La Région Nouvelle-Aquitaine, les labels indépendants, les salles de concert travaillent à la mise au point d'un outil qui permettrait d'accueillir le public en garantissant une sécurité sanitaire optimale. Ils attendent le feu vert du gouvernement pour lancer une expérimentation.
Ils sont à bout. Artistes, petits labels indépendants, salariés du secteur culturel local.... "Ca va faire une petite année qu'on est à l'arrêt. Certes, il y a des dispositifs qui permettent de tenir le coup. Mais on arrive à un moment où la situation devient intenable" se désole Mathieu Dassieu, saxophoniste bordelais et fondateur du label Baco Record.
Il explique que de nombreux professionnels se sont lourdement endettés et sont au bord du gouffre, "on doit maintenant absolument retrouver un modèle économique qui fonctionne".
C'est pourquoi il s'est engagé avec d'autres acteurs culturels de la région à chercher des solutions pour sortir de la crise. "C'est très important de repartir, d'avoir des perspectives, de se projeter. On doit pouvoir recommencer à produire de la musique, à investir. Il faut remettre nos artistes au travail. Beaucoup sont en grande détresse psychologique".
Un outil numérique pour des salles sanitairement sûres
La solution, elle est à l'étude en lien avec l'Institut technologique européen des métiers de la musique, l'Itemm, basé au Mans.
L'idée est de mettre au point "un outil scientifique utilisant l'intelligence artificielle" annonce Alain Rousset, le président de la Région Nouvelle-Aquitaine, partie prenante du projet.
Ainsi, "chaque salle pourra mesurer sa ventilation, les hauteurs de plafond, les risques de gouttelette sur une poignée de porte, comment on sécurise l'assainissement de la pièce, chercher tous les détails pour supprimer les risques" détaille t-il. L'outil devra aussi prendre en compte la pertinence économique d'une ouverture en mode dégradé, avec un nombre de spectateurs limité.
Alain Rousset a écrit au Premier ministre et à la ministre de la culture pour leur soumettre le projet. "On veut offrir des pistes pour permettre la réouverture des salles une fois le couvre-feu levé. Mais la mise en place de cet outil ne pourra se faire qu'avec l'aval du gouvernement".
L'idée serait d'expérimenter le modèle dans 12 salles, une dans chaque département de Nouvelle-Aquitaine. Salles de concert, musées, salles de spectacle, cinémas... l'ensemble des lieux culturels pourraient bénéficier de ce dispositif novateur. "Parce qu'on sait qu'on va rester avec ce virus autour de nous, nous devons nous adapter" affirme Alain Rousset.
Une audience sur les radios et télévisions publiques nationales
L'autre piste de réflexion est tournée vers la diffusion. Exposer les artistes des régions, non soutenus par les puissants labels industriels, dans les programmations des radios et télévisions nationales.
"Nous avons demandé la mise en place d'un groupe de travail à ce sujet pour assurer une meilleure présence de nos artistes dans les playlists des chaînes du service public, Radio France et France Télévision" indique Alain Rousset. "Ne peut-on pas mettre de la création provinciale sur France Inter par exemple ? J'ai récemment écouté une émission sur David Bowie, est-ce qu'il faut le passer sur une heure entière ? Ou laisser aussi une place à la création française en ces temps de crise ?" interroge t-il.
Une telle diffusion aurait des répercussions non négligeables sur l'économie culturelle locale.
"Nous n'avons pas accès au spectacle vivant, nous ne pouvons pas faire tourner nos artistes, un de nos derniers leviers ce sont les passages radio et télés dans des émissions nationales" renchérit Mathieu Dassieu. "Ces diffusions ont des conséquences directes sur les ventes d'album, le streaming et les droits générés par chacun des passages".
Les labels indépendants veulent avoir accès aux mêmes niveaux de diffusion que les majors de l'industrie musicale, une source de revenus aujourd'hui indispensable. "Aujourd'hui sans le live on n'a plus rien. C'est ce qui nous faisait vivre. On veut un modèle économique plus équitable et plus juste".
Mathieu Dassieu va jusqu'à espérer la mise en place de quotas qui permettrait d'imposer un minimum de titres d'artistes locaux dans les radios nationales. Pour éviter de voir couler les petits labels les uns après les autres.
L'appel est lancé. La balle est désormais dans le camps du gouvernement.
Les précisions de Nathalie Pinard de Puyjoulon et Jean-Michel Litvine :