Avec la fin du chantier de réparation de la drague de Seine "Daniel Laval", la machine presque centenaire de fabircation allemande sera bientôt désarmée et remplacée.
C'est dans le port de Rouen, sous la lumière d'une belle journée d'automne que la manœuvre a eu lieu, à quelques encablures de la Seine, au fond du bassin Saint-Gervais pas très loin de l'endroit où, en juillet 1800, l'Américain Fulton procéda aux essais du Nautilus, le premier sous-marin du monde.
Indispensables dragues de Seine
Mais ce lundi-là (16 novembre 2020) pas d'officiels pour assister à la sortie du dock flottant du Daniel Laval, un bateau long de 108 mètres et large de 30 mètres, spécialisé dans le dragage du chenal de Seine. C'est l'une des dragues d'Haropa qui permettent, au départ du Havre, une profondeur suffisante du fleuve pour la remontée des navires de haute mer jusqu'à Rouen, via les 120 kilomètres de méandres de la Seine maritime."Une station-service" unique entre Paris et la mer
Les dragues de Seine, comme le Daniel Laval, ont régulièrement besoin d'être révisées, entretenues et réparées. Et c'est au centre de réparation navale de Rouen que ça se passe, avec une cinquantaine de salariés répartis dans les ateliers de menuiserie, mécanique, chaudronnerie, électricité, tuyauterie, peinture…Particularité de ce centre de réparation et d'entretien : il est le seul entre Paris et Le Havre à disposer d'un équipement permettant de mettre complétement à sec la coque d'un bateau. Cet équipement c'est le dock flottant.
Dock flottant... et plongeant !
A la différence des "formes de radoub" qui sont des bassins maçonnés avec des portes et dont on peut pomper l'eau une fois le bateau entré, attaché et posé sur des cales, le dock flottant est une sorte de grand et haut bateau en forme de U, à deux coques, qui comme un sous-marin, est équipé de pompes et de ballasts pour plonger et remonter sur commande.C'est ainsi qu'une fois en immersion, la coque en U du dock peut accueillir un bateau. Une fois celui-ci rentré et amarré on fait remonter le U et le bateau se retrouve à sec, accessible (même sous sa coque) pour des inspections, des réparations d'urgence ou des travaux d'entretien.
"Héritage" de la guerre de 1914-1918 !
Au début du XXe siècle, les gestionnaires du port de Rouen étudièrent le projet de construction d'une (coûteuse) forme de radoub.C'est juste après la guerre de 14-18 qu'une solution fut trouvée. Le port de Rouen se porta candidat pour "récupérer" quatre docks flottants de fabrication allemande. Ces équipements portuaires furent cédés à la France par les Allemands au titre des dommages de guerre et furent acheminés jusqu'aux chantiers navals de Petit Couronne.
Sur les quatre, le plus volumineux, livré en 1927, fut agrandi en 1932 et continua de servir aux Chantiers de Normandie. Puis, et alors que les trois autres furent démolis, il a été installé en 1989 dans le bassin Saint-Gervais de Rouen.
Une technologie vieille d'un siècle
Le dock flottant du port de Rouen est une antiquité qui fonctionne toujours et qui continue de remplir (avec de plus en plus de difficultés) sa mission. Avec ses 150 mètres de long et plus de 25 de large, il peut accueillir des bateaux faisant jusqu'à 10.000 tonnes et 7 mètres de tirant d'eau. Il est équipé de deux grues mobiles de 10 et 15 tonnes.Un des derniers gros chantiers sur ce dock flottant a duré 8 semaines, 6 jours sur 7, pendant lesquels 30 salariés se sont relayés de 5h à 23h, pour que la drague Daniel Laval puisse repartir au plus vite en mission. Un fin de chantier sous le soleil, le 16 novembre 2020, et sous un rayon de soleil :
Un nouveau dock en 2021
La question du remplacement du dock flottant du port de Rouen, devenu obsolète et très cher en entretien et frais de fonctionnement, se pose depuis des années. Entre le coût de construction d'un équipement neuf et le peu de matériel de ce type disponible en occasion sur le marché, la décision a pris du temps.Finalement, c'est en 2021, avant ses cent ans, que l'actuel et historique dock flottant, prendra sa retraite :
Acheté à Abou Dabi aux Emirats Arabes Unis, le nouveau dock flottant sera plus large, plus moderne : il est de 2014, donc il a à peine 6 ans. Il sera mieux équipé en terme de sécurité, de lutte incendie, également pour la récupération des eaux de travail.
Il sera plus conforme avec nos besoins opérationnels."