En janvier 2018, le passage à 80km/h sur les routes secondaires avait provoqué une importante levée de bouclier dans les trois départements. Deux ans plus tard, les départements peuvent revenir aux 90 km/h. Mais à l’heure du choix, la prudence semble de mise.
Une mesure "inique" selon le président de la Corrèze Pascal Coste, "injuste et pénalisante" selon la présidente de la Creuse Valérie Simonet, un "manque d’écoute" pour le président de la Haute-Vienne Jean-Claude Lebois… Il y a deux ans, lorsque le gouvernement a annoncé sa volonté d’abaisser la vitesse de 90 à 80 km/h sur le réseau secondaire, l’hostilité a été unanime dans les trois départements de la région.
Qu’est-ce qui a changé ?
Aujourd’hui, le gouvernement dit avoir entendu ce mécontentement. Avec la promulgation de la loi sur les mobilités, et il est désormais possible pour les départements de revenir en arrière et d’augmenter la limitation de vitesse.Pour cela, il y a tout de même beaucoup de conditions à remplir : il faut des tronçons de 10 km, sans traversée d’agglomération, sans "tourne à gauche", sans arrêt de transports en commun, et sans engins agricoles.
Les départements doivent aussi financer les nouveaux panneaux, fournir une étude d’accidentologie, et demander l’avis consultatif de la préfecture.
Le Premier ministre Edouard Philippe prévient : "Ce sont des décisions qui sont lourdes et qu'il faut assumer en conscience".
Haute-Vienne : 80 km/h pour garder "l’esprit serein"
Jean-Claude Leblois, président du Conseil départemental de la Haute-Vienne, ne faisait pas partie des opposants les plus vindicatifs de la mesure, dénonçant surtout un manque de concertation, et une nouvelle responsabilité à assumer à la place de l’Etat.Aujourd’hui, dans le département, les 80 km/h resteront la règle. Jean-Claude Leblois explique :
"Je n’ai rien qui me permet de revenir sur les 80km/h ; cela concerne la sécurité routière. C’est compliqué d’avoir l’esprit serein pour aller à l’encontre de cette décision."
Il ajoute que l’Etat "ferait mieux de s’intéresser à la RN 147, un axe très dangereux".
Creuse : 400 km sur 4 400
En Creuse, la présidente du Conseil Départemental Valérie Simonet avait refusé de changer les panneaux de 90 à 80 km/h. Avec d’autres élus du massif central, elle a écrit en février 2018 au président de la République pour dénoncer une mesure "injuste et pénalisante".A l’heure de la décision, le projet de retour à 90 km/h apparaît pourtant moins ambitieux.
Valérie Simonet va demander à la commission départementale de sécurité routière le passage de 80 à 90 Km/h sur seulement de 10 % de son réseau secondaire, soit 400 km sur 4 000. Au cabinet de la présidente, on explique que le chiffre peut paraître faible, mais qu’il correspond à la partie la plus "structurante" du réseau routier.
Corrèze : tout à 90, mais pas seulement
En Corrèze, le président Pascal Coste était particulièrement remonté contre l’abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h. Les conseillers départementaux corréziens avaient même proposé d'expérimenter le maintien de la limitation à 90 km/h.Dans ce département, la volonté du président semble aujourd’hui nette et cohérente : 90 km/h sur tout le réseau départemental.
Mais l’élu ne s’arrête pas là.
23 nouvelles « zones à risque » passeront à 70 km/h. Des panneaux pédagogiques seront rajoutés pour rappeler la réglementation par temps humide (80 km/h). Un plan de prévention sera également mis en place sur les addictions à l’alcool et les stupéfiants, sur la conduite des seniors et des deux-roues.
Enfin, aucune décision définitive ne sera prise avant l’aval de la commission départementale de sécurité routière. Un avis qui n’est pourtant que consultatif.
Quelles conséquences ?
En Limousin, il faudra peut-être s’habituer à changer de vitesse en changeant de département, par exemple sur la D941 entre Sauviat-sur-Vige (87) et Montboucher (23), ou sur la D901 entre Chaufaille (87) et La-Grande-Renaudie (19).Prudence
Partout, la prudence semble de mise.Alors, la baisse de la limitation de vitesse en 2018 n’a-t-elle pas finalement provoqué une remise en cause des habitudes ?
Les élus répondent que la préoccupation était bien antérieure à ce débat. Mais la prise de conscience sur la sécurité routière semble tout de même avoir reçu un coup d’accélérateur.
Pour mémoire, en 2018 en Limousin, il y a eu 652 accidents corporels, 52 d’entre eux étaient mortels.