Les producteurs de fromages AOP parlent d’un coup d’arrêt sans précédent. Dans les grands magasins, les consommateurs privilégient les produits longue conservation et la fin des marchés a aggravé le phénomène.
"Les fêtes de pâques, pour nous normalement c’est un petit noël. On prend la balle en plein cœur" affirme l'un des grands défenseurs du camembert de Normandie, Patrick Mercier, producteur bio à Champsecret dans l’Orne.
Pour Patrick Mercier, c’est la plus belle des saisons. L’arrivée du printemps, les vaches qui retournent au pré et une forte demande en camembert. Mais cette année, le coronavirus a totalement rebattu les cartes
Normalement c’est un moment de réjouissance cette sortie à l’herbe. Mais cette année, ce surcroît de travail est accompagné chez les éleveurs d’un gros point d’interrogations sur leur avenir car seul la grande distribution, en ce moment, tire son épingle du jeu.
Les gens se sont effectivement rués sur les grandes surfaces en privilégiant les fromages pasteurisés à longue conservation. Les produits au lait cru ont été massivement boudés dans les grandes surfaces. Seules les petites épiceries et les magasins bios ont continuées à écouler ce type de fromages.
"La première semaine, ça a été, mais maintenant les gens se réfugient vers des choses plus basiques" explique Patrick Mercier, "les marchés et les ventes s’arrêtent. On sent toute la filière qui s’effondre. Les clients bloquent toutes les commandes voire ils renvoient les fromages. Les grossistes divisent par deux les commandes. On a au moins une baisse de 50% de notre chiffre d’affaire. On va certainement jeter une semaine de production, 5000 fromages soit l’équivalent de 15 000 euros. "
Patrick Mercier est aujourd’hui totalement perdu. La semaine prochaine, il va reprendre une petite production, trois jours par semaine, car quoi qu’il arrive ses vaches continueront à fournir du lait.
Heureusement, la société Biolait avec qui il est en contrat, va l’aider à en écouler une partie. Une chance que n’ont pas d’autres petits producteurs de fromages. Ce défenseur des produits fermiers et d’appellations a une pensée pour toute la filière.
Les agnelages c’est en ce moment. En fromage de chèvre ou de brebis ils n’ont pas de contrat laiterie et c’est leur pic de production. Avec la fermeture des marchés, les petits producteurs vont être extrêmement touchés.
Patrick Mercier emploie actuellement dix-sept salariés. Il va être contraint d’en passer un certain en nombre en chômage partiel.