ils ont tué ici" explique Charles de Vallavieille.
Le 6 juin 1944, les combats font rage autour de Sainte-Marie-du-Mont. Les troupes alliées sont arrivées à Utah Beach et rapidement, elles prennent la batterie de Brécourt et ses canons protégés par 58 soldats allemands. Cette bataille a fait l'objet d'un épisode de la série "Band of brothers".
Les parachutistes (américains, ndlr) arrivent à Brécourt. Ils tirent dans les fenêtres, dans les portes. À ce moment-là, la famille se sent menacée alors qu'ils étaient à l'intérieur de la maison. Ils sortent tous ensemble pour expliquer qu'il n'y a plus d'Allemands, que c'est fini. Mon père explique qu'il est civil, les bras en l'air. Les parachutistes sont de chaque côté, en arc de cercle. Ils le font avancer, et pour une raison qui restera toujours mystérieuse, à un moment, ils le fusillent dans le dos.
Charles de Vallavieille
Michel de Vallavieille est touché par cinq balles. Le jeune homme est dans un état critique. Charles de Vallavieille, ancien officier, ayant déjà perdu deux fils, ne peut résoudre à voir Michel mourir. "Il fait tout ce qu'il peut pour faire admettre qu'il s'agit d'une erreur. Un infirmier finit par arriver et fait un diagnostic. Après plusieurs heures de négociations, Michel est transporté par des infirmiers américains jusqu'à Utah Beach. Il sera opéré une première fois, le 7 juin. Puis, il part le 10 juin en bateau vers l'Angleterre où il restera huit mois à l'hôpital " raconte Michel de Vallavielle.
Durant deux mois, la famille ignore si le jeune homme de 24 ans a survécu, jusqu’à ce qu'une lettre arrive au manoir.
Michel de Vallavieille ne rentre en Normandie qu'en février 1945, après une longue convalescence en Grande-Bretagne.
Un artisan des commémorations du débarquement
Il ne parlera jamais de cet événement à ses six enfants. "Il ne voulait pas se mettre en avant" explique Charles de Vallavieille. Son fils apprend cette histoire, comme la France entière, lorsque Michel témoigne à l'occasion du vingtième anniversaire du débarquement, en juin 1964 dans l'émission "cinq colonnes à la Une" sur la RTF. "J'avais neuf ans. Ça fait un drôle d'effet d'apprendre ça. On n'avait pas la télévision et on est allé regarder l'émission chez des gens qui travaillaient chez nous, et qui vivaient juste à côté. Ça reste un souvenir violent" confie Charles de Vallavieille.
Michel de Vallavielle n'a gardé aucune rancœur de cette "bavure". Bien au contraire. Après être devenu maire de Sainte-Marie-du-Mont, il décide de commémorer la libération de la France. Durant plusieurs années, il travaille à la création d'un musée municipal pour mettre en lumière les batailles ayant eu lieu dans le Cotentin. En 1962, le musée Utah Beach ouvre ses portes. Il reste à sa tête jusqu'à sa mort en 1991. Depuis, Charles a repris le flambeau. Sa petite fille, Rose, aimerait suivre ses traces alors qu'elle n'est âgée que de 12 ans.
Émission Ici, il y a 80 ans, à la rencontre de la famille Vallaivielle à découvrir le jeudi 30 mai à 10 heures 10 sur France 3 Normandie.
À voir et à revoir sur France.tv.