INTERVIEW. ExxonMobil : pas de plan de retraite anticipé, vers le licenciement d'une centaine de salariés ? "La grève va continuer"

Alors que 677 postes vont être supprimés sur le site ExxonMobil de Port-Jérôme-sur-Seine (Seine-Maritime) et qu'une guerre de négociations fait toujours rage entre les syndicats et la direction, le départ à la retraite anticipé d'une centaine de salariés pourrait être compromis… Les conduisant à être simplement licenciés.

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Toujours 677 postes supprimés... Mais une centaine de départs à la retraite en moins, sur l'unité chimie du site ExxonMobil de Port-Jérôme, et donc des licenciements supplémentaires en perspective. La décision de la direction de revenir sur les mesures d'âge ouvrant la retraite anticipée aux plus âgés suscite un tollé parmi les salariés et les organisations syndicales, trois semaines après leur refus de signer l'offre du Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE).

Nous avons recueilli la réaction de Thierry Guicheteau, délégué syndical central Force Ouvrière.

À lire aussi : ExxonMobil : les syndicats refusent l'offre de PSE et annoncent un nouveau mouvement de grève

"C'est un changement de paradigme profond"

France 3 Normandie : Comment avez-vous appris cette décision d'ExxonMobil de revenir sur le départ à la retraite des salariés les plus âgés de l'unité chimie ?

Thierry Guicheteau : Dans ce PSE, il y avait une version mise à signature pour toutes les organisations syndicales. Il fallait une majorité d'engagement et aucune organisation ne s'est prononcée pour la signature. À partir de là, on a vu avec stupéfaction qu'ils supprimaient trois années d'anticipation pour le personnel posté et une année pour le personnel de jour. Ce qui fait potentiellement plus de cent personnes licenciées en plus.

On n'a pas l'habitude de voir ça à ExxonMobil, c'est un changement de paradigme profond, une pression qu'ils mettent sur les salariés à travers les organisations syndicales pour nous faire signer un accord auquel nous ne sommes toujours pas favorables. Ils ne rouvrent pas les négociations et la seule réponse qu'ils ont, c'est de dire 'l'accord est toujours sur la table, signez-le, sinon il y aura potentiellement plus de cent licenciements en plus'. Ce n'est pas acceptable.

Comment les organisations syndicales comptent-elles réagir ?

Ce qu'on va essayer de faire, c'est de s'entretenir avec les instances administratives, en l'occurrence la DREETS [Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités, ndlr], que nous voyons cet après-midi en intersyndicale, pour avoir leur support. La DREETS a fait des recommandations à la direction et les réponses ne sont pas à la hauteur. Dans un second temps, nous allons rencontrer en visio le ministre de l'Industrie, M. Lescure, et nous allons voir avec lui s'il ne peut pas mettre une pression, tant au niveau local qu'européen, aux responsables, pour leur dire 'rouvrez les négociations pour essayer d'avoir un accord'.

"Nous n'avons plus rien à perdre"

Ces licenciements potentiels, les salariés les vivent comment ?

Très très mal. En fin de compte, l'entreprise appelle ça un jeu, 'le jeu de la négociation'. Les salariés ne sont pas dupes : ils prennent ça pour une pression inacceptable. D'autre part, la réponse de la direction aux refus des organisations syndicales de signer le PSE ne doit pas être des licenciements supplémentaires.

Un PSE, c'est justement un Plan de sauvegarde de l'emploi. La société doit donc tout faire, en termes de reclassement, de congés, de formations, pour faire en sorte qu'il y ait le moins de casse possible. Et en fin de compte, ils vont licencier des personnes en plus. Comment voulez-vous que les salariés le prennent ? Ils sont dépités, et ils restent forcément très solidaires avec les organisations syndicales. C'est même eux qui nous disent de ne pas signer l'accord.

Y aura-t-il d'autres grèves prévues ?

Nous sommes toujours en grève ; la grève va continuer. La chimie est en grève, le côté raffinage fonctionne. Mais rien ne dit qu'à un moment donné, le raffinage ne va pas rejoindre ce mouvement de masse collectif afin d'être solidaire avec les salariés de la chimie. Nous sommes un site sur lequel tout le monde se connaît et tout le monde, enfin la plupart des salariés, a travaillé pour une entité, l'autre ou les deux en même temps. Donc nous espérons que cette solidarité va continuer, ainsi que le mouvement de grève.

Qu'attendez-vous de vos discussions avec la DREETS ?

Nous nous avons espoir d'être entendus par la DREETS, mais aussi par le ministère, même si c'est une dimension politique. D'un point de vue administratif, je pense que la DREETS a tous les éléments pour ne pas homologuer ce PSE. Et derrière, les salariés sont prêts, nous n'avons plus rien à perdre, et nous irons au tribunal administratif, en opposition.

Propos recueillis par Titouan Allain.

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