Cet été la forêt des Landes de Gascogne a été mise à mal par les incendies. Deux méga-feux ont ravagés en Gironde, plus de 30 000 hectares de forêts sur 600 000, à la Teste-de-Buch et sur la commune de Landiras. Un bilan révélateur de notre vulnérabilité face à ces évènements intenses et de plus en plus fréquents. Quel est l’avenir de cette forêt, la plus grande forêt artificielle d’Europe et comment mieux la protéger ?
12 juillet 2022, le cauchemar démarre en Gironde. A quelques heures d’intervalle, les communes de Landiras et de la Teste-de-Buch sont touchées par des incendies d’une extrême ampleur. Attisé par une sécheresse intense et des températures caniculaires, le feu prend rapidement d’importantes proportions et devient hors de contrôle. Il sera finalement fixé 13 jours plus tard, le 25 juillet. 30 000 hectares de forêt au total sont ravagés.
Tester des essences plus résistantes face au réchauffement climatique
Deux mois après, l’heure est au bilan et au retour d’expérience. Ces incendies ont marqué le département de la Gironde et même au-delà. Partout en Nouvelle-Aquitaine, forestiers, politiques, pompiers et scientifiques cherchent des solutions. Comment éviter qu’un tel évènement se reproduise ? Voilà tout l’enjeu de la réflexion engagée.
A quelques kilomètres de là, dans les Landes, département voisin largement épargné par les mégas-feux cet été, Clément Réglat se penche sur cette question depuis plusieurs années. Technicien forestier au sein de l’ONF il travaille sur la forêt de demain.
On teste les essences d’accompagnement du pin maritime. Le but étant de voir ce qui s’adapte le mieux face au réchauffement climatique. Pendant une dizaine d’années on va suivre ces parcelles expérimentales sur lesquelles nous avons donc planté une différentes variétés d’essences (en l’occurrence ici, du pin maritime accompagné de bouleau) pour voir ce qui fonctionne le mieux ».
Cément Réglat,Technicien forestier territorial à l’ONF
Avant d’ajouter, « le pin maritime c’est aujourd’hui l’essence la plus résistante au réchauffement climatique c’est pour ça que pour nous tout l’enjeu est de voir aujourd’hui ce qui peut fonctionner en accompagnement pour rendre les parcelles moins inflammables ».
Nommé « Néoterra », ce projet est aujourd’hui expérimenté sur 7 sites : Vertheuil, Hourtin ; Salles/Lagnereau ; Lanton ; Ychoux et Campet.
Faire renaître la forêt après un incendie
Non loin de là, sur la commune de Saint-Aubin-de-Médoc, Bernard Barbeau réfléchit lui aussi à l’avenir de cette forêt. Adjoint au maire et président de l’ASA de DFCI (Défense des forêts contre les incendies en Aquitaine) de Saint-Aubin-de-Médoc, il vit chaque été avec cette crainte qu’un nouvel incendie se déclare sur sa commune. Saint-Aubin-de-Médoc a été en effet touchée par des incendies à de nombreuses reprises. « Le plus terrible était celui de 1990, il avait détruit 5600 hectares », nous confie Bernard Barbeau.
L’adjoint au maire en charge de la forêt s’est penché sur les différentes solutions pour permettre à cette forêt de reprendre ses droits après un incendie. « Cette parcelle par exemple, a entièrement brûlé en 2020 suite à un important feu de forêt. Le propriétaire a laissé son terrain naturellement se régénérer. Deux ans après on voit déjà apparaître de nouveaux sujets, et si tout va bien ce sera la forêt de demain », explique Bernard Barbeau.
Au milieu du sol encore noirci, l’espoir de voir renaître la forêt : « deux ans après on voit déjà apparaître de nouveaux sujets, et si tout va bien ce sera la forêt de demain ».
« L’Etat doit être conscient que le risque de feu de forêt est aujourd’hui national »
Ici aucune intervention de l’homme n’aura été nécessaire pour permettre à cette forêt de pins de renaître. Mais, « cela ne fonctionne pas partout, tout dépend de la nature des sols. Parfois, il faut entièrement replanter la parcelle », ajoute Bernard Barbeau.
Il faut tirer les conséquences de ces incendies et se dire qu’on ne peut plus travailler comme avant. Il y a deux axes importants selon moi : faire connaître ce risque incendie ; et mieux protéger ce patrimoine. Notre forêt n’est pas surveillée, les jours à risques on n’a pas les moyens de patrouiller. Nous le faisons avec nos petits moyens mais l’Etat doit être conscient que le risque de feu de forêt est national. Si on ne nous donne pas les moyens d’intervenir en prévention, ça coutera beaucoup plus cher en lutte ».
Bernard BarbeauPrésident de l’ASA de DFCI de Saint-Aubin de Médoc
Ce patrimoine est aujourd’hui primordial pour la préservation de la biodiversité. Bien qu’artificielle, cette forêt représente un réel intérêt écologique : « toutes les parcelles même dédiée à la sylviculture ont un intérêt pour le captage de CO2, ça stocke le carbone et même une fois coupé il continue à stocker du carbone tant qu’il n’est pas brûlé. Nous devons absolument les préserver », conclut Clément Réglat.
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