La pièce de théâtre écrite et mise en scène par la policière Sonya Aya pour avancer ensemble contre les violences conjugales est jouée mardi 8 mars à l’Ecole Nationale de Police de Rouen-Oissel devant des policiers, des magistrats et des membres d’associations.

Alors toute jeune policière, Sonya Aya se retrouve au cours d’une intervention dans le XIXème arrondissement de Paris qui va changer sa vie. Interpellée dans la rue pour venir en aide à une femme agressée au couteau par son compagnon, Sonya est frappée par l’intensité du regard de la victime à qui elle sert la main en attendant les secours. Dix minutes d’attente qui lui semblent alors une éternité.

Son sentiment d’impuissance et d’incompréhension ne la quittera plus. Elle décide alors de se consacrer à la problématique des violences conjugales en créant un outil pédagogique et de prévention : une œuvre théâtrale. Dans un premier temps, cet outil serait destiné à ses collègues pour leur permettre d’avoir un regard juste et bienveillant sur les victimes à l’issue de la représentation. Un outil pour comprendre la complexité du fléau des violences conjugales et pourquoi il n’est pas si simple pour une victime de quitter son bourreau.

15 ans de travail

Très vite, Sonya Aya se forme dans le cadre de son métier comme « référente violences intrafamiliales » pour comprendre la psychologie des femmes victimes, le cercle vicieux de la violence.

En 2005, l’autrice écrit la pièce en une semaine mais la parachève pendant quinze ans. Il y a l’expérience professionnelle bien sûr, mais aussi et surtout des centaines de journées de travail sur son temps libre consacrées à cette cause. Elle multiplie les rencontres avec les associations, des psychologues, psychotraumatologues, des spécialistes de la prévention et tente de comprendre pourquoi ces individus - souvent des femmes - restent aux côtés de la personne qui les maltraite. Pourquoi acceptent-elles la première injure, la première gifle ? Pourquoi déposer plainte pour ensuite retirer cette plainte ?

Toutes ces questions, la gardienne de la paix depuis vingt ans affectée à la Direction centrale de la sécurité publique (DCSP) y répond avec Je me porte bien ! traduit par la voix et les gestes de la comédienne Caroline Misbach, seule en scène.

C’est l’histoire de Rose, 22 ans, pleine de vie et amoureuse d’Alexandre, un homme violent. C'est l'histoire d'une descente aux enfers. La jeune femme explique son incapacité à se séparer de son prince « charmant » et comment trouver les ressources pour s’en sortir.

La pièce est rôdée pendant deux ans au théâtre de l’Echo à Paris ainsi qu’au festival Off d’Avignon en 2019.

« C’est la magie du théâtre, il se passe quelque chose, je le vois dans le regard des collègues, ça les marque »

Sonya Aya, autrice et metteure en scène "Je me porte bien !"

Avancer ensemble

La mise en scène se veut minimaliste pour que la pièce puisse être jouée partout et vue par le plus grand nombre. Sa philosophie : « travailler tous ensemble, magistrats, associations, policiers, pour faire avancer les choses », confie l’autrice.

Après chaque représentation, des échanges avec des spécialistes : magistrats, policiers, psychologues, médecins, délégués aux droits des femmes. Et des réactions qui s’impriment : « Quand une jeune femme vous dit : "Merci j’ai compris plein de choses et je serai hyper vigilante dans mes rencontres futures", c’est cadeau », s’enthousiasme la metteure en scène.

Mardi 8 mars 2022 la pièce sera jouée à l’Ecole Nationale de Police de Rouen-Oissel devant 417 personnes dont 80% de policiers en formation. La pièce n’est pas intégrée au cursus de formation des agents de police mais c’est un plus pour les futurs policiers. « C’est la magie du théâtre, il se passe quelque chose, je le vois dans le regard des collègues, ça les marque », observe Sonya Aya.

D’ici fin mai 2022, 2000 policiers de tous corps auront vu la pièce. Gardien de la paix, officier ou commissaire, en formation initiale, continue ou autre.

Demain dans les lycées ? 

Le prochain objectif de l’artiste policière est de montrer sa pièce aux pompiers et gendarmes et pourquoi pas faire un tour de France des lycées, sachant que la création s’adresse à un public âgé de 16 ans et plus. Sonya Aya projette également de présenter sa création à des personnes condamnées pour violences, par exemple dans le cadre du SPIP (Service pénitentiaire d’insertion et de probation) qui a pour mission principale la prévention de la récidive.

Enfin, une deuxième pièce est en cours d’écriture, consacrée à l'impact des violences sur les enfants.

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