"On ne veut pas subir un AZF ou pire à l'avenir." Trois questions à Sébastien Duval, président de l'association des sinistrés de Lubrizol

Au lendemain de l'anniversaire des cinq ans de l'incendie de l'usine, France 3 Normandie donne la parole à Sébastien Duval. Le président de l'association des sinistrés de Lubrizol (ASL) nous a raconté son combat pour faire reconnaître la culpabilité de l'industriel.

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C'est désormais une tradition pour le collectif unitaire Lubrizol, l'association des victimes de Lubrizol. Chaque 26 septembre, ces militants organisent des rassemblements devant le portail de l'industriel ainsi que sur le parvis du palais de Justice de Rouen.

Une manière de crier leur colère alors qu'un procès se fait toujours attendre cinq ans après les faits, et que, selon eux, Lubrizol reste ainsi dans l'impunité.

Ce jeudi 26 septembre, alors qu'une centaine de personnes manifestaient devant le palais de Justice, France 3 Normandie a rencontré Sébastien Duval, président de l'association des sinistrés de Lubrizol, afin de l'interroger sur ce qui le motive à continuer son combat contre l'industriel.

Pourquoi l'association des sinistrés de Lubrizol continue de se battre 5 ans après l'incendie de Lubrizol ? 

Sébastien Duval, co-président de l'association des sinistrés de Lubrizol : "C'est un sombre anniversaire ce 26 septembre. Mais en fait cette association, elle s'est créée spécialement suite à l'incendie de Lubrizol. C'était d'abord un collectif sur Facebook, qui existe toujours, et qui regroupe toujours 23 000 personnes. C'est une façon d'échanger entre nous des informations.

Et puis ça s'est mué rapidement en association pour porter plainte, pour avoir des éléments dans le dossier et, au final, il y a eu beaucoup de travail et chaque 26 septembre c'est important d'être là parce que c'est aussi le moment du bilan. En cinq ans... Qu'est ce qui s'est passé? Qu'est ce qui a été fait par les responsables politiques, par les responsables de la préfecture et tout simplement où on en est en fait..."

L'interview de Sébastien Duval est disponible dans la vidéo suivante : 

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Sébastien Duval, président de l'association des sinistrés de Lubrizol, était présent à la manifestation devant le Palais de Justice de Rouen ce jeudi 26 septembre. A notre micro, il explique pourquoi le combat continue pour les associations. ©Didier Meunier

Est-ce que vous avez espoir qu'un jour les associations de victimes aient gain de cause et que l'industriel soit condamné ?

"Faut être lucide. L'indemnisation elle sera très compliquée puisque dans la loi, elle ne mène pas loin en termes de montants." 

À ce jour, très peu de personnes ont été indemnisées. Ironiquement, les associations de victimes ont d'ailleurs récemment lancé une "cagnotte".

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Reportage sur l'attente d'indemnisations de la part des victimes de l'incendie de Lubrizol. Karima Saïdi et Didier Meunier. ©France 3 Normandie

"C'est assez scandaleux ce volet judiciaire parce qu'en réalité, entretemps, une autre usine du même groupe a eu le temps de brûler à Rockton aux États-Unis. Et les victimes, y compris les victimes civiles, ont déjà été indemnisées là-bas alors qu'ici la jutice a du mal à avancer, a du mal à avoir les moyens de mener des investigations.

L'industriel fait appel à tous les recours juridiques possibles pour laisser traîner. Sachant bien, on n’est pas dupes, qu'il encourt une peine assez faible, puisqu’en tout état de cause, ça sera 15 000 euros au mieux pour le préjudice environnemental."

Pourquoi, selon vous, est-ce malgré tout important que Lubrizol soit condamné ?

"Ne serait-ce que pour le symbole ! Si c'était un individu qui avait un casier long comme le bras, on se dirait 'c'est un voyou'. Eh bien l'industriel, lui, fait toujours en sorte de laisser traîner les choses pour ne pas avoir ce casier long comme le bras. Pourtant, chez Lubrizol, il y avait déjà eu en 2013 une fuite de mercaptan (un gaz nauséabond qui sert à identifier les fuites, toxique à hautes concentrations par inhalation et qui affecte le système nerveux central en provoquant des maux de tête, des nausées et une irritation du système respiratoire, Ndlr) qui avait atteint jusqu'à Londres.

À l’époque, ils avaient été condamnés à 4000 euros. C'est une blague, c'est même pas le budget de leurs machines à café. S'ils avaient été condamnés à une vraie peine à l'époque, peut-être que l'incendie d'il y a cinq ans ne serait pas survenu. C'est ça aussi qu'on cherche. On ne veut pas subir un AZF ou pire, ici ou ailleurs, à l'avenir. Et pour ça il faut que la peur du gendarme elle soit présente aussi bien pour un industriel, que pour vous et moi."

Dans cette enquête, 1 000 particuliers, qui se considèrent comme victimes de l'incendie, se sont constitués parties civiles. Aucune date de procès n'a, à ce jour, été communiquée.

Maître Julia Massardier est l'avocate d'une centaine de ces plaignants. Ce jeudi 26 septembre, elle était l'invitée de France 3 Normandie. 

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Julia Massardier, avocate d'une centaine de parties civiles dans l'enquête sur l'incendie de Lubrizol, explique où en est le dossier. ©France 3 Normandie

Pour rappel, Lubrizol a été mis en examen en février 2020 pour "déversement de substances nuisibles" et "exploitation non conforme d'une installation classée Seveso seuil haut".

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