2020 avait été une très bonne saison, 2021 sera une année noire pour les apiculteurs. Selon les secteurs, les pertes dépassent les 50 %. En cause, essentiellement des conditions météorologiques déréglées.

La douceur précoce de 2020 avait permis une récolte de miel abondante. Mais cette année, les apiculteurs ne sont pas à la fête. Sur l'ensemble du territoire français, on observe une baisse de production de 30 à 40 % par rapport à l'an dernier. Situation aussi calamiteuse en Dordogne.

Tournesols et colza stériles ?

On se pose la question : beaucoup d'apiculteurs ont emmené leurs ruches sur des tournesols et on n'a ramassé pratiquement aucun gramme de miel de tournesol cette année ! [...] Il y a 20 ans, on mettait les ruches à côté du tournesol et en 15 jours les ruches étaient pleines ! Cette année, non.

Jean-Pierre Cluzeau, président du Rucher du Périgord

L'une des explications au phénomène, c'est l'utilisation des produits phytosanitaires, mais aussi la culture de nouvelles espèces sélectionnées par les semenciers. Les apiculteurs dénoncent de plus en plus souvent la culture de colzas et tournesols "modifiés" non ou peu mellifères. Or le colza printanier et le tournesol estival offrent une ressource conséquente aux ruches. Le miel que tirent les abeilles du tournesol représente par exemple 6,6% de la production annuelle française, soit plus de 27 700 tonnes.

Météo en dents de scie

Une constante à laquelle se sont surtout ajoutés cette année d'importants bouleversements climatiques. Une météo chaotique qui a bouleversé le fragile équilibre entre climat, floraison et période de travail des abeilles. Sylvain Merveille est apiculteur professionnel à St Crépin de Richemont, dans le Périgord Vert. Apiculteur depuis 10 ans, il avoue que 2021 est la pire année qu'il ait connu. Cette année, il devra puiser dans ses stocks de l'an dernier pour satisfaire la demande, et il ne sait pas si cela suffira. Il ne faudrait surtout pas que le scénario 2021 se reproduise l'année prochaine.

En début de saison les abeilles avaient un petit peu de stock, elles ont commencé la saison très bien, au mois de mars tout allait bien, il y avait de belles colonies, puis ensuite avec la météo elles ont été obligées de ponctionner dans leurs stocks. Donc non seulement il n'y avait pas de nectar qui rentrait, mais en plus elles utilisaient leurs réserves.

Sylvain Merveille, apiculteur à Saint Crépin de Richemont

 

Pas de miel de printemps... peu de miel d'été

Dès le printemps, la vague de gel a mis à mal les floraisons, dans les champs et sur les arbres fruitiers. Un froid qui a immobilisé les abeilles, et ruiné les espoirs de récolte du miel de printemps, et surtout du miel d'acacia. Puis sont venues les pluies abondantes qui ont confiné les butineuses dans la ruche et délavé les fleurs de leur nectar, notamment les chataîgners et les tilleuls. Humidité par ailleurs propice à la propagation de maladies.

Début juillet, les matinées trop fraîches ont encore immobilisé l'activité des ruches. Plus tard, on n'a manqué ni de chaleur, ni de fraîcheur, ni de sécheresse, ni d'humidité, mais elles sont arrivées par vagues. Des pics irréguliers, sans l'équilibre nécessaire au développement des ruches et à la production de miel.

Depuis 20 ans, on n'a jamais vu une telle faiblesse en récolte de miel. D'habitude une ruche doit rapporter 27 kg de miel, actuellement les ruches donnent entre 8 et 12 kg !

Jean-Pierre Cluzeau, président du Rucher du Périgord

Fin de saison

Conséquence pour les 1.500 apiculteurs (soit environ 20 000 ruches) en grande majorité amateurs de Dordogne, une baisse de production de plus de 50% en moyenne, et même une perte de population dans certains cas. Certains apiculteurs ont été contraints de nourrir leurs essaims, ou encore de laisser les faibles réserves de miel dans les ruches afin d'assurer la survie hivernale.

Déséquilibre en cascade

La fin août sonne la fin de la récolte et désormais même une belle arrière-saison ne pourra pas compenser les pertes. Le miel français cet hiver sera plus rare, et donc plus cher, et les rayons des magasins risquent de se garnir encore davantage de miel d’Espagne, d’Ukraine, voire même de Chine ! De quoi déséquilibrer toujours plus la balance commerciale du miel en France où déjà plus de 70% du miel consommé est d'origine étrangère.

Miel bleu blanc rouge

D'où la nécessité de continuer à préférer le miel français, même un peu plus coûteux, afin de soutenir la filière, privilégier les circuits courts et encourager tout un chacun, agriculteurs compris, à s'intéresser au sort des abeilles françaises, véritables baromètres vivants de la bonne santé de notre écosystème. Jean-Pierre Cluzeau se veut optimiste, et affirme que les gens ont vraiment pris conscience que les abeilles étaient importantes pour l'environnement, y compris en acquérant eux-mêmes une ruche. Encore faut-il, ajoute-t-il, qu'elles aient de quoi se nourrir. Le message est passé : plantez des fleurs !

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