Témoignage. "Il fallait que je trouve comment vivre" : Déborah Costes, étudiante devenue travailleuse du sexe

Publié le Écrit par Amandine Pointel et Medhi Weber
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Dans son livre "Reprendre Corps", Déborah Costes, habitante du Havre, livre un témoignage sans filtre sur son parcours marqué par la précarité, la maladie et son entrée dans le travail du sexe. Elle y mêle introspection personnelle et critique sociale, avec une volonté affichée de briser le tabou autour de ces métiers.

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Déborah Costes, habitante du Havre (Seine-Maritime) a publié son premier livre. Dans son ouvrage "Reprendre corps", elle retrace un parcours atypique, bouleversé dès l'adolescence par des soucis de santé. "Ça a commencé à partir du moment où j'ai eu des maladies chroniques à l'âge de 15 ans. Des maladies invisibles qui ont longtemps été niées par le corps médical, par ma famille, suivi d'une grande précarité."

Étudiante boursière, elle se heurte à des difficultés financières. "J'étais boursière pendant mes études, mais ça ne suffisait pas à couvrir mes frais de santé en plus de mes études. Je n'avais pas d'aide de mes parents." Contrainte d’abandonner ses études, elle se retrouve sans revenus avant ses 25 ans.

"Je me suis retrouvée sans aucun revenu. Il fallait absolument que je trouve comment vivre." C’est ainsi qu’elle commence à travailler comme camgirl : "C'est-à-dire travailleuse du sexe via caméras interposées, ce qui me permettait d'ajuster mes horaires, de le faire chez moi quand je pouvais." Elle devient ensuite escorte, puis prostituée.

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TÉMOIGNAGE. Déborah Costes, étudiante devenue travailleuse du sexe : "Il fallait que je trouve comment vivre" ©France Télévisions

"Une hypocrisie et un silence autour de ce travail"

Déborah Costes raconte dans son livre la réalité du travail du sexe, loin des stéréotypes et des jugements. "La première chose que j'ai compris à travers ce travail-là, c'est qu'on est énormément de travailleuses du sexe, de prostituées, tous les noms que l'on peut donner pour ce métier-là... et que les clients sont tout aussi nombreux, voire encore plus nombreux."

La jeune femme dénonce le tabou persistant entourant ce métier. "Il y a toute une hypocrisie et un silence autour de ce travail, alors qu'il est partout, dans tous les milieux." Elle pointe également les capacités d'entrepreneuses des travailleuses du sexe : 

On gère des entreprises seules, on doit se débrouiller seules, il n'y a pas d'école pour ça... On est marginalisées, réduites au silence.

Déborah Costes, travailleuse du sexe et autrice

 "Je voulais dire qu'on est là, qu'on existe et qu'on se débrouille seules, mais qu'on y arrive quand même."

Un récit sans filtre 

Dans son livre, Déborah Costes adopte un ton cru, parfois trash. Un choix assumé pour retranscrire fidèlement son expérience. "Quand j'ai commencé à écrire ce livre, c'était pour sortir du silence, étant donné que j'ai menti. J'étais dans le tabou pendant des années sur ce travail-là. Les mots sont sortis comme ça, de manière naturelle. Quand ça a eu vocation à devenir un livre, je voulais être au plus proche de la réalité, la raconter telle qu'elle est."

"Ces lois nous mettent en danger"

Déborah Costes ne mâche pas ses mots concernant la loi de 2016 censée protéger les prostituées. Selon elle, elle produit l’effet inverse : "Il a été démontré et dénoncé par les syndicats des travailleurs du sexe que les violences ont augmenté, que cette loi marginalise encore plus et met encore plus en danger les prostituées qui doivent encore plus se cacher."

Elle critique notamment les dispositions relatives au proxénétisme : "La loi sur le proxénétisme est hyper délétère pour les travailleuses du sexe. N'importe qui peut être considéré comme notre proxénète : la personne qui nous loue un appartement peut refuser ou nous virer... À partir du moment où on partage n'importe quel gain de travailleur du sexe, on est considéré comme proxénète."

À travers "Reprendre Corps", Déborah Costes espère provoquer une réflexion et ouvrir le débat sur une réalité qu’elle juge omniprésente, mais trop souvent réduite au silence.

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