La retenue d'eau va être progressivement vidée pour la première fois depuis 1993. L'expertise qui sera effectuée au terme de la vidange sera sans doute déterminante pour l'avenir de ce barrage dont le sort n'est toujours pas réglé.
Chaque ministre de l'environnement qui passe fixe un nouveau cap, de sorte que nul ne sait plus ce qu'il adviendra du barrage de Vezins, ni de son petit frère, celui de La Roche qui boit. En 2009, Chantal Jouanno jugeait "nécessaire" que la destruction de ces retenues d'eau construites sur la Sélune, chaque barrage constituant un "obstacle" à la libre circulation des poissons migrateurs. La machine administrative est alors lancée : en 2012, le préfet de la Manche signe un arêté "portant décision de l'arrêt imminent de la concession de Vezins et l'arrêt de l'autrorisation de La Roche qui boit".
Mais entre temps, le vent (politique) a tourné. En 2014, Ségolène Royal se rend sur place. Et tant pis pour la continuité de l'état, celle qui a succédé à Chantal Jouanno au ministère de l'environnement juge "paradoxal" de détruire des barrages qui produisent de "l'énergie renouvelable". Quant à la libre-circulation des migrateurs, "il faut que le rapport qualité-prix soit raisonnable. On ne met pas 53 millions d'euros pour faire passer les poissons" cingle-t-elle en proposant d'étudier des solution alternatives.
Destruction ou pas : le résumé du feuilleton (Emilien David et Joël Hamard)
Deux ans de travaux avant l'inspection du barrage
Le mois dernier, les équipes de la société Vinci qui a été désignée pour cette vidange ont commencé à travailler dans l'embouchure de l'Yvrande, un affluent de la Sélune. L'opération est plus délicate qu'il n'y paraît. 1,4 millions de m3 de sédiments, dont certains sont pollués par des métaux lourds, sont piégés par le barrage. Lors de la vidange de 1993, des particules en suspension dans l'eau avaient pollué la Sélune. "Le déroulement de cette vidange nécessite le maintien d’une bonne qualité des eaux en aval des retenues. C’est pourquoi des travaux de gestion des sédiments déposés dans le lit mineur de la Sélune et de ses affluents sont mis en œuvre en accompagnement de l’abaissement du plan d’eau" écrit la préfecture de la Manche dans le bulletin de suivi du chantier.Le niveau d'eau va donc progressivement baisser en même temps que seront récupérés les boues, la vase, le sable. Ce n'est qu'à l'issue de cette opération complexe qu'il sera possible d'inspecter ce barrage presque centenaire. Avant de trancher (définitivement ?), l'état souhaite en effet effectuer "une revue de sûreté de l'ouvrage". Si des travaux d'entretien sont jugés nécessaires, la facture donnera à réfléchir. Si le barrage est encore jugé bon pour le service, cela pèsera forcément dans la décision.