Elle fut une des premières à identifier le loup dans la région et à alerter. Dans quelques semaines, Sophie de Boisgrellier, éleveuse en bio à Ambrugeat en Haute-Corrèze, parlera de son exploitation et du métier de sa vie au passé. Témoignage.
Sophie de Boisgrellier est une femme forte, résistante, à l'image de son territoire, la Haute-Corrèze. Cette éleveuse de brebis, installée en bio, n'a pourtant plus le cœur à l'ouvrage. Le loup, un prédateur qu'elle admire par ailleurs, lui mène la vie dure. Voire impossible. Comme pour d'autres éleveurs, la prédation de ses bêtes est un cauchemar.
C’est un pan de vie qui s’en va. On ne peut plus laisser des animaux dehors, même avec des chiens de protection. Moi, je ne veux pas faire de l’élevage en batterie, ce n'était et ce ne sera jamais mon truc !
Sophie De Boisgrellier, éleveuse de brebis
En 2014, elle fut l'une des premières à alerter sur la présence du loup. Elle était raillée à l'époque. Les années passent et lui donnent toujours plus raison. En 2019, elle perd 386 animaux. 220 l'année suivante. Depuis, elle ne compte plus les cadavres. Ce décompte la hante.
Je n’ai rien contre le loup, je fais partie des gens qui admirent cette bestiole depuis que je suis toute petite. Mais il doit y avoir une régulation.
Sophie De Boisgrellier, éleveuse de brebis
Aujourd'hui, Sophie de Boisgrellier dépose les armes et sa houlette. La mort dans l'âme. Son exploitation sera vendue dans les prochaines semaines. Elle va même quitter son territoire.
À l'évidence, elle ne pouvait plus continuer comme cela. Des nuits blanches, du stress permanent. "Nous ne pouvons pas être en permanence sur la défensive. Ce n'est pas une vie, on est usé prématurément."
Lutter contre les loups déviants
"Un loup qui rentre dans un troupeau, il doit être abattu et on devrait pouvoir le faire, déplore l'éleveuse. Les loups, ils ont tout ce qu’il faut dans la nature. Il faut lutter contre les loups déviants. Ceux qui viennent se servir dans un troupeau, par facilité."
Sa philosophie, c'est - hélas, il faut dire c'était - de voir les brebis pâturer dehors. Cela participe grandement de l'aménagement du territoire. Ne pas protéger les exploitations va fragiliser la terre et la biodiversité. Sophie s'inquiète également de la monoculture, des sols acides à cause de l'omniprésence du pin Douglas, de la disparition des truites dans la petite rivière en bas de chez elle. Et la liste est longue. Autant de combats écologiques à mener. Mais Sophie passe son tour.