Vingt ans après le meurtre de deux inspecteurs du travail, la profession redoute un nouveau drame

Il y a 20 ans jour pour jour, un agriculteur tuait deux inspecteurs du travail dans le Bergeracois. Aujourd'hui encore, la profession dénonce des rixes récurrentes. Elle demande que les auteurs des faits soient poursuivis et regrette un sous-effectif chronique.

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Le 2 septembre 2004, deux inspecteurs du travail étaient abattus à Saussignac par Claude Duviau, un agriculteur qu'ils étaient venus contrôler. Les deux victimes, Daniel Buffière et Sylvie Trémouille sont tués à coups de fusil sur l’exploitation, la dernière d’une balle dans le dos. Juste après le double meurtre, l'agriculteur a retourné son fusil contre lui, se blessant grièvement.

Ce fait divers avait causé une vague d’émoi dans toute la France. Originaire de Gironde, Claude Duviau avait acheté un terrain en Dordogne, avant d'être placé en liquidation judiciaire. Lors du procès en mars 2007, il avait échappé à la réclusion criminelle à perpétuité et sera finalement condamné à 30 ans de réclusion criminelle.

Vingt ans après, la colère persiste

Ce 2 septembre 2024, près de 80 inspecteurs du travail se sont réunis à Périgueux à l'appel des organisations syndicales. Une profession réunie vingt ans après le drame pour dénoncer leurs conditions de travail. Le micro passe de mains en mains. "Un simple contrôle qui se transformera en cauchemar, laissant deux familles endeuillées, des milliers d'agents abasourdis et en colère", entend-on.

Puis un représentant lot-et-garonnais prend la parole. Il évoque, encore aujourd'hui,  un climat délétère, des agressions à répétition. "Les courriers écrits au préfet se terminent par l'onomatopée 'tic tac tic tac'...pour dire que cela va exploser. On en est là, dans un contexte très tendu, déclare-t-il.
"Ce sont des délits. On a fait passer le message au procureur qui n'a pas l’air de prendre la mesure de la chose.

"Un service public digne de ce nom"

Matthieu Le Roch est le secrétaire général de l'Union Départementale de la Dordogne CGT. "Il s'agit de la fonction publique d'Etat, donc on est en droit, quand on est usager de la fonction publique, d'avoir un service public digne de ce nom", affirme-t-il.

"Quand on est salarié on bénéficie du code du travail. Et qui permet la bonne application de ce code du travail ?  Ce sont les agents de l'inspection du travail. Ils font à la fois du renseignement juridique aux salariés et interviennent dans les entreprises pour vérifier que les salariés bénéficient de la bonne application du code du travail.

On a, du fait d'un sous-effectif chronique, des zones de non droit qui tendent à augmenter.

Matthieu Le Roch (CGT)

"C'est dans l'intérêt des salariés et des agents eux-mêmes : quand on a un secteur de 10 000 à 12 000 salariés, il est impossible de faire son travail correctement", poursuit le syndicaliste.

"On est passé en dix ans de 2 400 à 2 000 postes au niveau national, et il y a encore 400 postes qui ne sont pas pourvus", poursuit Hervé Petitbon, représentant de l'inspection du travail CGT pour la Dordogne. "Actuellement, un agent doit surveiller, protéger plutôt, 10 000 salariés. Nous, on veut que cela tombe à 5 000". 

"Des contrôles de plus en plus durs"

Ces inspecteurs du travail redoutent qu'un nouveau drame comme celui de Saussignac ne se répète. "Il y a des contrôles qui sont assez durs, assez violents", poursuit Hervé Petitbon. "Donc, nous demandons aux parquets, aux procureurs, qu'ils poursuivent tous les actes délictueux à notre encontre lors d'un contrôle qui se passe mal. Actuellement, ils les classent généralement sans suite. C’est-à-dire qu'il n'y  a aucune poursuite judiciaire lorsqu'on a des rixes avec des employeurs, qu'ils soient du milieu agricole ou autres.

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Il y a 20 ans jour pour jour, un agriculteur tuait deux inspecteurs du travail dans le Bergeracois. Aujourd'hui encore, la profession dénonce des rixes récurrentes. Elle demande que les auteurs des faits soient poursuivis et regrette un sous-effectif chronique. ©FTV

C'est un laisser-aller des pouvoirs publics, qui laissent les agents de contrôle seuls face à des violences, qu'elles soient sur des chantiers ou même des entreprises. Les contrôles sont de plus en plus durs". Hervé Petitbon rappelle que récemment, dans le Lot-et-Garonne, la Coordination Rurale avait éventré et pendu un sanglier devant les locaux de l'inspection du travail à Agen.

"Il faut plus de moyens, de considération et de reconnaissance du travail qu'ils font" résume Frédéric Souillot, secrétaire général FO. "Nous allons saisir nos instances de représentation du personnel au sein du ministère", conclut Hervé Petitbon. Il envisage de faire grève si les revendications ne sont pas entendues.

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