Elles s’appelaient Johanna, Audrey, Babeth et font partie de la longue liste des femmes tuées depuis le 1er janvier sous les coups de leur conjoint, à quelques jours des conclusions du grenelle sur les violences conjugales, comment combattre un fléau qui touche des milliers de couple ?
Une femme meurt tous les 2 jours en France, victime de son conjoint, c’est ainsi qu’à la mi novembre, on recense 134 victimes dont 5 en Normandie, un bilan qui cache parfois en amont des années de souffrances selon le professeur Gilles Tournel, médecin au Chu de Rouen et responsable du CASA (Centre d’Accueil Spécialisé des Agressions).
Ci-dessous la carte des féminicides en France en 2019 établie par le Collectif de Recensement des Féminicides Conjugaux en FranceLe dépistage de violence, c’est très difficile, vous pouvez avoir quelqu’un qui va vous alerter au bout de 2 jours mais on a vu un cas où cela a demandé 43 ans avant que la victime fasse un signalement.
Pr Gilles Tournel, médecin au Chu de Rouen
Comment libérer la parole des victimes ?
220 000, c’est le nombre chaque année de femmes victimes d’agressions physiques et sexuelles par leurs compagnons.Un numéro d’urgence, le 39 19 est accessible 24H sur 24 et 7 jours sur 7 mais cet appel au secours reste toujours difficile de peur des représailles de la part du concubin violent.
Le 16 septembre dernier, Johanna , une mère de famille de 27 ans était assassinée en pleine rue au Havre sous les yeux de ses 3 enfants. Johanna avait porté plainte deux fois à cinq ans d’intervalle (2014 et 2019) mais cela n'a pas permis d'éviter le drame, ce que Laura, une de ses amies, regrette. « On est dans l’incompréhension, on se demande comment on a pû en arriver là en plein jour et en pleine rue... Au début, Johanna a subi une pression psychologique et ensuite, elle a reçu des menaces de mort au moment où elle a décidé de s’en aller ». Laura, avec 3 autres Havraises, a décidé de créer une association la « 105ème » en référence à Johanna , 105ème féminicide depuis le début de l’année.
Quelle réponse judiciaire ?
Pour Cyril Lacombe, Procureur de la République de Coutances, un des participants aux groupes de travail dans le cadre du Grenelle sur les violences conjugales, la détection reste un problème « Ce drame du Havre illustre parfaitement toute la difficulté qu’on a dans l’accueil des victimes et dans la prise en compte de l’évaluation du danger, c’est un des objectifs de ce Grenelle, c’est d’être en capacité d’appréhender une situation de danger ».La question d’une réponse urgente est primordiale, elle passe par une mise à l’abri immédiate de la victime mais les foyers sont parfois saturés et il faut 4 à 6 semaines par exemple pour obtenir un rendez-vous au Pavif (pôle d’accueil des violences intra familiales à Rouen) comme le confirme Lucille David une des éducatrices « C’est pas simple de déposer plainte ou de quitter le domicile, c’est un piège qui s’est refermé, elles subissent un isolement familial et amical, il y a un chantage de leur conjoint qui s’éxerce sur elles et sur les enfants dont les vies sont parfois brisées».
► Savoir ce que dit la loi sur les violences au sein du couple
Une victime sur 5 est ...un homme
En 2018, 126 femmes ont été tués par leur compagnon. 47% de ces meurtres ont eu lieu au sein de couples mariés et dans 29% de ces crimes, l’alcool est présent . L’an dernier, 28 hommes ont également été tués par leur compagne ce qui représente une victime sur 5 mais dans 70% des cas, il s’agissait d’une réaction de la femme qui elle-même avait subi des violences.Un Grenelle des violences conjugales : quelles pistes et avec quels moyens ?
Le Gouvernement annoncera le 25 novembre prochain les conclusions du Grenelle sur les violences conjugales lancé le 3 septembre dernier. On en connaît déjà les grandes lignes :- la perquisition des armes à feu dès la 1ère plainte.
