Voir la photo de son domicile dans le journal fait un choc. Surtout si elle rappelle un fait-divers. Respect de la vie privée et droit à l'information peuvent s'opposer mais l'image d'une personne et celle d'un bien ne sont pas protégées de la même manière.
A t-on le droit de diffuser l'image de ma maison où s'est produit un fait-divers ?
Françoise
Nombre d'entre nous se pensent propriétaires de l'image de leur maison qui est aussi le foyer, le lieu de la vie privée. Vivre dans un lieu chargé d'une histoire singulière peut rendre très sensible.
En cas de litige, trois questions sont posées : les photos ont-elles été prises de la voie publique ? Quel est le but de la publication ? Causent-elles un trouble anormal au propriétaire de l'habitation ?
Cas du survol en drone pour enregistrer des images d'une propriété privée
Durant l'été 2018, l'occupant d'une maison a tiré sur un drone de la plateforme audiovisuelle Netflix qui volait au-dessus de son domicile. C'était à Lépanges-sur-Vologne dans les Vosges.
Cet homme excédé vivait dans la maison qui fut habitée par Grégory Villemin, enfant assassiné en 1984.
Ce tir était une réaction excessive, mais ce survol avec enregistrement de prises de vue d'un domicile était illégal au nom du respect de la vie privée des personnes (peine maximale 1 an de prison et 45.000 euros d'amende).
Cas d'une photo de presse prise à partir de la rue pour relater un fait d'actualité
Le chalet du Grand Bornand, la maison bourgeoise de la famille de Ligonnès, le pavillon de la famille Troadec. Ces photos peuvent toujours être publiées par la presse car elles sont liées à des faits d'actualité et relèvent du droit à l'information.
"Lorsque le bien est rattaché à un sujet d'intérêt général, historique ou d'actualité pour les besoins d'information légitime du public et que cela n'entraîne aucune perturbation, gêne à l'usage ou à la jouissance du bien pour son propriétaire"
(ministère de la culture et de la communication)
Ces photos peuvent s'avérer dérangeantes pour les agents immobiliers qui remettent ces biens sur le marché ou les propriétaires qui les mettent en location touristique.
Les personnes qui occupent ces lieux sont, elles, protégées par le droit à la vie privée. Rien n'autorise à les identifier, les photographier, ni à montrer par exemple leur nom sur la boite aux lettres.
Aucun trouble anormal pour ces personnes ne doit être lié à la publication. Une nuance que les juges doivent évaluer en cas de procès.
"Le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci"
Peut-on diffuser une photo de la façade d'une habitation privée ? La jurisprudence française sur laquelle se fondent les tribunaux découle d'un procès à Rouen entre le propriétaire d'un hôtel particulier et un promoteur immobilier.
Il n'était pas question de l'évocation d'un fait-divers mais de l'usage publicitaire de la photo de ce bâtiment historique.
Les juges de la cour de Cassation ont fixé le 7 mai 2004 une limite : "le droit de propriété n'est pas absolu et illimité et ne comporte pas un droit exclusif pour le propriétaire sur l'image de son bien"
« Le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci ; il peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image par un tiers lorsqu’elle cause un trouble anormal ».