GM&S : le fondateur du site de La Souterraine se confie

Pour la première fois, Bernard Godefroy, 77 ans, fondateur du site industriel de La Souterraine, parle de GM&S  devant une caméra. En 1963, il avait créé la SOCOMEC qui a embauché jusqu'à 1200 personnes. La situation actuelle est pour lui un crève-coeur. Il répond aux questions de Louis Roussel. 

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C'est un homme triste et déchiré qui s'exprime devant notre caméra. Un homme de 77 ans qui espère encore tellement pour "ses salariés". En 1963, Bernard Godefroy avait créé la SOCOMEC sur le site actuel de GM&S à La Souterraine, dans la Creuse. Une entreprise qui a embauché jusqu'à 1 200 personnes sur trois sites (La Souterraine, Bessines-sur-Gartempe et au Mans) et jusqu'à la vente de la société en 1991.

Tout commence avec Guy Picoty, de la dynastie des industriels de La Souterraine, qui fait venir en Creuse des entrepreneurs. Bernard Godefroy, 23 ans, débarque alors avec son beau-père, monsieur Devienne et ensemble ils fondent la Socomec qui fabrique des trottinettes.

En 1968, tout va mal, les patinettes se vendent 10 francs pièce... Bernard Godefroy se lance dans la sous-traitance automobile. Ses clients  ?  Les camions Dagard à Boussac, les ascenseurs Otis ou encore Renault Agriculture.

En 1974, en travaillant pour Renault, la Socomec est le 301e sous-traitant. En 1991, il sera le 4e sur les 16 qui restent. Il aura dormi 5 heures par nuit, travaillé 7 jours sur 7, s'est rémunéré à hauteur du salaire de ses cadres, n'aura jamais touché de dividende. Bernard Godefroy a 51 ans. Il vend à l'entreprise SER de Limoges avec le sentiment d'avoir fait son temps.  


Jusqu'à présent, Bernard Godefroy était resté silencieux sur le devenir de GM&S... En retrait, ne confiant que rarement son désarroi. Aujourd'hui, il voudrait pouvoir agir pour aider les ouvriers... et le repreneur. 



Louis Roussel :  GM&S, c'est entreprise que vous avez créée c'était en 1963, avec votre beau-père Monsieur Devienne. À l'époque, elle s'appelait la Socomec à La Souterraine et vous fabriquiez des patinettes. Une entreprise que vous avez développée jusqu'en 1991, puis vous l'avez vendue. Il y avait alors 1200 salariés dans cette entreprise. Quel regard portez-vous sur ce qui se passe aujourd'hui dans cette entreprise ?

Bernard Godefroy : J'ai beaucoup de regrets de voir cette entreprise dépérir par tout ce qui a pu se passer avec les différents repreneurs. Le premier repreneur, le second repreneur qui a essayé de remettre sur rail, ensuite tous les autres, dont on ne connaît même plus les noms mais qui ont fait de cette entreprise une misère. Donc, aujourd'hui,  c'est vraiment la tristesse et le dégoût.
C'est détruit, puisqu'on n'a plus la niaque qu'on a eue pour faire, pour travailler… Je dois remercier tous mes salariés, tous mes gens, qui ont travaillé avec moi et qui se sont donnés complètement à l'entreprise. C'est cela la grosse chose triste de ce moment.

Louis Roussel : Quel regard portez-vous sur ce qui arrive aujourd'hui à ces hommes, ces ouvriers ? Pour certains, c'est vous qui les avez embauchés il y a 25 ans…

Bernard Godefroy : Oui absolument, je vous le confirme, il y en a beaucoup. La moyenne d'âge de Socomec en 80-85 était de 30 ans. Alors faites le calcul. C'est vrai que tous ces gens ont été embauchés par Bernard Godefroy...  et ses services, puisque je n'ai pas embauché tout le monde, il y  avait quand même des gens qui s'occupaient du recrutement !

Ces gens-là, c'est un grand malheur pour eux parce qu'ils n'ont plus rien. Que peuvent-ils espérer  aujourd'hui dans cette entreprise… ?  La reprise ? Il faut espérer qu'elle puisse se faire avec 120 personnes et qu'on puisse avoir un rebond et que ce repreneur, monsieur Martineau, puisse arriver à remettre une activité correcte dans ce site.  Malheureusement,  à 120,  je pense que ça ne tiendra pas,  donc il faut qu'il retrouve de l'activité,  il faut qu'il retrouve des commandes mais ça, ça ne tient qu'à lui. Moi je ne peux pas intervenir. 

Louis Roussel : Vous vivez  aujourd'hui à quelques kilomètres de l'entreprise que vous avez créée. Est-ce qu'il vous arrive de repasser devant ?

Bernard Godefroy : Oui,  je passe de temps en temps, mais ce n'est pas un lieu devant lequel j'aime passer. J'y passe mais c'est dur, parce que dans mon temps, comme on va dire, je rentrais en permanence. Que ce soit le jour ou la nuit, j'y étais en permanence,  je passais, je saluais mes gens et tout allait bien. 

Louis Roussel : Merci beaucoup Bernard Godefroy de vous être exprimé aujourd'hui sur ce dossier GM&S.

Bernard Godefroy : Excusez-moi, mais je ne voulais pas le faire jusque-là. Je ne voulais pas le faire parce que j'ai tellement de respect pour tous ces hommes aujourd'hui. Ce que je voudrais, c'est pouvoir les aider et si je peux aider, je l'ai déjà dit,  mais si je peux aider, je reste à la disposition du repreneur pour voir ou faire quelque chose.
 

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