Georges Durou, ancien militant communiste bordelais interpellé et interné par le gouvernement de Vichy puis déporté en Allemagne, a rassemblé de précieux documents tout au long de sa vie. Pour que personne n'oublie. Il vient de les donner aux archives départementales de la Gironde.
Ce sont des documents extrêmement précieux qu'a reçu Agnès Vatican, la directrice des Archives de la Gironde.
"Il y a des photos du camp de Mérignac, on n'en avait pas à l'intérieur du camp, où l'on voit ces garçons, jeunes, joueurs, même s'ils sont au plus près de la mort. Certains ont été fusillés". "Nous n'avions que des documents administratifs sur ce camp de Souge" explique t-elle, ravie de pouvoir exposer ces trésors du passé sombre de la région au grand public.
Le généreux donateur, Georges Durou, a aujourd'hui 94 ans. Toute sa vie il a oeuvré pour que personne n'oublie. Très actif dans les associations mémorielles, il a aussi beaucoup témoigné auprès des jeunes dans les établissements scolaires.
Puis, il a fini par écrire un livre, à 88 ans, intitulé "Mes printemps de barbelés" (aux éditions Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest).
Il raconte son arrestation à Bègles alors qu'il distribue des tracts communistes. Il a 16 ans. Il raconte aussi ses différents internements, au Fort du Hâ à Bordeaux, au camps de Souge à Mérignac où 300 personnes seront fusillées, à Compiègne et enfin à Sachenhausen en Allemagne.
Plutôt que de s'attarder sur l'angoisse permanente, la malfaisance quotidienne des SS, la mort lente, Georges Durou explique qu'il a préféré "mettre en relief les petits faits qui alimentaient l’espoir et soutenaient le moral et la volonté de s’en sortir.
J’ai souhaité mettre l’accent sur la solidarité, la lutte quotidienne pour tenter d’aider celui dont la vie ne tenait plus qu’à un fil, pour chercher les mots susceptibles de créer pour soi et pour les autres, le sursaut de résistance humaine nécessaire à la survie. J’ai fait ce choix. Je laisse le lecteur apprécier ».
Devant notre caméra, il raconte son 8 mai 1945. "On a été évacué du camp de concentration. On est parti à 30 000 sur les routes. On a marché 13 jours, 900 kilomètres sans manger et en étant constamment dehors. On a eu de la pluie, du froid, on en a perdu la moitié en chemin. Le 8 mai 1945 on avait faim oui".
Il nous confie aussi qu'il "voulait en avoir le coeur net" à son retour. Alors il consulte les archives de la Préfecture. Il veut savoir qui était responsable des camps, "et effectivement ils se sont vautrés dans la collaboration. Ils en ont fait plus que ce qu'on leur demandait" dit-il.
A l'aube de sa vie, soucieux de ne pas laisser tomber dans l'oubli ses nombreux documents, il a décidé de les léguer aux Archives. Huit mètres de rayonnage et des photos exposées en vitrine.
Un geste d'autant plus précieux que les témoins et les rescapés de l'horreur disparaissent peu à peu.