"C'est vital pour la filière". Les pêcheurs se félicitent de la prolongation de l'aide au carburant, mais restent inquiets pour l'avenir

Annoncée ce 28 novembre par le président de la République lors des assises de l'économie de la mer, la prolongation de l'aide au carburant attribuée aux pêcheurs est une bonne nouvelle pour ceux qui pourront en bénéficier. Mais les sujets d'inquiétude restent nombreux.

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"C'est une bonne chose. C'est vital pour la filière qu'on puisse avoir une continuité de cette aide au gasoil pour continuer à aller pêcher du poisson et le vendre à un prix raisonnable" se réjouit le président du comité local des pêches rochelais, Philippe Micheau.

Une aide de 20 centimes par litre

Les pêcheurs français bénéficieront de la prolongation européenne jusqu'au 30 juin 2024 de l'aide de 20 centimes par litre de carburant, liée à la flambée des prix de l'énergie dans le contexte de la guerre en Ukraine. Emmanuel Macron en a informé les professionnels rassemblés à Nantes ce mardi 28 novembre à l'occasion des assises de l'économie de la mer.

Cette mesure, qui expirait le 31 décembre, s'appliquera jusqu'à un plafond de 335 000 € par entreprise. "Ces 20 centimes seront cumulés avec les aides qu'on a obtenus auprès de plusieurs grands groupes, Total et autres, ce qui fait qu'on aura une aide exceptionnelle que nos pêcheurs n'auront jamais eue", a assuré le président de la République.

Un plafond menaçant

Président du From Sud-Ouest, coopérative qui rassemble 120 navires essentiellement immatriculés en Charente-Maritime, Julien Lamothe précise que ce plafond de 335 000 € prive de nombreuses entreprises de pêche de cette mesure, et fragilise la filière : "Dans notre région, il y a peu d'armements dans ce cas. Mais ces entreprises qui ont plusieurs bateaux ont dépassé le plafond depuis longtemps, elles ne bénéficient plus de ces aides et perdent beaucoup d'argent en ce moment. Et elles sont la colonne vertébrale de la filière. Ce sont elles qui font vivre les criées" explique-t-il.

La Charente-Maritime compte 229 navires de pêche en 2023, dont 80 % sont de petites unités de moins de 12 m. Et trois criées, à la Cotinière, La Rochelle et Royan.

L'essor de l'éolien off shore, une embûche supplémentaire

Le chef de l'État a rappelé le lancement d'ici à l'été prochain d'un "vrai contrat de transformation de la pêche française" et annoncé environ 700 millions d'euros destinés à moderniser une flotte de pêche "vieillissante et polluante".

En théorie, c'est là encore une bonne nouvelle pour les pêcheurs : "Le secteur est en sursis d'extinction avec tout ce qui nous tombe dessus. Sans mesure d'aide, on va à la disparition" continue Philippe Micheau. "On sait bien qu'il va falloir trouver des solutions alternatives au gasoil, mais ce n'est pas nous qui pouvons faire ça".

En pratique, les 700 millions promis devraient provenir des 2,5 milliards d'euros de recettes fiscales espérées "entre 2023 et 2035" du vaste plan de développement de l'éolien en mer annoncé dans le même temps. "On voit ça d'un très très mauvais œil. Entre les aires marines protégées, les zones Natura 2000, les parcs éoliens, les ceci, les cela, notre activité va disparaître. Cette ambition de la France pour l'éolien off shore est beaucoup trop élevée.", déplore le président du comité local des pêches rochelais.

Autre embûche : la législation européenne

Pour Julien Lamothe, inutile de se battre contre des projets de parcs éoliens qui verront le jour quoi qu'il arrive, "l'orientation politique est tellement forte, pour moi ce n'est pas un enjeu."

En revanche, la faille qu'il voit dans l'annonce présidentielle destinée au renouvellement de la flotte, c'est son financement : "La législation européenne interdit tout investissement d'argent public dans les outils de pêche, parce que ce serait contraire à la préservation de la ressource. Donc le principe est très bon, mais il va falloir convaincre la commission européenne et les ONG de pouvoir construire de nouveaux bateaux".

Signe de la fragilité de la filière pêche, l'armement thonier breton Via Océan, basé à Concarneau, qui compte trois navires et emploie 58 salariés, vient d'annoncer une procédure de cessation d'activité.

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