Hakob Melkonyan, cinéaste arménien installé à Limoges, sort son dernier documentaire "Nous étions frères", sélectionné au festival international du film d'histoire de Pessac, du 20 au 27 novembre. Rencontre avec ce réalisateur qui nous transporte en Arménie, mais également en Géorgie, en Russie et en Ukraine...
Au cœur des guerres, la caméra s'impose comme une évidence pour Hakob Melkonyan, afin de recueillir le témoignage des civils. Le réalisateur arménien de 39 ans était notre invité au JT ICI 12/13, ce jeudi 26 octobre 2023, pour parler de son dernier documentaire : un périple de 3 000 kilomètres sur les traces de son grand-père qui le conduit aussi à confronter les situations de ces ex-républiques soviétiques avec leur réalité d’aujourd'hui en pleine ébullition.
France 3 Limousin : Pour ce film, vous êtes parti sur les traces de votre grand-père, mobilisé dans l'armée soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale...
Hakob Melkonyan : En 1942, mon grand-père était parti dans le Caucase du Nord pour participer à la Seconde Guerre mondiale comme soldat de l'Armée rouge. Il a disparu un an après. On ne trouvait aucune trace de lui. En 2017, ma famille a reçu un courrier des archives militaires de la Russie dans lequel on a trouvé son carnet de route et son acte de décès. Mon père m'a montré les photocopies de ce journal, c'était bouleversant pour moi et pour ma famille. Je trouvais que c'était un excellent sujet pour un documentaire.
Et vous confrontez son histoire avec la réalité d'aujourd'hui...
Dans son journal, il était marqué 'Nous, avec nos frères azéris ou ukrainiens, russes, géorgiens, on fait la guerre contre l'Allemagne nazie.' Quand j'ai lu cette phrase, ça m'a bouleversé, car les frères de mon grand-père, aujourd'hui, sont devenus des ennemis. Ma génération ne connaît pas cette fraternité, ils font la guerre les uns contre les autres.
Il fallait absolument que je traverse tous ces pays dont parle mon grand-père dans son journal et montrer à la fois la Seconde Guerre mondiale à travers son carnet et aussi la réalité actuelle des conflits dans cette région.
Ce film, c'est le troisième d'une trilogie sur l'Arménie après "L'Arbre" et "Le Blocus"... Vous êtes en fait sans cesse rattrapé par l'actualité ?
Quand j'ai débuté le tournage, la guerre entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan commençait. C'est pour cela que la première partie du film explique ce conflit. Ensuite, je continue mon chemin, j'ai fini en Ukraine avec la guerre actuelle.
Le documentaire "Nous étions frères" est sélectionné au 33ᵉ festival international du film d'histoire qui se tiendra du 20 au 27 novembre au cinéma Jean-Eustache à Pessac.
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