Avec des repas à un euro proposés aux étudiants précaires, les restaurants universitaires rouennais font le plein, affichant même des records historiques de fréquentation. Rencontre avec des étudiants qui tentent d'étudier ...et de subsister.
L'inflation pèse aussi sur le budget des étudiants. A Rouen comme sur la plupart des campus universitaires, la précarité est en hausse. Un constat partagé par l'ensemble des associations étudiantes, mais aussi par le Crous Normandie qui gère les restaurants universitaires. Sur le plateau de Mont-Saint-Aignan (76), le restau U du Panorama est particulièrement fréquenté, surtout depuis la mise en place en septembre 2021 du repas à 1 euro pour les étudiants précaires. Ce tarif est accordé automatiquement aux étudiants boursiers, mais aussi à tous ceux qui ont des difficultés à se nourrir. Le Crous, qui fait face à un augmentation de 15% des demandes depuis la rentrée, étudie la situation sociale de l'étudiant sur la base d'une évaluation de ses revenus.
Chaque midi un millier d'étudiants se pressent au Panorama. Le menu est à 3,30 euros pour tout un chacun, et 1 euro donc pour les plus précaires. "La vie a augmenté, alors avoir des repas à un euro pour déjeuner le midi, pour moi c'est bien" explique Cléa, jeune fille blonde et souriante. "J'y viens presque tous les jours, c'est quand même un bel avantage" renchérit Simon.
Manger ici tous les midis, à la fin de la semaine ça fait 5 euros, c'est moins cher que de faire des courses au supermarché
Simon, étudiant sur le campus de Mont-Saint-Aignan (76)
Ce repas à 1 euro est une bénédiction pour les étudiants, pourtant trop peu d'entre eux connaissent cette possibilité. Ce que déplore Marc Echevin, le directeur du restaurant universitaire et de l'hébergement du Panorama. "Il faut déjà faire la demande, et certains ne connaissent pas cette possibilité, ou n'osent pas faire la demande".
Agoraé, l'épicerie solidaire
L'état a aussi mobilisé en novembre dernier une aide alimentaire de 10 millions d'euros à destination des étudiants précaires, soit l'équivalent d'au moins 300 000 colis permettant à un étudiant de se nourrir pendant une semaine. Cette aide vient en complément de ces repas à 1 euro instaurés depuis la crise sanitaire par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle s'ajoute à d'autres mesures gouvernementales : la hausse de 4% des bourses sur critères sociaux à la rentrée 2022, la revalorisation des APL de 3,5%, le gel des loyers dans les résidences universitaires, ainsi que le versement d'une aide exceptionnelle de 100 euros à plus d'1,5 million d'étudiants.
Cette enveloppe d'urgence doit aussi aider les associations qui œuvrent contre la précarité étudiante à structurer leurs réseaux de distribution. A Rouen, les étudiants connaissent bien maintenant l'association Agoraé installée en avril dernier sur le campus de Mont-Saint Aignan. On trouve ici des produits d'hygiène et alimentaires moins chers que dans un commerce classique. "Un paquet de pâtes qui va valoir 1 euro dans les grandes surfaces coûte 10 centimes ici. Et pour les produits non essentiels ou de "plaisir", ils vont être à 20% du prix du marché" indique Justine Gremant, présidente de l'association Agoraé de Rouen. La fréquentation de l'épicerie est aussi en hausse cette année.
Agoraé a déjà instruit 250 dossiers de possibles bénéficiaires sur le campus de Mont-Saint-Aignan, mais seuls 120 répondent à leurs critères : disposer d'un reste à vivre par jour compris entre 1,20 euro et 7,60 euros. Or de plus en plus d'étudiants sont en dessous d'1,20 et d'autres structures d'aide doivent être mobilisées.