Le 12 juin dernier, Bordeaux se paraît aux couleurs de l’arc-en-ciel, à l’occasion de la marche des fiertés qui promeut les droits des personnes LGBTQIA+. Une fête gâchée par de nombreuses violences que la mairie et deux associations ont décidé de dénoncer.
La mairie de Bordeaux, ainsi que le Girofard,SOS Homophobie et STOP Homophobie ont décidé de porter plainte pour violences, insultes, incitation à la haine et dégradations. “On ne veut pas laisser ces actes sans réponse. Ces actes ne sont pas légitimes dans l’espace public. L’homophobie est un délit. On ne se laissera pas faire”, martèle Tristan Poupard, le directeur du Girofard.
Ce jeudi 30 juin, deux personnes étaient placées en garde à vue, selon la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) de la Gironde.
Jets de dissolvant, insultes et dégradations
Dès le matin ce 12 juin 2022, la mairie de Bordeaux constate des dégradations : les passages piétons arc-en-ciel de la ville ont été bombés aux couleurs du drapeau français.
Ces violences symboliques se sont concrétisées dans l’après-midi, pendant le cortège qui a réuni plus de 5 000 participants. “Il y a eu des insultes, certains ont reçu ce qui ressemble à du dissolvant projeté par des pistolets à eau, détaille Tristan Poupard, directeur du Girofard.
C’étaient des groupes qui se déplaçaient dans la ville. Ils n’étaient pas nombreux, mais ont été très virulents.
Tristan Poupard - Directeur du GirofardSource : France 3 Aquitaine WEB
Sur les quais, une dizaine de personnes sont montées sur le toit de la maison écocitoyenne pour déployer une banderole qui portait un message homophobe, appelant à protéger les enfants des personnes LGBTQIA+. “C’est totalement l’opposé de notre démarche. Nous demandons au contraire à éduquer et sensibiliser la société dès le plus jeune âge, en proposant notamment des espaces pour les enfants”, regrette Tristan Poupard.
Neuf garde à vues
Les individus ont été rapidement interpellés par la police. Ils ont ensuite été placés en garde à vue pour groupement violent, dégradation et violence avec arme par destination avant de reconnaître les faits. Des faits, que la justice n’a cependant pas été en “mesure de caractériser”, rappelle le Parquet. “Aujourd’hui, nous n’avons rien de significatif dans le profil de ces personnes qui puissent évoquer un comportement radicalisé ou extrémiste", précise le parquet tandis que les associations assurent avoir repéré des saluts nazis en marge de l’action.
Autre explication, avancée par le parquet de Bordeaux : il n’y avait pas de plaintes concernant des actes homophobes au moment des garde à vues. Les neuf personnes ont donc été remises en liberté le lendemain.
Une situation incompréhensible pour GLM Avocats, le cabinet d’avocats qui représente les deux associations. “Nécessairement, il y a un manquement qu’il faut comprendre. Nous voulons des réponses et les responsables doivent être condamnés, c’est une évidence”, souligne Thibault Laforcade, l’avocat des deux associations.
Plus de 200 témoignages
À l’appel des deux associations, le cabinet rassemble désormais l’ensemble des preuves vidéos, photographiques et des témoignages pour constituer un dossier, même s’il rappelle que “quand des faits aussi graves sont relevés, il n’y a pas de stratégie à vouloir multiplier les preuves”.
Nous voulons que chaque victime sorte du silence, que ça se sache pour ne pas que ces actes soient cautionnés. Nous ne voulons pas qu’elles aient peur, nous voulons qu’elles soient accompagnées.
Thibault Laforcade, avocat de GLM AvocatsSource France 3 Aquitaine WEB
Projectiles, violences verbales et physiques, plusieurs personnes ont donc choisi de témoigner. "C'est difficile à quantifier, mais on a reçu plus de 200 signalements sur les réseaux sociaux de victimes, de témoins, explique Tristan Poupard.
De son côté, le parquet de Bordeaux a rouvert l'enquête dès le dépôt des plaintes et promet un examen complet. “Nous allons organiser des auditions des témoins, mais aussi des victimes, réexaminer la vidéosurveillance ainsi que les éléments transmis par les victimes”, précise le parquet de Bordeaux.
Les associations espèrent désormais que ce dernier renverra leur affaire devant le tribunal correctionnel, en vue d’un procès. En 2021, les actes homophobes ont augmenté de 12 % par rapport à 2019.