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Pesticides. Sommes-nous accros et comment s'en passer ?

A quel point sommes-nous dépendants des produits phytosanitaires en Nouvelle-Aquitaine ? Quels sont les dangers pour notre santé et pouvons-nous imaginer une agriculture sans pesticides ? « Dimanche en politique » s’installe exceptionnellement en Charente-Maritime pour une émission consacrée aux pesticides.

"On baigne dans un océan de pesticides", le ton est donné par Vincent Bretagnolle, directeur de recherche au CNRS en écologie à Chizé dans les Deux-Sèvres. C'est l'un des invités de ce débat. Il prévient-il en évoquant les études conduites par ses équipes. 

Tout est contaminé(..) On en trouve partout.

Vincent Bretagnolle

Ecologue, directeur de recherche CNRS

On les retrouve dans notre environnement : résidus de pesticides dans l’eau, mais aussi dans l’air, dans nos sols, dans les produits que nous mangeons. 

Depuis plusieurs semaines, tous les forages en eau potable de l’agglomération de La Rochelle en Charente-Maritime, sont fermés, conséquence d'une pollution au chlorothalonil, un pesticide interdit depuis 2020. Guillaume Krabal, maire de Dompierre-sur-Mer et vice-président de l’agglomération de La Rochelle en charge de l’eau potable, justifie cette démarche forte. 

On a détecté cette nouvelle molécule qu'on ne cherchait pas avant.

Guillaume Krabal

maire de Dompierre-sur-Mer et vice-président de l’agglomération de La Rochelle

"Sur tous les captages sous-terrains de l'agglomération de La Rochelle, la norme de qualité était dépassée assez fortement." constate-il. L'eau fournie aux habitants depuis provient donc de l'usine de production du fleuve Charente, jusqu'à nouvel ordre. C'est-à-dire jusqu'à ce que cette molécule soit connue, étudiée et ses effets établis, pour éventuellement mieux la traiter à l'avenir.

Le chlorothalonil, à l'origine de cette pollution dans la plaine d'Aunis, est présent depuis longtemps.

" C'est une pollution diffuse qui dure depuis des années, depuis le début des années 70 et qu'on mettra sûrement des années à pouvoir se départir".

"On découvre les propriétés des molécules 10, 15, 20 ans après qu'elles aient été utilisées. On est toujours un peu en retard sur la protection". L'agglomération de La Rochelle a pourtant pris des précautions en faisant l'acquisition des terrains autour des zones de captage pour limiter les pollutions. 

La qualité de l'eau, de l'air, des aliments que nous mangeons interroge sur notre usage des produits phytosanitaires et les risques pour notre santé. Présent dans ce débat, Olivier Metzinger, viticulteur en Gironde, utilise les molécules chimiques. "Ils sont essentiels à la fabrication des produits agricoles, même si c'est pas la panacée aujourd'hui, on aimerait s'en passer... "

On n'est pas tous morts, on ne tombe pas comme des mouches.

Olivier Metzinger

viticulteur conventionnel en Gironde

Le viticulteur qui cultive en conventionnel regrette qu'il n'y ait pas eu de recherches sur les OGM plus poussées.

Les inconnues des pesticides

Tout un pan de l'utilisation des pesticides et leur conséquences restent un mystère encore pour les scientifiques qui s'accordent sur la dangerosité supposée des effets cocktails. Autrement dit l'utilisation de plusieurs pesticides pour une même culture et les effets provoqués par cette chimie. 

"On ne sait rien des relations qu'il peut y avoir entre deux pesticides, trois ou quatre." appuie Vincent Bretagnolle, directeur de recherche au CNRS en écologie, sur le site de Chizé dans les Deux-Sèvres. 

Il y a donc une augmentation des risques avec utilisation de plusieurs pesticides pour le scientifique.  

A Chizé, l'équipe de Vincent Bretagnolle travaille main dans la main avec des agriculteurs conventionnels. Et le constat est positif. Les agriculteurs sont plutôt dans l'idée de réduire les pesticides pour l'environnement mais aussi par soucis d'économie. 

Il est possible de réduire de 30 à 50 % sans effet significatif sur le rendement. 

Vincent Bretagnolle

écologue

Pour le viticulteur girondin, Olivier Metzinger, le recours au produit phytosanitaire n'est pas fini. "On peut diminuer mais on ne peut pas le supprimer."

Le vrai sujet, c'est d'abord de trouver les solutions avant la transition . La nourriture, c'est quand même important.

Olivier Metzinger

Viticulteur conventionnel en Gironde


Et puis il y a une rupture entre deux mondes selon l'agriculteur. "Il y a une méconnaissance, c'est le grand sujet." Méconnaissance entre deux mondes, rural et urbain, proche du monde agricole ou éloigné. 

Sécurité alimentaire 

Nourrir la population reste la mission de l'agriculture. Parmi les invités, Jean-Baptiste Moreau, ancien député de la majorité présidentielle de la Creuse, consultant aujourd'hui pour un cabinet de lobbying, défend l'utilisation de ces produits. "L'agriculteur n'est pas là pour voir mourrir ses plantes". Mais il reconnait qu'il y a eu un manque de communication en direction du monde agricole, et une insufisance de la mobilisation de la recherche.

Dire qu'on va faire zéro phyto ,c'est pour moi une ânerie dans un contexte où on réduit notre souveraineté alimentaire tous les jours

Jean-Baptise Moreau

Ancien député LREM de la Creuse

"Si un agriculteur peut s'en passer, il s'en passe." selon l'ancien éleveur de la Creuse.

C'est beaucoup plus complexe, selon le scientifique Vincent Bretagnole. Il y a des freins dans le monde agricole. "Travailler avec la nature c'est plus risqué, c'est plus incertiain, il y a des freins, une aversion au risque."

Benoît Biteau, député européen EELV, agriculteur bio en Charente-Maritime, défend le principe de précaution qui devrait selon lui prévaloir avant tout. "On a de plus en plus d'études (..) qui démontrent qu'en réduisant significativement de 50 %, on voit que c'est gagnant-gagnant pour la biodiversité, pour l'agriculteur, et ça n'impacte pas la menace de souveraineté alimentaire, et malgré cela, ça on voit que ça n'avance pas."

On doit entendre les demandes sociétales quand on met autant d'argent sur la table. 

Benoît Buteau

Député européen EELV, agriculteur bio en Charente-Maritime

Pour rappel, le glyphosate vient d’être de nouveau autorisé sur le marché européen jusqu’en 2033. 

Sur France 3

Enjeu économique, sanitaire et politique, notre émission spéciale "Dimanche en Politique" donne la parole à des acteurs de terrain, Diffusion dimanche 3 décembre à 10 h 45 et en replay. 

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