Le canard à la rouennaise, plus souvent connu sous le nom de « canard au sang » tel qu’il est servi à la Tour d’Argent, est un met connu dans le monde entier, mais un peu moins sur sa terre natale : la Normandie. Découverte.

À l’évocation de ces trois mots « canard au sang », les Rouennais et Rouennaises ne savent pas trop à quelles papilles se vouer. Avec du vin rouge, de la sauce tomate ? Oui pour le vin rouge, mais non pour la tomate. Le canard au sang porte bien son nom puisque pour cette recette, la sauce est élaborée à base de sang de canard.

Un plat d'exception

La recette originale du canard à la rouennaise est attribuée à un certain Père Denise à la fin du XIXe siècle. Quelques décennies plus tard, Michel Guéret, alors jeune commis sur le Félix Faure, paquebot ralliant Le Havre à Rouen, adapte la recette.

Lors d’une croisière, son chef de cuisine lui laisse carte blanche pour le met principal. Il le concocte à sa propre sauce, et le transforme en plat d’exception.

La recette : une démonstration avant la dégustation

Règle d’or : le caneton âgé de huit à 10 semaines cuisiné dans la recette, doit être étouffé et non saigné. « Cela donne ce côté très tendre et fondant à la dégustation », explique Julien Marchal-Guéret, directeur du Café Victor à Rouen, où ce plat est traditionnellement élaboré depuis près de 100 ans. Pas de différence pour l’animal, étourdi au préalable...

Cuit saignant, ses aiguillettes sont levées, puis la carcasse de l'animal est écrasée dans une presse à canard, un imposant ustensile de cuisine aujourd'hui introuvable sur le marché. Cette présentation est considérée comme le clou du spectacle, car cette recette est racontée et réalisée devant le client.

Le canard à la rouennaise se déguste avec les yeux, le nez, les oreilles… Sans oublier la bouche, bien sûr.

À un fond rouennais préparé au préalable, le "maître canardier" ajoute du Cognac flambé, un jus de citron, du beurre et du Porto. Le sang et les sucs essentiels récupérés par la presse viennent lier et terminer cette sauce.

On est venus juste pour la soirée pour goûter le canard !

Frederick Warzee, touriste originaire de Belgique

Certains touristes font la route jusqu'à Rouen, juste pour goûter ce plat traditionnel. Jasmin et Frederick Warzee sont originaires d’Allemagne et de Belgique. Ils sont venus à Rouen, seulement pour pouvoir assister à cette démonstration.

« On est venus juste la soirée pour goûter le canard, je suis passionné de cuisine et j’ai déjà assisté en ligne à la démonstration mais il fallait le voir en vrai », s’enthousiasme le gourmet belge.

De Duclair à Hong-Kong

En Vallée de Seine, quatre restaurants proposent ce met à leur carte toute l’année. Le Café Victor et La Couronne à Rouen, Les Capucines au Petit-Quevilly et Le Parc à Duclair. De 55 à 75 euros par personne, le canard à la rouennaise se commande entre 24h et 72h à l’avance.

Si le monde entier se déplace en Normandie pour le déguster, ce plat traditionnel voyage lui aussi. Le canard au sang a même migré jusqu’en Asie. Lors d’un voyage dans les années 80, Michel Guéret découvre avec surprise le caneton à la rouennaise à la carte d’un restaurant Hong Kongais. Il décide par la suite de créer l’Ordre des Canardiers en 1986 pour défendre et promouvoir ce patrimoine culinaire.

Quarante ans après sa création, l’Ordre des Canardiers compte plus de 2000 membres dans le monde entier, dont 300 maîtres canardiers. Le Japon organise même des concours chaque année pour décrocher la prestigieuse médaille.

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@frenchgastronomy Crée par Henri Denise, le chef de l'Hôtel de la Poste à Duclair, près de Rouen. Il aurait inventé cette recette dans les années 1880. #tiktokfood #restaurant #lesgrandsbuffets #gastronomiefrancaise ♬ son original - FrenchGastronomy

Canard de Duclair, entre tradition et innovation

À l’origine, le canard à la rouennaise était un canard de Duclair. Fruit de l’union de canards sauvages et de canes de basses-cours. Cette race rustique d’exception appartient au patrimoine normand mais peine à faire recette, elle est donc souvent remplacée par des Challans de Vendée. « Ce sont des canards durs à plumer, ça prend plus de temps », explique Christophe Mauduit, chef cuisinier à l’Auberge des ruines à Jumièges.

Adepte de la slow-food et du circuit food, le chef tient beaucoup au canard de Duclair. Tant et si bien qu’il a lancé son propre élevage au printemps 2023 à quelques encablures de son restaurant.

On peut le cuisiner de plusieurs façons, en cuisine, il n’y a pas de limite !

Christophe Mauduit, maître canardier et chef cuisinier, Auberge des ruines à Jumièges

Adoubé maître canardier, Christophe Mauduit ne souhaite plus cuisiner le canard de Duclair à la rouennaise, trop intimidé par la démonstration publique. Mais le chef n’a pas dit son dernier mot. « Il a un goût assez fin par rapport à d’autres canards qui sont gavés et on peut le cuisiner de plusieurs façons, en cuisine, il n’y a pas de limite ! », s’enthousiasme le chef. De la presse à la terrine ou au tartare, le canard de Duclair n’a pas fini de se réinventer…

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