Témoignage. Davide, 59 ans, raconte sa vie au RSA : "Vous êtes malade, sans argent et on vous demande d'être au top"

Publié le Écrit par Lisa Douard et Tania Gomès
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Alors que le dernier rapport du Secours catholique alerte sur la complexité des démarches administratives qui éloigne les plus pauvres des prestations sociales auxquelles ils ont droit, Davide raconte son quotidien au RSA. Entre angoisse de payer ses factures et pression pour conserver ses aides.

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"Le frigo était bien vide. C'est tout le temps comme ça, à partir du dix du mois", confie Davide Finelli, accroupi dans sa cuisine. Cet habitant de Tulle, en Corrèze, vient de rentrer d'une distribution alimentaire, sans laquelle il aurait du mal à se nourrir. Après quarante ans de carrière en tant qu'intermittent du spectacle, il s'est retrouvé invalide à 49 %. Pas assez pour être reconnu handicapé. Alors, depuis trois ans, Davide ne perçoit que le RSA : 607 euros mensuels.

Dans son appartement où il vit seul avec ses trois chiens, le quotidien est de plus en plus dur. Les factures énergétiques augmentent et l'éducateur canin de 59 ans n'arrive plus à suivre. "Ce mois-ci, j'ai reçu une facture de 180 euros d'électricité. Pourtant, je fais attention la journée et la nuit, alors que j'ai besoin de chauffage avec mon état de santé. Si je la règle maintenant, j'ai zéro sur mon compte", se désole-t-il.

"Une pression constante"

Chaque mois, le même dilemme. Il faut payer les factures et garder un peu d'argent sur le compte en banque pour faire rouler la voiture. Sans essence, il ne peut pas travailler, ni assurer ses rendez-vous avec les services sociaux. Une situation stressante, à laquelle s'ajoute la pression administrative pour conserver ses aides.

"L'épuisement est énorme. En juin, un inspecteur de la Caf est venu chez moi pour une inspection. Après avoir vérifié mes comptes, il m'a indiqué que je devais tout déclarer, y compris les aides financières de mes amis, qu'elles soient de 20 ou 1 500 euros. Sinon, c'est considéré comme une fraude", témoigne le Corrézien.

Quand vous êtes au RSA, il y a un climat de suspicion constant. On vous fait sentir comme un ursurpateur.

Davide Finelli

Bénéficiaire du RSA

Le versement de son revenu de solidarité active (RSA) tient à un dossier à monter à chaque trimestre. Quatre feuilles à compléter à la main pour prouver les démarches effectuées pour le travail, l'avancement des projets… "Si les cases ne sont pas bien remplies, on vous refuse les prochains trois mois. Ça vous met dans une pression constante. Vous êtes malade, vous n'avez pas d'argent et on vous demande d'être au top. C'est fatigant, anxiogène", déplore-t-il.

"Véritable parcours du combattant"

Comme Davide, de plus en plus de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Dans son dernier rapport, publié le 14 novembre, le Secours catholique alerte sur la dégradation du niveau de vie des plus pauvres et la difficulté des démarches administratives. "L'accès aux prestations sociales devient un véritable parcours du combattant. La dématérialisation des démarches, le durcissement des critères d’éligibilité et la complexité des processus d'accès aux droits accentuent l'exclusion", écrit l'association.

Pour les personnes isolées et en difficulté, le parcours administratif pour avoir accès aux aides représente une série d'obstacles. Les services publics perdent leur lien de proximité, les démarches se complexifient. Résultat : les citoyens renoncent aux prestations auxquelles ils ont pourtant droit et besoin.

Sur le terrain, les associations caritatives prennent le relais. Au Secours populaire de Tulle, le nombre de bénéficiaires est en augmentation. "Nous ressentons la montée en puissance de la précarisation des personnes, qu'elles vivent en milieu urbain ou rural. Nous avons beaucoup de familles monoparentales. Mais on constate surtout une arrivée de personnes seules ou de couples sans enfant, qui représentent près de la moitié des personnes aidées", détaille Ayse Tari, secrétaire générale de l'antenne en Corrèze.

Quand on touche 500 euros de RSA, il est difficile de faire face à une facture de 200 euros d'électricité. Souvent, les logements sont énergivores. Cela plombe le budget des ménages.

Ayse Tari

Secrétaire générale au Secours populaire de la Corrèze

 Dans le département, l’association aide plus de 5 300 personnes. L'arrivée de l'hiver est une période cruciale. Certaines familles se retrouvent à devoir choisir entre se nourrir ou dormir au chaud. "Tout le monde peut basculer du jour au lendemain dans la pauvreté. En milieu rural, la pauvreté entraîne des problèmes de mobilité, donc d'accès à l'emploi. C'est l'engrenage et en quelques mois, les gens ne s'en sortent plus", alerte la bénévole.

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