C'est un défrichement qui suscite l'émoi des riverains. Près de Rouen, des arbres sont coupés à l'aide de bulldozers, de quoi gâcher le paysage apprécié sur le coteau de Belbeuf. Mais ces travaux se font pourtant au nom de la biodiversité. Explications.
Depuis octobre 2023, les bulldozers se sont invités sur le coteau de Saint-Adrien à Belbeuf (Seine-Maritime) pour couper les arbres sur cinq hectares de terrain. De quoi gâcher les promenades des habitués, attachés à la quiétude de ce coteau. Une poignée d'entre eux se mobilise pour dénoncer ce défrichement "brutal" qui remet, selon eux, en cause la richesse des lieux.
"Regardez, l'arbre a été tronqué par les machines ..., s'émeut une promeneuse naturaliste, Myriam Jouanny. Ici, la biodiversité est riche, il y avait des vieux cormiers, beaucoup de faune, de flore, complètement détruit…"
Au nom de la .... violette
Ce coteau est la propriété du Conservatoire des Espaces naturels de Normandie.
Les cinq hectares sont défrichés pour laisser la place à une pelouse. Celle-ci sera bénéfique pour la violette de Rouen, une espèce qui pousse uniquement en milieu calcaire et qui disparaît quand son territoire se dégrade.
Cette espèce endémique, limitée à un espace géographique, est unique au monde. "La célébrité de la Pensée de Rouen tient à sa rareté : on ne la trouve que sur les coteaux calcaires de Saint-Adrien, de Romilly-sur-Andelle et peut-être, selon certains, d'Orival", nous rappelle le bulletin municipal de Belbeuf.
Loïc Boulard, référent de site scientifique pour le Conservatoire d'espaces naturels, précise l'intérêt de ce défrichement. "L'inaction conduit actuellement à une perte énorme de biodiversité".
Sur une pelouse, on peut avoir jusqu'à 40 espèces différentes alors que sur un fourré ligneux, on aura entre cinq et dix espèces. Celles-ci ne seront pas éliminées, mais on aura d'autres espèces rares, voire exceptionnelle.
Loïc BoulardConservatoire d'espaces naturels Normandie.
Ce référent ajoute que le défrichement de ce coteau est en projet depuis plusieurs décennies, il va permettre de sécuriser les sentiers, les lignes téléphoniques.
"C'est disproportionné et la méthode est très brutale"
Le Conservatoire d'espaces naturels reconnaît que le défrichement se fait de manière mécanique, puisque cela est plus rapide et moins cher. Une méthode "brutale" pour les riverains qui se sont exprimés à ce sujet.
"Je suis écœuré, qu'on détruise tout pour cinq hectares pour la violette de Rouen, c'est disproportionné et la méthode est très brutale." témoigne l'un d'entre eux.
À l'avenir, un éleveur local va s'installer sur ce coteau.