Testée à Rouen, la nouvelle rémunération des livreurs Uber Eats fait déjà polémique

Mise en place de façon expérimentale depuis le 10 octobre à Rouen, Lille et Valence, le nouveau système de tarification Uber Eats était censé rémunérer plus justement les livreurs en fonction du temps total réalisé pour une course. Dans les faits, c'est plus compliqué que cela. Explications.

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« Le calcul du prix d’une course prend désormais en compte le temps de livraison (que ce soit le temps d’attente au restaurant, pour se rendre à celui-ci ou l’attente chez le client par exemple) ce qui assure d’avoir une rémunération plus juste pour les livreurs ». Voilà la promesse faite par la multinationale américaine, leader des applications de livraison de repas à domicile. 

Sur le papier, c'est une victoire pour les livreurs Uber Eats, qui doivent parfois attendre de longues minutes à l'entrée du restaurant ou à la porte du client. Désormais, ce temps est inclus dans la rémunération de la course. 

Une course rémunérée 15% de moins? 

En réalité, nous sommes allés interroger des livreurs rouennais sur cette nouvelle grille tarifaire. Et ils sont nombreux à évoquer, au contraire, une baisse globale de son salaire. Rencontré près de la rue du Gros-Horloge, où des centaines de vélos aux couleurs des plateformes de livraison se croisent chaque jour, un livreur (qui souhaite rester anonyme) évoque une diminution d'environ 15% de la rémunération d'une course. Il doit donc compenser en pédalant plus vite pour faire plus de livraisons et gagner correctement sa vie. 

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Un livreur Uber parle de sa rémunération en baisse avec la nouvelle grille tarifaire de la plateforme. ©Olivier Flavien

À l'échelle des trois villes d'expérimentation (Rouen, Lille et Valence), c'est aussi le constat que dresse le syndicat Union-Indépendant. Selon leur calcul, avec ce nouveau système de tarification, les travailleurs du géant américain de la livraison de repas gagnent en moyenne "10% à 40% en moins". 

Tarification à la course = problème de sécurité routière? 

Souvent synonyme de précarisation pour ces livreurs, c'est en réalité toute la logique de forfaitisation (paiement à la course) qu'il faudrait revoir selon Gérald Le Corre, du syndicat CGT 76 qui soutient la cause des travailleurs Uber Eats. Notamment parce que cette logique incite les livreurs à adopter une conduite plus dangereuse sur la route. 

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Selon ce syndicaliste CGT 76, la tarification au forfait pose problème en matière de sécurité routière. ©Olivier Flavien

Plus globalement, livreurs et syndicats demandent (depuis longtemps déjà) un changement de statut, d'autoentrepreneurs à salariés. Ce qui permettrait de régulariser les rémunérations des travailleurs Uber Eats (et consorts...) tout en limitant la précarité des conditions d'exercice de ce métier. 

Côté Uber Eats, la direction contredit formellement les chiffres avancés par le syndicat Union-Indépendant en expliquant que "la rémunération moyenne des courses dans les 3 villes où le changement de rémunération a déjà été lancé est restée stable avec une augmentation moyenne du revenu par course de 1,4%". Avec des résultats si différents, reste à savoir quelle a été la méthode de calcul pour les deux partis qui s'opposent sur l'affaire...

Une grève nationale prévue ce week-end

Le géant américain ajoute par ailleurs que "le revenu minimum horaire de 11,75€ issu de l’accord sectoriel signé entre les plateformes de livraison et les organisations syndicales le 20 avril 2023 a été mis en place en octobre 2023 pour tous les coursiers utilisant l’application". 

Après Rouen, Lille et Valence, ce nouveau système de rémunération des livraisons doit être appliqué à toute la France dans les prochains jours. Pour exprimer leur désaccord, la CGT et les travailleurs Uber Eats appellent à la grève tout le week-end. Les quelques livreurs rouennais que nous avons interrogés ce vendredi seront tous grévistes ce week-end. 

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