Le maire de Saint-Côme-du-Mont (50) a-t-il inventé les diverses agressions qu'il prétend avoir subies ? Ou au moins l'une d'entre-elles ? La réponse ne sera pas connue tout de suite puisque la comparution de Bernard Denis devant le tribunal correctionnel de Coutances pour délit de dénonciation imaginaire a été renvoyée au 6 septembre.
Durant un an, entre décembre 2021 et novembre 2022, Bernard Denis a fait la Une des médias à plusieurs reprises pour les agressions qu'il aurait subies. Nous utilisons désormais le conditionnel car le doute s'est installé après les déclarations du maire de Saint-Côme-du-Mont l'été dernier et son volte-face concernant une attaque par balles sur son véhicule.
Retour sur une série de faits-divers qui interroge et que la justice devait examiner ce 17 janvier. Mais afin de donner plus de temps aux enquêteurs pour éventuellement relier les différentes agressions, le tribunal correctionnel de Coutances à renvoyé l'affaire au 6 septembre.
7 décembre 2021 : tags insultants et véhicules incendiés
En cette fin d'année 2021 en Normandie, il ne fait apparemment pas bon être soutien déclaré d'Emmanuel Macron. La campagne de l'élection présidentielle d'avril 2022 commence tout juste, et les intimidations se multiplient. Deux députés LREM, Christophe Blanchet (Calvados) et Bertrand Sorre (Manche), reçoivent des menaces de mort par courriel..
Dans la nuit du 6 au 7 décembre, c'est la maison du maire délégué de Saint-Côme-du-Mont qui est visée. Adhérent du MoDem, Bernard Denis vient d'organiser une réunion pour créer un comité de soutien au président de la République quelques jours plus tôt. Sur les murs entourant la parcelle, des graffitis "Le maire soutient Macron. A mort ! Zemmour président". Ces tags, il les découvre en pleine nuit, alors que le feu embrase le carport abritant trois véhicules. C'est d'ailleurs l'explosion des pneus qui le sort de son sommeil.
Cette agression fait le tour des médias nationaux. Les marques de soutien affluent de toutes parts. Bernard Denis est même appelé par le président de la République Emmanuel Macron, et par Jean Castex, Premier ministre.
15 décembre 2021 : Une lettre d'un corbeau
Quelques jours plus tard, Bernard Denis déclare avoir reçu une lettre de menace, directement à la mairie de Saint-Côme-du-Mont. La missive est anonyme, un extrait de son contenu n'est dévoilé que plusieurs mois plus tard : "Dehors, ou la mort !"
En février, la justice classe "sans suite" la procédure ouverte pour l'incendie de son garage et de ses véhicules ainsi que pour les menaces de mort. Raison invoquée par le procureur de la République de Coutances : le défaut d'identification d'un potentiel auteur.
18 mai 2022 : les vrais-faux coups de fusil
Emmanuel Macron est réélu depuis plusieurs semaines. Saint-Côme-du-Mont est tournée vers les commémorations du 78e anniversaire du Débarquement. C'est alors que le maire de la commune revient à nouveau à la Une de la presse. Il raconte avoir été attaqué par des hommes à bord d'un "véhicule de type 4x4, foncé avec une couleur comme l'armée, style camouflage". Deux coups de feu retentissent, et des plombs s'encastrent dans son fourgon.
Une nouvelle fois, une équipe de France 3 Normandie se rend sur les lieux et recueille le témoignage de l'édile. Quelques semaines plus tard, les enquêteurs le confondent, il revient sur ses propos, indiquant aux gendarmes avoir tout inventé et tiré lui-même sur son véhicule.
Pourquoi ? A-t-il subi des pressions ? Désirait-il revenir sur le devant de la scène médiatique ? Voulait-il relancer l'enquête sur l'incendie de son domicile en mettant les gendarmes sur une nouvelle piste ? Bernard Denis ne donne pas d'explications.
9 novembre 2022 : Bâillonné, ligoté, cloué
C'est sans nul doute l'agression la plus barbare de toutes. Le mercredi 9 novembre, Bernard Denis est retrouvé allongé face au sol sur une aire de jeu, près du chantier de la construction de sa nouvelle maison. Le maire est blessé au visage. Dans sa bouche, un chiffon. Ses mains et ses pieds sont liés. Pire, des clous de charpentier ont été plantés à l'aide d'une cloueuse pneumatique à l'intérieur de ses paumes et dans ses talons.
Bernard Denis est transporté à l'hôpital de Saint-Lô, pour y subir des soins ainsi qu'un examen médico-légal. On lui prescrit 21 jours d'ITT. Une enquête pour violences aggravées est ouverte et confiée à la brigade de recherches de Saint-Lô, qui est épaulée par la cellule d’investigation criminelle de la gendarmerie nationale. L'édile explique que deux hommes s'en sont pris à lui, lui reprochant encore son soutien à Emmanuel Macron.
En parallèle, le maire de Carentan-les Marais Jean-Pierre Lhonneur, révèle que son collègue est "dans un état psychologique fragile" et qu'il a séjourné plusieurs semaines à l'hôpital psychiatrique du Bon Sauveur à Saint-Lô durant l'été. Au surlendemain de sa sortie de l'hôpital, Bernard Denis tente de mettre fin à ses jours en avalant des médicaments. Il est à nouveau admis en établissement spécialisé.
23 novembre 2022 : rendez-vous avec à la justice
Alors qu'il vient de revenir sur son aveu de mensonge, et malgré son état de santé fragile, Bernard Denis se présente au tribunal de Coutances le mercredi 23 novembre 2022. Il comparaît en reconnaissance préalable de culpabilité.
Accompagné de son avocate et de sa fille, il ne s'y éternise pas, réitérant ses accusations contre des tiers au sujet de l'agression à coups de feu du mois de mai 2022, niant son mensonge. Deux mois plus tard, ce mardi 17 janvier, il revient au tribunal pour une audience correctionnelle pour cette même affaire.