"Cela ne sert strictement à rien !" Le jeûne, une nouvelle mode alimentaire décriée par cette médecin

Alors que le jeûne est une pratique très en vogue, comme le démontrent des adeptes normands, Vanessa Folope, nutritionniste au CHU de Rouen (Seine-Maritime), déconseille très fortement cette pratique, qu'elle soit intermittente ou sur une semaine. Précisions.

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Qu'il soit intermittent ou temporaire sur une semaine, le jeûne est devenu une nouvelle mode alimentaire que beaucoup de personnes adoptent.

Les publicités pour réaliser des jeûnes alimentent les fils de nos réseaux sociaux après les fêtes de fin d'année. Si ces annonces mettent la plupart du temps en avant la perte de poids, Anaïs*, une habitante de Caen (Calvados) de 41 ans - qui a déjà effectué cinq jeûnes d'une semaine - met plutôt en exergue le bien-être.

Une descente alimentaire avant le jeûne

Elle a effectué quatre jeûnes encadrés en communauté et un avec des amis. C'est après avoir visionné un documentaire qu'Anaïs s'est lancé dans cette nouvelle mode alimentaire.

"Avant le faire le jeûne d'une semaine, tu fais une semaine de descente alimentaire où tu supprimes les aliments un à un (viande, laitage, céréales, légumes et fruits). Puis, pendant le jeûne, tu bois juste un verre de jus de pomme le matin si tu en as envie, un bouillon sans sel le soir ou des tisanes. Et tu bois de l'eau toute la journée bien sûr."

Pendant le jeûne, Anaïs fait des randonnées douces "pour s'aérer". C'est aussi un temps pour se reposer. Puis, au bout de sept jours de jeûne, elle reprend une alimentation normale progressivement. "On fait alors une remontée alimentaire."

"J'ai supprimé le petit-déjeuner"

Anaïs aimerait faire un jeûne tous les ans. "À chaque fois que j'en fais un, j'ai l'impression d'avoir énergisé mon corps. Et puis, dès que j'en fais un, je ne fais plus de migraine pendant un moment alors que d'habitude, j'en fais beaucoup."

De son côté, Benjamin*, 35 ans, un habitant de Rouen, a mis en place le jeûne intermittent depuis trois mois. "J'ai en fait supprimé le petit-déjeuner. J'ai perdu deux kilos et franchement, je me sens mieux et je n'ai pas plus faim que ça avant midi."

Mais pour Vanessa Folope, médecin nutritionniste et responsable médicale du centre spécialisé obésité du Centre hospitalier universitaire (CHU) Rouen Normandie, aucune étude scientifique ne valide les bienfaits du jeûne.

"D'un point de vue médical, cela ne sert strictement à rien"

Le jeûne effectué sur une semaine, à l'instar d'Anaïs, est littéralement proscrit par la médecin. "Cela n'a aucun d'intérêt et cela peut même être délétère sur la santé. Vous allez forcément perdre du poids, mais aussi bien de la masse grasse que du muscle. Et au bout de la phase de jeûne, l'organisme va se mettre en état de SOS famine pour reprendre le poids de base. Vous allez alors reprendre la masse grasse en premier, mais pas le muscle."

Vanessa Folope prévient alors contre le développement de troubles de comportements ou de compulsions alimentaires après les jeûnes. Mais aussi contre le risque "de reprendre plus de poids que l'on a perdu". "On peut alors être sujet à l'effet yoyo", un processus de perte de poids suivi d'une reprise du poids perdu.

Elle déconseille encore plus cette nouvelle mode alimentaire aux personnes fragiles. "On entendait à une période la promotion du jeûne contre les cancers, c'était dramatique. De manière générale, si on est fragile, si on est dénutrie sur le plan musculaire, un jeûne peut vraiment devenir dangereux."

Enfin, la médecin assure que le jeûne n'est pas non plus utile "pour détoxifier son corps"

Chacun fait ce qu'il veut cependant, je souhaite juste dire que d'un point de vue médical, cela ne sert strictement à rien.

Vanessa Folope, médecin nutritionniste

Quant au jeûne intermittent, Vanessa Folope énumère plusieurs études qui se sont penchées sur la question. "Mais pour le moment, nous n'avons pas d'études sérieuses, avec assez de sujets étudiés, qui ont apporté de vrais résultats."

Pour rappel, le jeûne intermittent consiste à allonger le jeûne physiologique de la nuit. "Une étude sur des jeunes adultes en prédiabète montre cependant des effets positifs sur les risques métaboliques. Ils ont allongé leur jeûne la nuit et cela aurait réduit leurs pressions artérielles, leurs taux de sucre et de cholestérol. Cela peut effectivement avoir des effets bénéfiques pour ceux qui arrêtaient de manger très tard dans la soirée."

Écouter son corps

Et pour ceux qui sautent le petit-déjeuner dans le cadre d'un jeûne intermittent, la médecin est partagée. "Selon une étude, il serait plutôt favorable de prendre un petit-déjeuner car on mange moins après dans la journée. Mais cela dépend de chacun. Certains n'ont jamais faim le matin. Il faut s'écouter, s'ils n'ont pas faim, il ne faut pas se forcer."

Pour la nutritionniste, la clef pour se sentir bien avec son corps, "c'est d'en être à l'écoute". "Il faut se reconnecter avec son corps, avec sa faim. Manger lentement pour ressentir la satiété, manger quand on a faim, faire bouger son organisme, cuisiner, se faire plaisir..."

Faire bouger son corps, prendre soin de son corps en mangeant sainement et prendre du temps pour soi. Voici les maîtres mots de la nutritionniste du CHU de Rouen.

*Prénoms d'emprunt

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