Chez Sturia, pionnier français de l'esturgeon d'élevage à Saint-Genis-de-Saintonge (17), les employés sont très affairés à quelques jours des réveillons de fin d'année. Dans un laboratoire immaculé, des hommes en tenue de cosmonaute coiffés de charlottes blanches s'activent dans un froid glacial.
C'est l'heure de la récolte minutieuse des précieux oeufs de caviar. Une main gantée de latex plongée dans les entrailles d'un esturgeon extrait délicatement les gonades d'une femelle arrivée à maturité : une grappe luisante d'ovocytes gris de quelques millimètres de diamètre. Chez Sturia, à Saint-Genis-de-Saintonge, Sébastien est au tamis: "Au début, j'avais une appréhension de casser les oeufs en les écrasant, explique-t-il. En fin de compte, c'est solide et maintenant, j'ai l'habitude!".Cet aliment raffiné coûte particulièrement cher en raison des conditions particulières de sa fabrication. Ce travail d'expert démarre bien avant la récolte des oeufs. Il faut compter entre six et dix ans d'élevage, selon les producteurs d'esturgeon, avant de pouvoir récupérer le premier oeuf sur les femelles. Et à l'arrivée, les ovocytes sont vendus généralement quelque deux euros le gramme au consommateur.
Vieilli en cave
A la fin de l'année, au pic de la récolte, quelque 150 poissons sont abattus chaque matin. Pour quatre qualités de caviar : 0 (beurre de caviar), 1 (caviar gris), 2 (épicerie), 3 (chefs) et 4 (réserve). La France, 4e producteur mondial derrière la Chine, la Russie et l'Italie, a produit en 2016, 30 tonnes de caviar.Après sa mise en boîte, le caviar devra attendre : "ça se travaille comme un fromage, on le vieillit en cave, minimum trois semaines, jusqu'à un an", expliquent les ingénieurs agronomes spécialisés en précisant qu'ils donnent aux esturgeons une nourriture sans OGM, sans antibiotiques et sans farine d'animaux terrestres.
Le business est en plein développement avec une perspective d'augmentation incessante de la production mondiale et de la demande. Certains sont en embuscade pour investir. Des ingénieurs travaillent déjà à la mise au point d'un procédé pour récolter les oeufs sans avoir à tuer leur mère. De nouveaux horizons pour le caviar français.