Il voulait juste cultiver son jardin et vivre à l'ombre de ses idéaux. La catastrophe de Lubrizol l'a cueilli et laissé à terre. Comment se relever ? Ludovic Lepage a choisi de réfléchir à demain, au sein du Collectif des sinistrés de Lubrizol.
Cela faisait quelques mois que Ludovic Lepage, artiste peintre et militant écologiste avait entrepris de mettre en oeuvre ses idées, lorsque l'incendie de Lubrizol a souillé son jardin dans sa maison de Rouen.
Ce jardin qu'il avait patiemment cultivé avec sa famille, cette serre dans laquelle poussaient ses tomates, se sont retrouvés en quelques heures maculés de suie et de bouts de plaques de fibro ciment.
L'effroi avait commencé au petit matin lorsque de la chambre de leur petite fille de quatre ans, Ludovic et sa femme aperçoivent un nuage noir qui s'avançait vers eux.
Des photos ont saisi ce moment d'épouvante.
C'est la photo de la découverte du nuage de fumée dans la chambre de ma fille, qui à 4 ans, découvre un nuage chimique au dessus de sa tête. Cette photo m'évoque le début d'un an de cauchemar. C'est là que tout a commencé
Tout, c'est une colère immense, ponctuée de moments d'abattement.
La colère en découvrant son jardin maculé, en récoltant les bouts de suie à la pince à épiler, en compulsant toutes les traces qu'a laissé le nuage en passant au dessus d'eux.
Ludovic Lepage entreprend de tout photographier, de garder tous ces témoignages et de faire constater les dégats par un huissier, preuves qu'il n'a rien exagéré malgré le discours lénifiant des autorités.
Ses légumes souillés finiront en" brochettes à mensonges" dans les manifestations auxquelles Ludovic participe, brandis en étendard de ses rêves salis par d'autres.
Ma colère s'est dirigée sur les autorités. L'industriel il fait du fric et continue si on ne l'arrête pas. Par contre la protection due aux citoyens par l'état n'a pas été assurée.
Une inspiration contrariée
"Des grenouilles pleines de suie sous un nuage de fumée noire", c'est le tableau peint par Ludovic quelques jours après le sinistre.La plupart du temps je peins des aquarelles, des paysages, la nature...des choses classiques et douces. Depuis Lubrizol, j'ai testé la dénonciation dans ma peinture.
L'artiste avait besoin d'exulter et de mettre son courroux à plat. Lubrizol l'a malmené, lui occasionnant angoisses et nuits sans sommeil.
Depuis des mois, il se bat aux côtés d'autres riverains au sein du Collectif des sinistrés de Lubrizol, refusant de se soumettre au règne des supposés dominants.
"On entend trop souvent, ce sont des puissants, on ne peut rien faire, c'est trop douloureux... Effectivement c'est douloureux il n'y a qu'à me regarder, douloureux de se battre et de penser à ça. Mais les laisser faire, ça veut dire demain ça va recommencer deux fois plus" Ludovic Lepage
Un an après, Lubrizol continue de hanter ses pensées.
Le 26 septembre prochain, date anniversaire de la catastrophe de Lubrizol, sera l'occasion de manifester une fois encore sa colère, avec tous ceux qui n'ont pas fini de demander des comptes aux autorités et aux industriels.
Et de se confronter à ses démons, mais sans désarmer.
► À VOIR. "Lubrizol, un an après"
émission spéciale sur France 3 Normandie ce samedi 26 septembre à 17h55
Un an après l'incendie de l'usine Lubrizol, classée SEVESO, beaucoup de questions restent sans réponse.Connaît-on l’origine du sinistre ? Quelles sont les conséquences sanitaires et environnementales ? Comment vivent aujourd’hui les riverains ?
Ce samedi 26 septembre 2020 à 17h55, ne manquez pas notre émission spéciale "Lubrizol, un an après", présentée en direct par Émilie Leconte, avec les reportages de la rédaction de France 3 Normandie.