Championne du monde junior de laser en 2009 et membre de l'équipe de France aux Jeux olympiques de Rio en 2016, Mathilde de Kerangat brise le silence. Après avoir déposé une plainte en 2022, classée sans suite, elle vient de nouveau de porter plainte contre son ancien entraîneur d'athlétisme.
L'arrêt de sa carrière sportive l'an dernier a fait resurgir de terribles souvenirs d'enfance. La skippeuse rochelaise Mathilde de Kerangat dévoile les abus et violences sexuels dont elle a été victime, selon elle, de la part de son ancien entraîneur d'athlétisme, aujourd'hui octogénaire. Au moment des faits, elle se souvient qu'elle avait entre 7 et 11 ans.
"J'avais peur de cet homme"
Le 10 octobre dernier, la navigatrice, aujourd'hui monitrice de voile à La Rochelle Nautique, a publié un post Instagram dans lequel elle évoque ce passé douloureux. Mathilde de Kerangat raconte "des peurs, des angoisses extrêmement présentes et envahissantes qui l'empêchaient de fermer l'œil de la nuit. J'avais peur de cet homme, comme si j'étais une petite fille qui risquait encore de se faire agresser. J'ai fait des cauchemars, j'ai eu des flashbacks et j'ai eu des remontées traumatiques qui se caractérisaient par des ressentis physiques de ce qui m'était arrivé".
Ces souvenirs, qui ont désormais plus de 20 ans, sont pour la plupart flous. Mais selon elle, "ils sont suffisamment présents et au fond de moi, dans mon corps, dans ma chair, que je peux être sûr de faits dont j'ai été victime".
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Mathilde de Kerangat fréquentait, en parallèle de la pratique de la voile, une école d'athlétisme à la fin des années 90 et au début des années 2000. C'est à ce moment-là qu'elle rencontre un entraîneur, âgé d'une soixantaine d'années. Elle reproche à l'homme en question "des fellations forcées et des pénétrations digitales".
Aujourd'hui, l'ancienne navigatrice bénéficie d'un soutien psychologique et psychiatrique. "Quand une personne vit un viol ou une expérience traumatisante, le corps et l'esprit se dissocient d'une certaine manière. Cela va conduire à une forme d'amnésie ou de déni dans lequel on s'enferme pendant des années et des années".
Une parole porteuse d'espoir
La championne du monde junior de laser veut se libérer du mal-être qui la ronge depuis tout ce temps. "Il y a toute cette honte et cette culpabilité qu'on porte en nous depuis des années qui [sont] encore présentes", avoue-t-elle.
En brisant ce fardeau sur les réseaux sociaux, Mathilde de Kerangat explique ressentir un certain soulagement. "Petit à petit, je sens que je me libère de tout ça. Et, le fait d'en parler publiquement participe à cette démarche et ça m'aide à avancer et à me libérer de ses sentiments qui ne devraient jamais exister pour une victime".
"Je me dis que, si mon témoignage peut aussi aider d'autres personnes et contribuer à dénoncer ses agissements, c'est sûr que c'est positif", ajoute-t-elle. L'ancienne skippeuse a lancé une nouvelle procédure, avec constitution de partie civile, pour obtenir une confrontation avec son ancien entraîneur d'athlétisme.
Par ailleurs, ce dernier nie les faits qui lui sont reprochés et toute accusation d'agression sexuelle.
Reportage de Florent Loiseau, Christelle Nicolas et Sandy Renault (le 30/10) :