Val-de-Reuil : les surveillants pénitentiaires opposés aux téléphones dans les cellules

Évoquée par la Garde des Sceaux, l'utilisation de téléphones portables dans les cellules a rencontré l'opposition de nombreux surveillants pénitentiaires. Notamment à Val-de-Reuil (Eure), où se trouve l'un des plus grands centres pénitentiaire d'Europe.

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L'évocation de l'utilisation de téléphones portables dans les cellules des détenus par la garde des Sceaux Nicole Belloubet - une mesure depuis démentie par le ministère - a provoqué des réactions hostiles parmis les syndicats des surveillants et de l'administration pénitentiaire.

Une mesure "ni raisonnée ni raisonnable" pour l'UFAP UNSA Justice et son délégué à Val-de-Reuil, Emilien Kerleau. "Les détenus veulent des smartphones dernier cri et connectés, quand ils ne les utilisent pas pour s'afficher sur les réseaux sociaux voire filmer des surveillants, ils s'en servent pour continuer leurs trafics tranquillement ou faire pression sur les victimes", s'indigne pour sa part Nicolas Bihan, secrétaire local de Val-de-Reuil pour le Syndicat Pénitentiaire des Surveillants (SPS).


"Nous sommes des êtres humains. Évidemment que si ça permet à un détenu, par exemple, de dire bonne nuit à ses enfants le soir, pourquoi pas", explique, sous couvert d'anonymat, un surveillant pénitentiaire de la prison de Val-de-Reuil. "Mais au vu de nos moyens, c'est infaisable. C'est une utopie totale".

En 2016, 33 520 mobiles et accessoires ont été saisis dans les cellules des prisons françaises. 19 339 pour le premier semestre 2017. Le téléphone portable est déjà une réalité constatée par de nombreux surveillants pénitentiaire. "Il y a aussi un sentiment d'impunité de la part de détenus", lâche Nicolas Bihan. "Ils savent que les sanctions prévues pour la découverte d'un téléphone portable sont très rarement appliquées".

Peu d'intimité au téléphone

Situés au milieu des coursives ou sur la promenade, les téléphones fixes utilisés aujourd'hui ne permettent pas forcément de longs appels, par ailleurs limités aux heures d'ouvertures des espaces ouverts, dans la journée.

Une liste de numéro (entre 20 et 40) est créée pour chaque détenu et validée par l'administration pénitentiaire. Les appels sont susceptibles d'êtres enregistrés et écoutés, et peuvent être interrompus à tout moment.

"Il est arrivé qu'un détenu en quartier disciplinaire appelle sa femme, qui a alors placé un autre téléphone devant le combiné renvoyant vers un portable illégal à Val-de-Reuil...", témoigne le même surveillant pénitentiaire. "À ce moment là, l'offier d'écoute a coupé la communication". Pour les surveillants pénitentiaire, la multiplication des téléphones rendrait impossible toute surveillance efficace.



Des téléphones "bridés"

Adeline Hazan est elle favorable à ce type de dispositifs depuis plusieurs années. Pour la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, "il ne sert à rien d'empêcher [les détenus] d'avoir un téléphone".

Dans un objectif de réinsertion - meilleure relation avec les familles, démarches administratives et judiciaires facilitées - il serait plus simple selon elle de "brider" des téléphones proposés par l'administration pénitentiaire. La liste de contacts validée serait maintenue, ainsi que le coût des communications.

La Garde des Sceaux Nicole Belloubet a pris dans ce sens l'exemple de la prison de Montmédy (Meuse), dans laquelle 290 détenus disposent d'un téléphone fixe personnel en cellule. 

Certaines écoutes sont effectuées, les saisies de téléphones illégaux auraient diminué de 31 % en une année. Les syndicats de surveillants contestent, dans Le Parisien, cette version des faits : "On découvre toujours autant de téléphones illicites", témoigne un membre du SPS Péninentiaire de Montmédy.

"Qu'on nous laisse d'abord entrer avec nos portables personnels dans la prison", ironise un surveillant de Val-de-Reuil. Pour l'UFAP UNSa Justice, le sujet est secondaire face aux problèmes encontrés par les surveillants au quotidien : "Que Mme HAZAN commence par le début, en dénonçant la surpopulation pénale, la vétusté de certains établissements, comme celui de Basse-Terre en Guadeloupe, la violence dans nos murs et souvent à l’encontre des Personnels..."
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