- la suspension voire la suppression de l’autorité parentale en cas de meurtre
- la mise en place du bracelet électronique anti-rapprochement (1 000 ont été commandés)
- l’harmonisation des critères de traitement des plaintes (entre police et gendarmerie)
- l’accès au dossier médical par tous les acteurs
L’Etat a fait des violences intra familiales une grande cause nationale mais aura-t-il les moyens de ses ambitions sachant que l’instauration de ces mesures ne devraient intervenir qu’en 2021, ce qui ne devrait pas arrêter les actions parfois spectaculaires des militants contre les féminicides.
Sur le plateau de Dimanche en politique
Comment faire face à ce fléau ? Quelles seront les annonces du gouvernement le 25 novembre prochain à l’issue du Grenelle consacré à ces violences ?Franck Besnier reçoit sur le plateau de « Dimanche en politique » :
Laura Ledamoiselle, association la 105ème et amie de Johanna.
Cyril Lacombe, Procureur de la République de Coutances.
Lucille David, éducatrice spécialisée du PAVIF (Pôle d’Accueil des Violences Intra-Familiales de Rouen)
Gilles Tournel, médecin et responsable du CASA (Centre d’Accueil Spécialisé pour les Agressions)
► Violences conjugales : état d'urgence
Dimanche en politique
à voir également sur France 3 Normandie
dimanche 17 novembre à 11h30
Les numéros à connaître
Le 3919 : un numéro de téléphone dédié aux violences conjugales
Attention, le 3919 n'est pas un numéro d'appel d'urgence. Si votre téléphone est bloqué ou si votre forfait est épuisé, vous ne pourrez pas joindre le 3919.
C'est un numéro d'écoute national et anonyme, géré par la Fédération nationale Solidarité femmes. Il est destiné aux femmes victimes de violences ainsi qu'à leur entourage et aux professionnels de santé. Les interlocuteurs sont des professionnels qui seront à votre écoute et vous orienteront vers des dispositifs locaux d'accompagnement ou de prise en charge.
C'est un numéro gratuit accessible de 9h à 22h du lundi au vendredi et de 9h à 18h le samedi et le dimanche.
Le 0 800 05 95 95 "SOS Viols Femmes Informations"
C’est un numéro d’écoute national et anonyme. Il est accessible et gratuit depuis un poste fixe en métropole et dans les DOM du lundi au vendredi de 10 h à 19 h. Il est destiné aux femmes victimes de viol ou d’agressions sexuelles, à leur entourage, aux professionnels concernés. Vous trouverez écoute, soutien, information, accompagnement, aide pour faire valoir vos droits en justice. Si vous le souhaitez, Viols-Femmes-Informations vous proposera une orientation adaptée vers les dispositifs locaux d’accompagnement et de prise en charge.
Que faire en cas d'urgence ?
Appelez la police ou la gendarmerie avec votre téléphone en composant le 17 ou le 112.
Le 112 est un numéro valable dans toute l'Union Européenne.
Le 17 et le 112 sont gratuits, opérationnels 24h/24 et 7 jours sur 7.
Appelez le Samu en composant le 15 si vous avez besoin d'une aide médicale en urgence.
L'appel est gratuit et valable 24h/24 et 7 jours sur 7
Envoyez un SMS au 114 si vous avez des difficultés à entendre ou à parler.
Vous communiquerez alors par écrit avec votre correspondant. La conversation par SMS est gratuite et accessible 24h/24 7jrs/7.
Ce numéro ne doit être utilisé qu'en cas d'urgence. En savoir plus sur le 114, numéro d'appel d'urgence pour les sourds et malentendants
Des associations partout en France
De nombreuses associations contre les violences sexistes et sexuelles sont présentes sur tout le territoire.
Pour trouver une association une près de chez vous, consultez le site stop-violences-femmes.gouv en cliquant sur ce lien
Bon à savoir : en cliquant en haut à droite des pages du site vous pouvez effacer les traces de votre passage ou quitter le site en urgence.