Procès du Mediator. Le groupe Servier lourdement condamné en appel, un "immense soulagement" pour les victimes

Le groupe Servier a été condamné en appel à plus de 9 millions d'euros d'amende, et à verser plus de 415 millions d'euros aux organismes sociaux. Le laboratoire, qui commercialisait le Mediator, médicament accusé d'avoir provoqué de graves lésions cardio-vasculaires chez des milliers de victimes en France, a décidé de se pourvoir en cassation.

"C'est une immense satisfaction pour toutes les victimes", se félicite Maître Jean-Christophe Coubris. L'avocat défend 3 680 parties civiles dans le procès qui les oppose au groupe pharmaceutique Servier. "Pour celles qui ont eu le courage et la force de venir à l'audience, ça a été un immense soulagement de voir une décision qui prenait autant en considération leur souffrance et la médiocrité de l'attitude du laboratoire Servier."

Plus de 415 millions d'euros à rembourser

C'est une procédure "extrêmement éprouvante" pour les victimes, qui touche enfin au but, poursuit l'avocat. Mercredi 20 décembre, le groupe pharmaceutique Servier a été condamné par la cour d'appel de Paris à une amende de plus de 9 millions d'euros, ainsi qu'à rembourser plus de 415 millions d'euros à la Sécurité sociale et aux mutuelles.

Le laboratoire a commercialisé pendant plus de trente ans le Mediator, un médicament labellisé comme antidiabétique et prescrit à plus de cinq millions de personnes en France, entre 1976 et 2009. Ce médicament est accusé d'avoir provoqué de graves lésions cardiovasculaires chez ses utilisateurs. La cour d'appel a confirmé la culpabilité du groupe Servier pour les délits de tromperie aggravée et d'homicides et blessures involontaires, et a ajouté ceux d'escroquerie et d'obtention indue de mise sur le marché.

Une condamnation plus lourde en appel

La décision de la cour d'appel est d'autant plus une satisfaction qu'il alourdit les sanctions décidées en première instance.

C'est un délibéré extrêmement fort, qui met en avant toutes les manœuvres frauduleuses du laboratoire. Ils ne pouvaient pas ignorer la dangerosité du médicament avant sa mise sur le marché.

Me Jean-Christophe Coubris

Avocat de 3 680 parties civiles au procès du Mediator

 Le chef d'escroquerie avait notamment été écarté, le tribunal considérant que le point de départ des faits remontait à 1974 et donc amenait une prescription pénale.  "C'était un point purement technique, mais cela avait sauvé le laboratoire, pointe l'avocat spécialisé dans le droit du dommage corporel. La cour d'appel a considéré, de façon assez logique, que le renouvellement d'attitudes d'escroquerie relançait de nouveaux points de départ et annulait donc la prescription."

Le laboratoire pharmaceutique a été reconnu coupable d'avoir manœuvré pour faire rembourser le Mediator par les mutuelles et la Sécurité sociale comme antidiabétique, alors "qu'ils ne pouvaient pas ignorer son inutilité pour cette pathologie, et sa dangerosité. De plus, nous savons, grâce au dossier, que sans ce remboursement, Servier n'aurait pas pu poursuivre la commercialisation. Leur objectif principal, c'était donc la bonne opération financière", développe Me Jean-Christophe Coubris.

Un an de prison ferme pour l'ex-bras droit

Un chef d'accusation qui les condamne à verser plus de 415 millions d'euros aux organismes sociaux, ce qui n'était pas le cas en première instance. La cour d'appel a également alourdi les sanctions à l'encontre de Jean-Philippe Seta, l'ex-bras droit du fondateur du groupe, Jacques Servier (décédé en 2014). Seule personne physique prévenue présente en appel, il a été condamné à quatre ans de prison, dont un an ferme sous bracelet électronique.

"Je ne peux que me féliciter de cette décision, réagit Me Jean-Christophe Coubris. Cette condamnation pénale de Monsieur Seta est aussi une très grande satisfaction pour l'ensemble des victimes, cohérente par rapport à son implication dans la commercialisation du Mediator pendant trente-trois ans."

Nous sommes à la fin de ce combat, de ce marathon judiciaire qui dure depuis plus de treize ans. C'est un sentiment de victoire, un peu gâché par l'annonce immédiate du pourvoi en cassation.

Me Jean-Christophe Coubris

Avocat de 3 680 parties civiles au procès du Mediator

Dès l'annonce de la décision, les avocats du groupe Servier ont annoncé leur intention de se pourvoir en cassation. "On ne sait pas si ce pourvoi va être total ou bien partiel, s'ils vont se concentrer uniquement sur certains chefs d'inculpation comme l'escroquerie. Je pense qu'ils n'avaient pas forcément envisagé de devoir rembourser les organismes sociaux", avance l'avocat.

Gérer les indemnités

Si elles sont satisfaites de la décision de la cour d'appel, les victimes attendent maintenant avec une certaine inquiétude les informations sur ce pourvoi en cassation. Car si le groupe Servier est tenu de verser immédiatement l'intégralité des sommes qui lui sont demandées, un pourvoi sur l'intégralité des sanctions signifie un risque de voir les indemnités aux victimes potentiellement modifiées.

"S'ils se pourvoient sur le tout, on peut craindre qu'il soit nécessaire de gérer en bon père de famille les sommes obtenues, avant la décision finale", résume Me Jean-Christophe Coubris. Le groupe Servier a jusqu'au 26 décembre pour donner les contours de ce pourvoi en cassation.

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