Plusieurs villes veulent expérimenter cette année des tenues uniformes pour les élèves d'écoles publiques. Des décisions politiques promettant moins d'inégalités, de harcèlement et de désordre dans les écoles malgré l'absence de loi, le coût des trousseaux et les opinions divergentes des parents.
63% des Français se disent favorables au "retour de l'uniforme à l'école" (sondage IFOP-2017). Les esprits malicieux remarqueront que les 18-24 ans sont les moins nombreux (40%) à être pour et les 65 ans et plus les plus nombreux à apprécier cette idée (74%).
L'expression galvaudée de "retour de l'uniforme" est en fait inexacte concernant les écoles publiques. Le musée national de l'éducation de Rouen a exploré ce sujet pour son exposition "s'habiller pour l'école". (Jusqu'au 31 mars 2024)
Contrairement aux idées reçues, l'uniforme n'est pas une tradition française qui aurait été abandonnée récemment.
La France a été en fait peu concernée par le port de l'uniforme et cela ne concernait que les élèves garçons internes au lycée de 1802 à l'entre-deux-guerres. Pour des raisons de coût, on l'a abandonné car cela pesait beaucoup pour les familles.
Eléonore Belin, chargée des expositions temporaires au "musée national de l'éducation"
Ne pas confondre blouse et uniforme
La blouse portée toute la journée en maternelle et à l'école primaire a effectivement été abandonnée dans les années 70.
Il ne faut cependant pas confondre l'uniforme et la blouse ajoute Eléonore Belin "ce que les enfants ont tous porté c'est la blouse mais elle n'a jamais été un uniforme elle protégeait des tâches des poussières de craies".
On en fabriquait par exemple dans les usines textiles Boussac, marque qui comptait plusieurs usines en Normandie, notamment dans la vallée du Commerce près du Havre.
À Troyes, Perpignan et Béziers, les maires ont décidé d'expérimenter une tenue uniforme pour les élèves d'écoles primaires publiques.
Le ministre de l'éducation est favorable à ces tests. Il a aussi déclaré sur France Inter que cette tenue n'était pas une "solution miracle".
De son côté, la secrétaire du syndicat SNES-FSU de Normandie estime que l'uniforme ne mettrait pas fin aux inégalités et n'a pas de lien avec la qualité de l'ambiance dans les établissements.
Je crois vraiment que la tenue des élèves n'influe pas sur l'ambiance scolaire. Qu'ils soient en jean, jogging ou en veste cela ne change pas du tout le rapport pédagogique. Je crois qu'un uniforme usé, en mauvais état, stigmatiserait de la même manière qu'un vêtement abîmé, ou qui n'est pas de la première fraîcheur.
Claire-Marie Féret, secrétaire académique SNES-FSU Normandie
L'expérience décevante de Provins pour 700 enfants
En France métropolitaine, la dernière grande expérimentation d'uniforme avait été lancée en 2018 à Provins en Seine-et-Marne pour 700 enfants. Une volonté du maire Les Républicains.
Les parents de six écoles primaires publiques avaient été consultés. 62% s'étaient prononcés pour (presque le même chiffre que celui des personnes favorables du sondage de l'IFOP).
Les trousseaux avec 10 vêtements décorés d'un écusson coûtaient 137 euros aux familles (avec possibilité de gratuité pour les familles démunies).
Il n'y avait aucune obligation dans le règlement intérieur des écoles et aucune loi ne peut d'ailleurs imposer l'uniforme à l'école publique.
En 2020, l'expérience a pris fin. En dépit de leur vote encourageant, les parents et les enfants ont été partagés. La présence d'enfants portant la tenue de la ville et d'enfants sans uniforme a créé l'embarras.
Le maire avait conclu que faute de loi, et de financement public pour le trousseau, le port de l'uniforme était difficile à mettre en œuvre pour un élu..