La commune d'Aytré en Charente-Maritime a décidé de procéder à la reprise de 75 tombes parmi les plus anciennes. La procédure se terminera fin 2022 par l'exhumation des corps.
Que se passe t-il dans les cimetières lorsque le temps passe et que les sépultures tombent dans l'oubli ?
A Aytré en Charente-Maritime, la municipalité a engagé une procédure de reprises de 75 concessions perpétuelles.
Dans le cimetière le plus ancien de la commune, de nombreuses tombes délabrées ont été envahies par les herbes folles, des pierres tombales sont fissurées. Certaines datent du 19è siècle mais pour les collectivités, ces vestiges du passé peuvent devenir un véritable casse-tête.
"C'est l'une des plus anciennes", observe l'un des agents de la mairie qui pointe du doigt la gravure de la date du défunt qui remonte à 1886. La sépulture n'est plus entretenue depuis plusieurs décennies.
Des concessions perpétuelles de plus 30 ans
De nombreuses petites pancartes ont été disposées sur les 75 tombes pour avertir les familles.
"Cette concession en état d'abandon fait l'objet d'une procédure de reprise, veuillez vous adresser à la mairie" peut-on lire sur les sépultures les plus anciennes du cimetière.
Pour prévenir les descendants concernés par cette procédure, la municipalité a mis en ligne sur le site de la mairie, la liste des concessions concernées par cette reprise.
Toutes sont des concessions perpétuelles de plus de 30 ans, une condition indispensable pour envisager la reprise.
Un danger pour les visiteurs
"On peut laisser les tombes éternellement mais uniquement celles qui sont en état, aujourd'hui dans ce cimetière, on a des risques d'éboulement, d'effondrement, cela représente un danger pour les visiteurs. L'autre problème qui se pose est celui de la disponibilité des concessions dans nos cimetières, on a besoin de place", avertit Tony Loisel, le maire d'Aytré.
C'est en 2018 que la procédure de reprise des concessions perpétuelles a été enclenchée par la mairie. Cette procédure s’achèvera fin 2022 après plus de trois ans d’instruction et plusieurs étapes légales.
Un petit cercueil stocké dans l'ossuaire du cimetière
Les descendants ont jusqu'au mois de juin pour se signaler et décider de remettre la tombe en état.
Si rien n'est fait, les travaux de démolition des sépultures pourront débuter.
"La partie ossement sera récupérée, elle sera mise dans un tout petit cercueil de 30 centimètres sur 30 centimètres qui sera stocké dans l'ossuaire du cimetière. C'est une grande salle située dans le sous sol, il y a des étagères avec ces boîtes qui sont numérotées et nommées. Tous les ossements des personnes qui étaient dans le cimetière sont inventoriés et répertoriés. Tout est conservé, il y a un registre en mairie et on peut tout retrouver, c'est important qu'il y ait une mémoire", détaille Tony Loisel, le maire d'Aytré.
Des concessions de plus de 30 ans
La démolition des tombes n'est autorisée que pour des concessions de plus de 30 ans.
"Si les tombes ne sont pas entretenues, la collectivité peut reprendre matériellement, physiquement et administrativement l'emplacement. La solution qui s'offre aux ayant-droit, c'est d'entretenir leur sépultures pour bénéficier d'un droit d'inhumation pour d'autres défunts ou pérenniser la tombe sur place", assure Patrick Loizeau, consultant en gestion de cimetières.
La législation vient d'être modifiée, la procédure a été réduite à un an et quatre mois, elle était de trois ans et quatre mois jusqu'au 21 février dernier.
"Les familles auront désormais moins de temps pour s'organiser, si rien n'est fait la mairie peut reprendre l'emplacement et le proposer à une autre famille dès lors que les ossements ont été placés dans l'ossuaire. C'est un phénomène de société, les familles bougent beaucoup, ne sont plus sur les mêmes lieux que les générations précédentes, c'est ce qui peut expliquer l'abandon de certaines tombes", observe Patrick Loizeau, cet ancien conservateur des cimetières de La Rochelle conseille et accompagne désormais les collectivités locales dans leur délicate mission de gestion et législation funéraire.
Dans le cimetière d'Aytré les travaux de démolition débuteront à l'automne. A ce jour une seule famille s'est signalée pour conserver et entretenir la concession perpétuelle de ses ancêtres. "II est encore temps de dire, ne touchez pas à la tombe, on souhaite la garder", avertit Tony Loisel qui estime que la procédure est compliquée mais qu'elle permet de libérer des places dans le cimetière.
Les 3 critères de reprise d’une concession en l’état d’abandon
Pour la reprise administrative de la concession funéraire, la commune doit vérifier qu’elle remplit bien les trois conditions cumulatives suivantes selon l’article L 2223-17 .
- La concession doit dater d’au moins 30 ans (notamment en ce qui concerne les concessions perpétuelles, l’échéance des 30 ans doit être révolue).
- Il est constaté qu’elle est laissée à l’abandon par ses propriétaires.
- La dernière inhumation dans la concession date de plus de 10 ans.
Vous pouvez consulter ici le site du gouvernement pour connaître les modalités de reprise de concessions par les communes.