Dans la nuit de mardi à mercredi 7 avril, les tempèratures ont chuté parfois jusqu'à -6°C dans les vignes girondines. Ce sont les Graves qui ont été le plus touchées malgré les moyens dépêchés sur place.
"C'est la catastrophe", résume Mayeul L’Huillier, directeur du syndicat viticole des Graves : « C’est descendu entre - 2°C , et jusqu’à - 4°C, - 6°C parfois. Et à -6°C, pas grand-chose ne peut résister. On a lutté toute la nuit avec tous les moyens envisageables, mais ce n’est pas fini. Il y a encore demain, puis mercredi et jeudi de la semaine prochaine. Le mois d’avril va être long".
Voilà qui donne le ton. Pour l'instant, difficile de chiffrer les dégâts. Cette journée de mercredi 7 avril, les professionnels vont donc tenter de recenser les parcelles touchées avant un nouveau gel la nuit prochaine.
« A – 6°C, pas grand-chose ne peut résister. On a lutté toute la nuit avec tous les moyens envisageables, mais ce n’est pas fini (...), le mois d’avril va être long. C’est un peu la catastrophe » (M.l'Huillier, Syndicat Graves) #Bordeaux #Gironde #viticulture #vin @vinbordeaux33 pic.twitter.com/U66SdWl8Dg
— France 3 Aquitaine (@F3Aquitaine) April 7, 2021
Dès hier soir, mardi 6 avril, tous les moyens avaient été mis en oeuvre pour lutter contre ces températeures négatives. Bougies entre les rangs de vignes, éoliennes, ou encore survol d'un hélicoptère dès 7 heures ce mercerdi matin pour brasser l'air chaud situé à 10 mètres au dessus des vignes. Mais souvent, cela n'a pas suffit.
« Cela a tapé plus fort que prévu », explique Christophe Chateau directeur de la communication du CIVB. « C’était annoncé à -1°C, -2°C. Et on a eu jusqu’à -6°C par endroits. C’est bizarre car il n’y avait pas d’humidité. Ce sont les zones gélives qui ont pris comme dans les Graves, dans l’Entre-Deux-Mers et le Nord de la Gironde ».
Témoignage de Fabrice Reynault, viticulteur >
A Portets dans les Graves, pour les salariés du Chateau de L'Hospital, les heures à venir vont être cruciales. On a été touché cette nuit mais c’est difficile à estimer pour l’instant », analyse Julien Zuanet, responsable du vignoble. « On verra cela dans à peu près deux heures. Mais déjà les feuilles deviennent marrons comme de la salade qu’on aurait laissée au frigo. Et puis l’apex, le bourgeon terminal du bois de l’année, est en train de baisser. Nous avons 40 hectares en bio et biodynamie. On a travaillé cette nuit en appliquant de la valériane. Mais cela n’a pas été efficace car on est descendu jusqu’à -6°C dans certaines zones. D’habitude on n’applique pas la valériane comme cela dans la nuit. On le fait plus tôt pour réchauffer le sol. Elle permet de faire circuler la sève dans les bois qui ont déjà poussé".
"Nous n’avons pas installé de bougies car c’est trop coûteux : 3000 euros par hectare. C’est trop cher, et il faudrait beaucoup de salariés pour les installer. Ca va pour les grands crus mais nous, nous n’avons pas les moyens. On a fait du feu avec du foin, mais cela n’a pas marché car la fumée est montée sans créer de brouillard ».
Ce qui est notable pour tous en Gironde, ce sont les effets du réchauffement climatique. Avec celui-ci, bourgeons et pousses avaient déjà fait leur apparition. Cet épisode de gel aura sans aucun doute des conséquences sur les vignes.
En 2017 déjà, 39% de la récolte avaient été perdus sur tout le vignoble bordelais après un épisode de gel. Seulement 3,8 millions d’hectolitres avaient été produits contre cinq millions en moyenne en temps normal.
Les Landes également touchées
Dans les Landes, ce sont les vignobles de l’Armagnac et du Tursan qui ont également été sévèrement touchés par cet épisode. L'évaluation des dégâts est en cours tout comme en Gironde.
Selon Météo France, la matinée de ce mercredi 7 avril a été la plus glaciale à Créon d’Armagnac à cette saison, où la température est tombée à -6,2 °C au plus froid.
L’analyse et les prévisions de Météo France
« On n’était pas sur des prévisions aussi basses dans un premier temps, explique Philippe Caron chef prévisionniste régional à Météo France Bordeaux . « Les températures étaient prévues pour être froides, mais elles ont été plus froides que prévu. Sur la Gironde, les records mensuels ont été observés à Belin-Beliet et Vendays Montalivet. A Belin–Beliet par exemple on a eu - 4,5°C, pour un ancien record de - 2,3°C en 2008 ». Sur la Gironde, à Captieux il y a eu - 4,7°C, mais toutes les stations ne sont pas référencées chez nous du coup nous n’avons pas toutes les températures du département ».
Ces températures pour un mois d’avril sont-elles atypiques ? "Non", répond Philippe Caron.
"Ce n’est pas régulier mais ce n'’est pas atypique. Ce qui est atypique ce sont les températures chaudes observées la semaine dernière".
Alors à quoi s’attendre dans les jours à venir ? "Pour demain matin, on peut s’attendre à la même chose que la nuit dernière", prévient le prévisionniste. "Mais faut être prudent car déjà aujourd’hui nos modèles ne prévoyaient pas de températures aussi froide. Donc on reste mesurés et vigilants même si le vent devrait rester de secteur Nord-Est. Dès jeudi après-midi, nous allons observer un radoucissement des températures avec un flux de Sud-Ouest. Par contre en début de semaine prochaine, lundi et mardi, on aura un retour des températures froides, mais à priori pas aussi froides qu’aujourd’hui".