Une semaine après l’annonce d’un mode dégradé aux urgences, rien ne semble avoir changé au CHU de Bordeaux. Aides-soignants et médecins étaient mobilisés ce mardi matin, pour dénoncer une situation critique.
Devant le CHU, les visages sont tirés. Pourtant, depuis mercredi 18 mai, les urgences de l’hôpital n’accueillent plus que les cas graves. Pour venir, il faut d’abord contacter le 15.
"On n'est plus dans la bienveillance"
Mais dans les services, le moral reste au plus bas. En cause, des conditions de travail toujours aussi dégradées.
On est appelés sur nos jours de repos pour travailler en heures supplémentaires et pallier le manque d’effectif.
Agnès Bourdageaud, aide-soignante aux urgences de l’hôpital Pellegrin.
Elle travaille dans ce service depuis trois ans. Convaincue de son métier, elle regrette pourtant de ne pas pouvoir l’exercer dans de bonnes conditions. “On est en sous-effectifs, on avance comme on peut, mais ce sont les patients qui en pâtissent. On est plus dans la bienveillance, on vit très mal de travailler comme ça”, regrette l’aide-soignante.
Mais aujourd’hui, leurs craintes sont renforcées par l’arrivée des touristes. “On est en mai et on a environ 600 lits de fermés sur le CHU de Bordeaux. On est très inquiets pour la période estivale avec l’afflux de population en Gironde”, explique Gilbert Mouden, infirmier-anesthésiste et représentant du personnel Sud Santé Sociaux.
► Reportage de C. Olivari et L. Bignalet
Attirer de nouvelles recrues
Si la mésinformation des citoyens, qui venaient aux urgences parfois sans être dans un état grave a joué sur la saturation du service, les représentants rappellent que le véritable problème vient du manque de personnel. “Les urgences, c’est symbolique. Mais quand les urgences vont mal, tous les services vont mal”, martèle Gilbert Mouden.
Crise covid, épuisement des équipes ou faible rémunération, autant de problèmes qui ont usé les personnes. “Des soignants démissionnent de l’hôpital tous les jours pour se former et exercer un autre métier”, regrette Alain Es-Sebbar, secrétaire général de la CGT Pellegrin. Ils seraient 900 à avoir quitté l'hôpital en 2021.
Déjà, lors du Ségur de la santé, les syndicats avaient obtenu une revalorisation de 182 €. Trop peu.
Il faut augmenter les salaires pour attirer de nouvelles personnes et éviter les démissions. L’attractivité de l’hôpital public, c’est la clé.
Alain Es-Sebbar, délégué syndical CGT Pellegrin
La direction de l’hôpital n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet. Elle a tout de même reçu les délégués syndicaux ce matin. Ils ont rencontré l’Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine, ce mardi après-midi, mais l’espoir d’une solution pérenne semble loin. " Benoit Elleboode, son directeur, reconnait toutes les difficultés qui se sont accumulées et partage les préoccupations des soignants.
Aujourd'hui, je pense qu'il va falloir faire un effort supplémentaire pour les rémunérations la nuit et le week-end qui sont des contraintes dans nos habitudes de vie aujourd'hui, qui sont de plus en plus difficiles à assumer pour la population.
Benoit Elleboode - directeur ARS Nouvelle-AquitaineSource : France 3 Aquitaine
"Il faut que ce soit le système qui fasse cet effort." ajoute-il.
Le CHU de Bordeaux n’est pas le seul à tirer la sonnette d’alarme : dans le département comme partout en France, d’autres hôpitaux ont été contraints de fermer des services, faute de personnel.