Traite d'êtres humains : des peines de prison requises contre un père et son fils accusés d'avoir exploité des travailleurs marocains

Un père et son fils étaient jugés ce mardi 15 octobre au tribunal judiciaire de Libourne. Ils sont accusés de travail dissimulé et de traite d’êtres humains, au sein des exploitations viticoles pour lesquelles ils fournissaient de la main d’œuvre. Deux ans de prison, dont un avec sursis probatoire de deux ans a été requis contre le père. Un an de prison avec sursis a été requis contre le fils.

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C’est un “vrai phénomène qui gangrène le Libournais”. C’est par ces mots que l’avocate générale expose ses réquisitions. Ceux qu’elle dénonce, ce sont deux hommes, père et fils de 59 et 28 ans. Ils étaient jugés ce mardi 15 octobre au tribunal judiciaire de Libourne pour travail dissimulé et traite d’êtres humains par cinq personnes, âgées entre 20 et 30 ans, qu’ils auraient employées sans les payer entre juin et septembre 2022 dans des propriétés de Saint-Emilion, notamment.

Un avenir à 12 000€

À la barre, les témoignages de ces cinq ressortissants marocains s’enchaînent, avec les mêmes mots. Ils ont été recrutés au Maroc par le fils, qui leur promettait trois mois de travail, un hébergement en France et un titre de séjour. Une vie rêvée pour ces Marocains pour un certain prix : 12 000€, soit 120 000 dirhams, en espèce. “On leur a fait des promesses. Ces employeurs peu scrupuleux ont joué sur les espoirs et les fantasmes d’un avenir meilleur sur le territoire français”, indique Me Jean Trebesses, l’un des avocats des victimes.

Les accusés, Ahmed et Medhi J. offrent leur service et leur main d’œuvre aux propriétés viticoles du Libournais. Un travail éreintant que ces ouvriers viticoles vont effectuer parfois jusqu’à 15h par jour. "C'est ce que font les travailleurs de la vigne en général", raisonnent leurs avocats. À la barre, ils confient avoir travaillé une vingtaine de jours, “sans jamais avoir été payés”.

Une version que nient les deux accusés. "Il n'y a rien de vrai dans ce qu'ils disent", insiste le père. Eux, assurent que ces travailleurs étrangers, dont certains étaient poissonniers ou garagistes, n’ont finalement jamais travaillé, en raison de leur qualité de travail. Leurs avocats précisent d'ailleurs que les deux hommes, par le biais de leur société charentaise, également jugée en tant que personne morale, emploient d'autres saisonniers qu'ils payent. 

En parallèle, les cinq ressortissants marocains témoignent de conditions de vie insalubre. Logés dans un petit appartement appartenant à un de leurs employeurs, douze personnes pouvaient y dormir, dans moins de 20 m², souvent sale et insalubre. Pour preuve, des photos et vidéos qu’ils joignent au dossier.

Un concours de circonstances pour les accusés, qui affirment que le logement n’est généralement pas dans cet état. "Ils étaient logés chez moi parce qu'ils n'avaient nulle part où aller. Je leur laissais même mon logement pour dormir dans mon camion", assure le fils, Medhi.

Titres de séjour

Dans leur défense, le père et le fils, ainsi que leurs avocats, suspectent les ressortissants d’avoir porté plainte pour obtenir des documents. En effet, les cinq Marocains ont déposé plainte quelques jours avant que leur titre de séjour n’arrive à expiration. "Ils disent mot pour mot les mêmes choses, sur le montant de leurs économies et les prêts contractés auprès de leurs familles", indique l'avocate de la défense. Des dettes qui empêcheraient les plaignants de retourner au Maroc sans être en capacité de les rembourser. "C'est une forme de déshonneur", indique l'un d'entre eux.

Les plaignants affirment de leur côté avoir porté plainte après avoir été expulsés par leur propriétaire et employeur. “Au moment où ils déposent plainte, ils ont déjà des papiers. Il n'y a donc pas d’intérêt à porter plainte pour avoir des papiers, surtout qu’à l’époque, ils ne savaient pas que porter plainte leur accorderait le droit”, indique Me Mylène Da Ros, l'avocate des parties civiles.

Depuis, les cinq ressortissants ont en effet obtenu de nouveaux papiers, aidés par une association. Si la traite d’êtres humains est reconnue, des cartes de résidents valables dix ans pourraient leur être accordées. Les avocats de la défense ont demandé des indemnités de 12 000€ au titre du préjudice financier, 5 000 € pour le préjudice de la perte de chance et 10 000€ pour préjudice moral.

Si les avocats de la défense ont quant à eux demandé la relaxe de leurs clients, l’avocate générale a, quant à elle, requis deux ans de prison, dont un ferme, pour le père et un an de sursis pour le fils. Le délibéré devrait être rendu le 5 novembre prochain.

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